Le Contrat Social - anno X - n. 5 - set.-ott. 1966

DOCUMENTS but de parvenir à la dictature chez nous comme leurs semblables ont pu réussir à le faire ailleurs avec l'appui de cette puissance. Pour eux, qui invoquent à grands cris la justice sociale et l'affranchissement des masses, il s'agit en réalité de plier notre beau pays à un régime de servitude totalitaire, où chaque Français ne disposerait plus ni de son corps ni de son âme, et par lequel la France elle-même deviendrait l'auxiliaire soumise d'une colossale hégémonie. Pour atteindre leurs fins, il n'y a pas de moyens que ces hommes n'emploient. Suivant l'opportunité, on les voit préconiser des thèses aussi catégoriques que successives et contradictoires. Il n'existe pas une idée, un sentiment, un intérêt qu'ils n'utilisent tour à tour. L'ordre ou la révolution, la production ou l'arrêt du travail, la liberté ou la contrainte sont affichés dans leur programme et inscrits sur leurs bannières suivant ce qui leur paraît devoir être de meilleur rapport. Point de grande œuvre, de noble figure, de gloire nationale qu'ils n'aient parfois maudite et parfois accaparée. A l'égard des idées, des actes, de la personne des autres, rien qui approche de l'équité ni de la vérité ; seule compte l'utilité que dans l'instant ils leur attribuent. Suivant qu'ils croient ou qu'ils ne croient pas pouvoir en tirer quelque chose, c'est tantôt la bonne grâce, la flatterie, la main tendue et tantôt l'injure, la calomnie, la menace. Mais à travers les méandres compliqués de leurs procédés apparaissent l'habileté à tromper leur clientèle et l'acharnement à se placer dans les postes et dans les conditions où l'on peut le mieux agir, et surtout, il ne semble que trop, le plan arrêté de développer dans tout le corps de la nation cette confusion qui la rendrait plus accessible à leur entreprise. Tout se passe, en effet, comme si, en revendiquant bruyamment l'union des républicains, le progrès social, l'indépendance nationale, ce groupement n'agissait en fait que pour aggraver sans relâche les difficultés multiples dans lesquelles la France se débat. Alors qu'il nous est si difficile de créer parmi nous un climat de concorde, le pàrti dont il s'agit ne cesse de jeter du sel sur chacune de nos plaies et d'ameuter les unes contre les autres les diverses catégories françaises. Alors que nous éprouvons tant de peine à nous doter d'institutions adaptées aux temps modernes, ces bons apôtres, jouant de l'illusion des uns et de l'inconscience des autres, ont réussi à pousser la République dans un régime d'impuissance. Alors que nous avons tant de mal à trouver un équilibre économique, social, financier, sur lequel nous puissions bâtir notre · Biblioteca Gino Bianco 311 reconstruction, ces hommes interviennent, au moment et sous la forme les mieux appropriés, pour jeter à bas l'édifice à mesure qu'il se construit. Alors que nous devons, sous peine d'en être dépouillés, faire l'Union française, de telle sorte qu'elle soit une union et qu'elle soit française, ces gens travaillent soit sur place, soit à Paris, pour soulever de frustes passions et saper l'autorité de la France. Alors que notre avenir est engagé dans une partie internationale très dangereuse et que se forme en Europe, par la force, un énorme bloc oriental, ces personnages ne se manifestent que pour soutenir parmi nous, exclusivement et avec fracas, les seules positions, les seules intentions, les seuls intérêt de la Russie soviétique ... . . . . . . . . "· . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Or la faille profonde dont, par leur fait, est menacée l'unité française, est d'autant plus grave et d'autant moins tolérable qu'elle se produit précisément en conjonction avec la situation extérieure créée par l'action de la Russie · soviétique et dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle est nettement alarmante. Et cependant quand, sous les coups des armées alliées, le Reich de Hitler se voyait envahir par l'Ouest et par l'Est, une grande espérance s'était emparée du monde. Chacun voulait croire alors qu'après les terribles épreuves que subissait la race humaine, tous les Etats - et d'abord les plus grands - mettraient désormais à la base de leur politique la coopération entre eux et le respect des autres. C'est dans ces sentiments qu'un nombre immense d'hommes et de femmes dans l'univers saluaient les victoires russes. Sans doute y avait-il là un juste hommage rendu à une vaillante armée dont l'offensive co'ntribuait par excellence à l'écrasement de l'ennemi, et à un grand peuple qui, après de cruels revers, avait su se redresser et développer tout son effort. Mais il y avait aussi le désir de voir ce peuple, longtemps tenu dans l'isolement par son régime intérieur, prendre sa place normale dans la communauté humaine et lui apporter la puissante contribution de ses ressourcés et de ses aptitudes. Le succès de la Russie ne pouvait en particulier que 'réjouir la France. Certes, au long de l'histoire, il était arrivé qu'elles se fussent combattues. D'autre part, certains événements, tels que la paix séparée de Moscou avec Berlin en 1917, ou le pacte germano-soviétique du mois d'août 1939, comme aussi notre propre faiblesse à l'égard de Hitler aux mauvais jours de Munich, avaient pu créer entre la Russie et la France de graves mésententes. Mais depuis

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