L 'Expérience communiste LE CONFLIT DE LA SCIENCE ET DU « DIAMAT » par Serge Voronitsyne E N AVRIL DERNIER s,est tenue à Moscou la Conférence des étudiants de !'U.R.S.S., dont le thème central a été le relâchement croissant de la discioline idéolo- .. gigue parmi la jeunesse des universités. Au vu des documents qui ont été publiés, il apparaît que nombre d'étudiants, qui demain auront la charge de secteurs vitaux pour la vie scientifique, économique et sociale du pays, ignorent tout simplement les théories du marxismeléninisme, ou diamat ( abréviation soviétique pour matérialisme dialectique) : pour eux, les ·œuvres des classiques du marxisme ne sont rien d'autre que des livres qu'il est indispensable de lire pour réussir ses examens (Komsomolskaïa Pravda, 20 avril 1966). Cette attitude négative envers les sciences sociales et l'idéologie s'observe notamment parmi ceux qui étudient la physique, l'électronique, la cybernétique et autres spécialités des plus modernes. L'enthousiasme des jeunes spécialistes pour les nouvelles techniques scientifiques, dont le développement est si rapide, commence même à prendre chez eux la forme d'une certaine concêption du monde pseudoscientifique qui les incite à s'écarter de la ligne idéologique officielle suivie par le Parti. Il n'est donc pas étonnant que la conférence ait prêté attention aux doutes qui se sont manifestés dans les instituts techniques quant à l'utilité pratique des sciences sociales. A titre d'exemple, on a cité le cas d'étudiants qui avaient placardé, au-dessus d'une chaire de marxisme : « La physique est tout, le reste n'est rien » (ibid.). Sur le plan pratique, l'admiration sans réserve pour les sciences exactes conduit l'étudiant à des comparaisons, très fâcheuses au Biblioteca Gino Bianco point de vue des dirigeants communistes, avec les résultats concrets atteints dans le domaine des sciences de la nature et des sciences sociales : Il est très vraisemblable, voire inévitable, que, par , exemple, un étudiant en physique s'efforce de comparer « l'issue pratique » de sa spécialité avec celle des sciences sociales et politiques. Une compréhension insuffisante du sens dialectique du monde qui l'entoure conduit souvent l'étudiant à transposer dans l'ordre social les exigences que nous attribuons aux lois de la nature (ibid.). En d'autres termes, en comparant, d'une part, les résultats pratiques obtenus ces dernières années par la science technique soviétique aussi bien qu'étrangère, d'autre part, les résultats insignifiants obtenus après un demisiècle d'efforts pour faire entrer à tout prix les processus d'évolution économique et sociale dans le cadre idéologique étroit de théories pseudo-scientifiques, l'étudiant conscient ne peut s'empêcher de constater la faillite des fameuses « lois de l'évolution sociale ». Ces derniers temps, se sont fait entendre de nombreuses plaintes de la part des fonctionnaires du Komsomol, qui ont pour tâche la formation idéologique des jeunes Soviétiques : A notre époque, alors que la méthode économique ou scientifique pour aborder n'importe quel problème est devenue un signe des temps, il est très difficile de convaincre le jeune komsomol étudiant qu'il est socialement utile et économiquement profitable à l'Etat de disposer de spécialistes qualifiés pour décharger les légumes dans un entrepôt, pour collecter la ferraille, etc. Le savant ou l'ingénieur spécialisé dans la recherche, de manière pratiquement inconsciente, applique automatiquement la méthode dont il use dans son travail quotidien (qui consiste, en règle générale, à trouver la solution la meilleure à un problème) aux phénomènes du monde qui l'entoure (Kom. Prav .• 27 mai 1966).
RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==