._ 192 elle se recommande expressément du socialisme suédois. Si la fin de tout socialisme est le progrès économique et la justice sociale, les moyens actuels peuvent différer complètement de ceux qui étaient préconisés au XIXe siècle : la socialisation des moyens de production, : laquelle suppose dans son principe l'autogestion, ne peut être appliquée intégralement pour des raisons de compétence ; seule une trânsformation de l'enseignement et le progrès social pourront changer l'état de choses existant. Cela rejoint un propos que nous avons entendu de la bouche de M. Marc Paillet, secrétaire de la Fédération démocrate et socialiste : la « démocratie économique est encore à inventer ». Le « socialisme moderne » se définit comme un dépassement de l'actuelle ·« société de consommation » dont le modèle est américain. I1 se résume en trois propositions : Qu'en premier lieu la doctrine cesse d'être un alibi et retrouve, avec les grands principes qui la fondent, sa fonction d'inspiratrice de l'action. Qu'ensuite une action quotidienne cherche de mille façons à redresser les défauts présents de la société. Qu'enfin, une politique à plus large visée s'efforce par des voies plus conscientes et plus démocratiques de faire progresser les rapports sociaux et d'élever les aspirations de l'homme (p. 135, souligné par l'auteur). Remarquons que ces principes - initiative, solidarité, liberté, universalité - appartiennent au fonds commun du socialisme français du XIXe siècle ; mais il est évident que leur impact politique et social est différent : l'homme actuel est menacé de servitudes qui ne sont plus les mêmes qu'au siècle dernier. Quant aux méthodes pour « améliorer quotidiennement et simultanément l'homme et la société » (p. 61.), elles nous rappellent celles de la Fabian Society et du socialisme anglo-saxon. Elles sont l'antithèse du blanquisme français et du bolchévisme russe. Par ailleurs, on lit page 57 BibliotecaGino Bianco LE CONTRAT SOCIAL Par socialisme, on entend ici une conception globale de l'homme et du monde, qui vise à substituer, dans l'organisation et le fonctionnement de la société, le · principe d'une solidarité consciente aux ressorts traditionnels de la domination et de l'intérêt personnel. Définition qui a été reprise par M. Marc Paillet dans son rapport à la Convention des institutions républicaines (12 mars 1966). Le thème le plus actuel de l'ouvrage est le refus d'élaborer une structure socialiste à l'échelle de la France seule : « Le socialisme considère comme éminemment conservatrice et antisolidariste la notion d'indépendance nationale » (p. 60, souligné par l'auteur). Il s'agit donc d'une société ouverte, dont les institutions seraient capables de s'adapter à de plus vastes constellations politiques, la première par ordre d'urgence étant l'Europe occidentale. Cela exclut toute forme spécifiquement nationale, toute société économiquement et politiquement refermée sur elle-même et qui serait la conséquence d'un socialisme scolastique pris à la lettre. Cela limite aussi les possibilités actuelles · de toute planification, plus apte, jusqu'à présent, à ériger des règles à la politique de grandeur nationale qu'à corriger ou régulariser les insuffisances des entreprises capitalistes. Nulle part ailleurs qu'en Europe l'humanisation de. l'homme, cette fin ultime de l'esprit socialiste, ne peut trouver une approche plus favorable ; il ne dépend que de l'Europe de retrouver une influence mondiale qu'elle a perdue par ses fautes. Aujourd'hui, tout le monde invoque, sans .beaucoup de précision, un socialisme-moderne. En dépit de qÜelques réserves, le petit ouvrage du club Jean Moulin a le mérite d'en indiquer certaines voies indispensables, en dehors de tout dogmatisme sclérosant et anachronique. MICHEL COLLINET. 0 ,
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