Le Contrat Social - anno X - n. 5 - set.-ott. 1966

L 'Expérience communiste LA PLANIFICATION SOVIÉTIQ!IE par Basile Kerblay LES JUGEMENTS sur l'économie soviétique sont souvent très partagés ; les uns parlent de « crise », constatent les difficultés, les autres soulignent les progrès. Ces divergences d'opinion se manifestent principalement à propos de l'agriculture, mais on s'accorde plus facilement à admettre que l'Union soviétique a fait, sur le plan industriel, des progrès considérables. Lorsqu'on recherche les raisons qui ont permis ceux-ci, les divergences apparaissent de nouveau. Quels ont été les facteurs de croissance ? Si l'on interroge un Soviétique sur ce point, il répondra probablement : « Le secret de notre réussite, c'est la planification ! » En Occident, beaucoup pensent que ce n'est pas exact ; selon eux, les Soviétiques n'ont rien inventé, ils n'ont fait qu'emprunter des techniques économiques déjà connues. Si !'U.R.S.S. a remporté des succès dans l'industrie, c'est, disent-ils, parce qu'elle a pu, pendant plusieurs décennies, investir à un rythme accéléré, et ces investissements n'ont été possibles qu'en raison des contraintes imposées à la consommation. En d'autres termes, dans cette optique, il n'y aurait pas de techniques économiques propres au système soviétique ; ce qui le caractérise tient essentiellement au régime politique. Le problème que je voudrais traiter ici est de savoir si la planification a été, et dans quelle mesure, le facteur de l'industrialisation soviétique. La première question à examiner peut se formuler comme suit : la croissance industrielle de l'Union soviétique présente-t-elle des caractéristiques particulières, ou bien sommesnous ici les victimes d'une sorte de mirage statistique ? Pendant plus de vingt ans, les meilleurs spécialistes de l'économie soviétique, Biblioteca G'no Bianco particulièrement aux Etats-Unis, se sont appliqués à résoudre ce problème en essayant de mesurer la croissance du produit national, en particulier de la production industrielle. Il n'est pas possible d'entrer dans le détail de tous ces travaux, mais il faut malgré tout consacrer un moment aux méthodes de calcul de la croissance, avant d'examiner si la planification a été le facteur de celle-ci. Pour mesurer cette croissance, on peut se placer à deux points de vue. Le premier est celui des résultats obtenus au niveau de la consommation, du bien-être procuré à la population. Le second est celui de l'accroissement de l'appareil de production ; c'est l'optique adoptée par les planificateurs soviétiques et par la plupart des spécialistes occidentaux des choses soviétiques. Selon cette optique, nous aurons à additionner des agrégats composés de prQduits industriels extrêmement variés : par exemple des chapeaux de paille, des chaussures, du ciment, de l'acide sulfurique. Il nous faudra pour cela choisir un système de pondération, additionner la valeur de ces différents produits. Quel système de prix adopter ? Si · nous nous placions au point de vue du consommateur, de ses préférences, il nous faudrait choisir les prix de marché. Nous avons préféré adopter l'optique des producteurs qui, eux, raisonnent sur la base des coûts de production. Une autre difficulté va se présenter. Le volume de la production n'est pas en cause - on est généralement d'accord sur ce volume physique, - mais il s'agit de déterminer les prix de revient applicables aux différents éléments. Doit-on utiliser les prix du début de période, comme le faisaient les Soviétiques de ,

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