B. KERBLAY correspondant pour cette même année était de 19 % 5 • Le taux élevé de l'accumulation n'est pas particulier aux techniques soviétiques ; des taux plus élevés, ou à tout le moins équivalents, sont enregistrés par d'autres pays, telle la Norvège ; beaucoup plus remarquable est l' orientation donnée aux investissements. Entre 1953 et 1959, l'Union soviétique a consacré 40 % de ses investissements à l'industrie, les EtatsUnis seulement 25 % . Deuxième caractéristique : les prix sont fixés au niveau des coûts ; il n'y a pas de charges financières sur les capitaux investis, et par conséquent, en principe, les gains de productivité se propagent très vite d'un secteur à l'autre grâce à la baisse des prix. Au contraire, selon le modèle de Schumpeter, lequel souligne le rôle de l'innovation dans la transformation des structures économiques, on constate que le progrès technique qui entraîne des modifications d'organisation se diffuse lentement dans les économies occidentales, parce que les charges financières viennent freiner la baisse des prix et que ces charges font obstacle à la propagation de l'innovation. Troisième différence caractéristique : s'op-· sant en cela à la planification souple que nous connaissons en Occident, la planification soviétique n'a pas seulement pour tâche d'élaborer des plans : elle doit aussi donner des ordres aux entreprises. Les spécialistes de la planification en Europe orientale admettent qu'il est relativement facile de dresser des plans, mais extrêmement difficile de diriger la marche des entreprises. C'est dans ces relations entre la planification et la réalisation journalière du plan que résident la plupart des difficultés de l'économie soviétique et que se manifestent les principales déficiences du système. RESTE A SAVOIR si cette croissance spectaculaire, rendue possible grâce à des techniques et des structures assez particulières, s'est faite au moindre coût, si, en termes de rationalité économique, elle a été satisfaisante. On a souvent dit que l'économie soviétique, étant planifiée, est donc à l'abri de toutes les fluctuations du marché. En réalité, les études les plus récentes montrent que l'économie planifiée, tout comme l'économie de marché, a été et reste soumise à des fluctuations importantes. Je signalerai deux études sur ce point 5. A. Berpon, S. Kumeta : op. clt. Biblioteca Gino Bianco 30S l'une, de caractère historique, du professeur Zaleski, qui a étudié la planification en 192832 6 en montrant comment, durant cette période, les plans quinquennaux ont été soumis à des remaniements, au point qu'il n'y a pas eu pratiquement de premier plan quinquennal, mais une série de plans annuels sans cesse remaniés, constamment ajustés ; la seconde, qui concerne la période 1950-60 7, a montré qu'au cours de ces dix années les fluctuations des taux de croissance des économies planifiées avaient été au moins aussi importantes que celles des économies occidentales. Toutefois, dans les calculs du professeur Staller, les économies planifiées, celles des démocraties dites populaires et celle de !'U.R.S.S., sont prises ensemble. Si l'on isole les taux soviétiques, on constate des fluctuations beaucoup moins sensibles que celles des économies « libres » ; en particulier, pour la production industrielle, elles sont extrêmement faibles ; ce sont surtout les fluctuations de la production agricole qui sont importantes. Voici quelques chiffres : dans la période 1950-60, le taux annuel de la production industrielle de l'Union soviétique, par rapport à la moyenne de ces dix années, a varié entre 1,4 et 1,8 % , tandis que les variations ont été de l'ordre de 3,7 et 4,1 % par an dans les économies de marché. En U.R.S.S., la croissance industrielle n'évite pas non plus les ajustements défectueux ni les gaspillages. Examinons leurs principales causes, tout d'abord au niveau de la macro-économie, puis de la micro-économie. Au niveau de la première, il faudrait que les buts que se proposent les planificateurs au point de départ soient cohérents et qu'il n'y ait pas incompatibilité entre les diverses priorités choisies. Or l'expérience, du moins au cours des dix dernières années, prouve que ce n'est pas le cas. Lorsqu'on analyse le plan soviétique, on a l'impression que celui-ci ressemble à certains programmes électoraux dans les démocraties occidentales, qu'il est le résultat d'un compromis entre différentes tendances. On promet tout à tout le monde : l'accroissement du niveau de vie aux uns, celui des crédits militaires aux autres, sans que cela soit compatible (les dépenses militaires, notamment, sont passées de 9 milliards en 1960 à 14 milliards en 1964, et en 1965 elles se chiffrent encore à 12,9 milliards de roubles). 6. Eugène Zaleakl : Planification de la croluance et fluctuatiom konomlquu en U.R.S.S., 1918-1932, Paris 1962. 7. Prof. Staller, ln Amerfcan Economie Revlew, Juin 1964.
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