E. DEL/MARS tion signifiait une recrudescence de l'activité des terroristes, espions et saboteurs dont le Trust devait prévenir les méfaits. Il était convenu ·entre I-Iolmsen et Iakouchev que le Trust devait être prévenu de chaque départ. Or le Guépéou venait de capturer un certain colonel Joukovski, passé en Russie à l'insu du Trust. Son arrestation provoqua une violente protestation de Iakouchev auprès de Holmsen. Le Trust tenait à ce que les émissaires passent obligatoirement par la « fenêtre » établie par lui sur la frontière polonaise. D'autre part, les divers services de renseignements, ceux de jeunes Etats limitrophes et ceux des Alliés, installés sur les territoires desdits Etats, envoyaient pour leur propre compte des espions et saboteurs en Russie soviétique. Le Guépéou devait pouvoir surveiller leurs émissaires et l'activité de leurs diplomates à Moscou. C'est encore Roman Birk qui avait procuré au Trust son premier contact avec les Polonais, très friands d'espionnage. Le capitaine Drimler, attaché à l'ambassade de Pologne à Reval, ayant entendu parler du Trust, demanda à Birk de le mettre en rapport avec cette puissante et mystérieuse organisation. Le Deuxième Bureau polonais voulait installer sur la frontière polono-russe une filière semblable à celle qui fonctionnait déjà entre l'Estonie et la Russie. Averti par Birk, le Guépéou avait chargé Iakouchev de prendre contact avec le colonel Werner, attaché militaire de Pologne à Moscou. En octobre 1923, Iakouchev et Potapov · arrivèrent à. Varsovie, après avoir passé sans encombre par la nouvelle « fenêtre ». Reçus à bras ouverts par le colonel Bayer, chargé par l'état-major de mener les pourparlers, ils étudièrent avec lui les principaux problèmes qui intéressaient les Polonais et le Trust. En contrepartie de la reconnaissance par le Trust, au nom du futur gouvernement russe, de l'indépendance de la Pologne, les Polonais s'engageaient à ne soutenir ni Petlioura et ses autonomistes ukrainiens, ni Savinkov et son « Union pour la défense de la patrie et de la liberté », à s'opposer à un retour en masse des émigrés blancs en Russie et à reconnaître en la direction du Trust le seul candidat légitime au futur gouvernement de la Russie. Le 30 octobre, au dîner offert par l'état-major polonais à Iakouchev et Potapov, le colonel Talikowski les prévint amicalement que, pour le moment, la signature d'un accord avec le gouvernement polonais de Grabski était inopportune, car ce gouvernement allait être renBiblioteca Gino Bianco 151 versé par Pilsudski. Néanmoins, on était convenu d'établir une liaison permanente par la « fenêtre » déjà utilisée, d'ouvrir une seconde « fenêtre » et d'installer dans les forêts polonaises frontalières de petits détachements de la R.O.V.S. comprenant chacun quinze hommes camouflés en bûcherons. Tout cela fut consigné dans un procès-verbal. Le Guépéou ayant par ailleurs eu la bonne fortune de capturer deux espions polonais, Iakouchev put arracher à Bayer la promesse qu'à l'avenir ce serait le Trust qui convoyerait les agents polonais et dirigerait leur travail en Russie. Après ce brillant succès, Iakouchev rentra à Moscou le 22 novembre 1923, tandis que Potapov se rendait à Paris pour rencontrer les généraux Holmsen et Miller. Accompagné par Klimovitch, Potapov repartit ensuite chez Wrangel, installé en Serbie. Son ancien condisciple à l'Académie militaire tsariste le reçut très amicalement, mais demeura réticent : - Nous ne sommes pas encore prêts à l'action ( ...). Il nous manque un chef capable d'assumer toutes les responsabilités. Les jeunes Romanov ne sont que des nullités. Le grand-duc Nicolas est trop vieux, trop dominé par sa femme et par son entourage. S'il ne prend pas la responsabilité du mouvement, il faudra tout concentrer chez moi (...). A mon avis, il faut commencer par le Caucase, et non par la Pologne. Au Kouban, nous possédons des liaisons solides. Il fut néanmoins convenu que Klimovitch assurerait la liaison de Wrangel avec le Trust, lequel serait averti chaque fois qu'un officier partirait pour la Russie. Malgré tout, on sentait que Wrangel n'était pas totalement convaincu : bien qu'ayant grande envie de croire son ancien camarade, il oscillait toujours entre l'avis de Klimovitch, entièrement dévoué au Trust, et celui du sénateur Tchébychev, qui continuait d'affirmer que ce n'était là qu'une mystification montée par le Guépéou. Au moment où Potapov prenait congé, Wrangel lui demanda : - A propos, comment pouvez-vous vous absenter pendant si longtemps de votre poste à l'état-major de l'Armée rouge ? - Pendant que je vous parle, je suis sensé me trouver au Turkestan en mission de longue durée. Termez et Kouchka sont si éloignés, et ma passion pour la chasse est notoire. La durée de ma mission touche à sa fin. Je reviendrai à Moscou toujours par la même « fenêtre ». Le chemin est connu et parfaitement stîr. - Alors, que Dieu vous garde ! (pp. 167-70). •*• L'INTOXICATIONdes services de renseignemen ts étrangers était une tâche importante du Trust. Chargé de réduire au minimum leur
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