B. KERBLAY eussions ont continué pendant toutes les dernières années du pouvoir de Khrouchtchev 3 • Un dernier projet lancé par Khrouchtchev avant de disparaître fut une tentative pour pousser l'industrialisation de l'agriculture : il s'agissait de ne pas considérer l'agriculture comme un secteur séparé, opposé à l'industrie, mais au contraire de renforcer les liens entre l'une et l'autre, de créer des entreprises industrielles qui fussent les motrices du développement de l'agriculture (en donnant, par exemple, à une série d'usines traitant les betteraves la responsabilité d'un certain nombre de sovkhozes producteurs de betteraves, l'industrie betteravière fixant la surface à cultiver, la distance par rapport à l'usine et traitant les ~ sous-produits destinés au bétail). C'est une tendance qui se manifeste dans les agricultures les plus modernes, comme la suédoise et l'américaine, et il est possible que les Soviétiques aient été intéressés par ces formules, en particulier pour remédier à l'insuffisance de la production de viande en développant l'élevage de la volaille. Quels sont les changements les plus sensibles de cet ordre depuis l'arrivée au pouvoir de Brejnev et de Kossyguine ? Tout d'abord, on a décidé d'augmenter sensiblement les investissements (le rythme annuel des dépenses dans l'agriculture sera de 14 milliards de roubles d'ici à 1970, soit le double de ce qui avait été prévu par le plan septennal 1959-65); en termes concrets, cela signifie que la production des tracteurs va doubler dans les prochaines années et que les livraisons de moissonneuses, de batteuses et de camions vont augmenter également 4 • On a révisé les prix agricoles 5 , pour tenir compte de l'évolution des coûts. Nous avons vu précédemment que, dans le domaine de l'élevage, ces derniers avaient pris une avance sur les prix, ce qui rendait l'élevage défici3. Le plénum de 1962 est caractéristique à cet égard. En mars de cette année, en inaugurant le plénum agricole, Khrouchtchev avait préconisé des investissements massifs dans l'agriculture. La surprise lut grande de constater qu'à la fin du plénum son discours de clôture ne faisait plus allusion à ces investissemenb accrus; il semble qu'il y ait eu pendant Je plénum une discussion très serrée et que les partisans de l'accroi11&ement des investissements dans l'agriculture aient d0 s'incliner devant d'autres priorités. (Entre le début et la fin du plénum agricole de 1962 se place la reprise des expériences nucléaires aux Etats-Unis, ce qui permit au clan des mllltaires, désireux de voir accroitre let crédits qui leur sont alloués, de gagner la partie.) 4. Let llvralsont de camion• doivent passer de 443.000 (1959-64) à 1.100.000 (1966-70). 5. Lei hau11e1 varient d'une région à l'autre (de 7 à 60 % pour Je telgle, 36 % pour le riz, 14 % pour la viande de bœuf en plu• de la hau11e de 41,9 % de 1942). On a rétabli let primea tur Jeallvrallona tupplémentairea. Biblioteca Gino Bianco 217 taire ; en 1965, on a sensiblement relevé le prix des céréales, de la viande et du lait (ceci a une portée sociale, car le lait concerne directement le secteur privé). Les mesures restrictives concernant le secteur privé ont été abolies. Le changement de politique est radical puisque les ouvriers et les employés des villes qui, depuis 1956, ne pouvaient plus légalement posséder de bétail, vont pouvoir obtenir des crédits pour reconstituer l "'1 ~r cheptel (en 1944, une mesure similaire avaii: été prise pour favoriser l'essor de l'élevage après la guerre). Toutes les restrictions conctrnant le fonctionnement des marchés kolkhoziens ont également été abolies. Enfm on a révisé très sensiblement les directives de Khrouchtchev sur les principaux points déjà énumérés : regroupement des kolkhozes, modifications des systèmes de culture, réforme de l'administration de l'agriculture. En ce qui concerne la première question, le rapport de Brejnev précise qu'il faudra diviser les kolkhozes beaucoup trop vastes dans les régions où cela sera jugé utile et qu'il faut s'en remettre aux autorités locales pour éviter des mesures générales ou précipitées. En cc qui concerne la campagne du maïs, le changement est très net : cette culture recule (20 millions d'hectares seulement au lieu de 35) et la politique antiherbagère est abandonnée ; désormais, autorités locales et agronome~ pourront fixer à leur guise le système fourrager le mieux adapté aux conditions locales. Pour ce qui est de l'administration de l'agriculture, on ne peut pas dire que le Parti ait diminué son emprise : la dernière partie= du rapport de Brejnev est un appel au Patti pour lui confier un rôle directeur dans toutes les nouvelles mesures prises ; toutefois, le ministère de l'Agriculture a été rétabli dans ses attributions. Quelles sont les perspectives et comment peut-on envisager l'avenir ? Les mesures prises seront-elles suffisantes ? L'agriculture soviétique va-t-elle se débarrasser de tous ses maux chroniques ? La première constatation que l'on peut faire est que, jusqu'à présent, on n'a pas révisé officiellement les objectifs ambitieux fixés par le XXIP Congrès pour 1970 et 1980 et basés sur un accroissement de la production agricole annuelle d'environ 10 % , ce qui est irréalisable. Il faut donc être réservé sur les chances de réalisation des plans à long ,
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