362 teur éventuel, il faut s'y arrêter et examiner les solutions que lesdites autorités tentent d'imposer. Le droit soviétique prévoit diverses catégories de propriété privée (qualifiée de « propriété personnelle ») « les gains et les économies, une maison (ou une partie de celle-ci) et les meubles qui vont avec, les objets de ménage, d'usage et de convenance personnels » ( article 25 des Principes du code civil de l'U.R.S.S. et des Républiques fédérées). C'est en tant qu'objet de convenance personnelle qu'un citoyen soviétique a le droit de posséder une automobile. La grande majorité des voitures de tourisme est utilisée à des fins officielles, dans l'économie générale (taxis, etc.), enfin pour l'exportation. Ce qui reste disponible pour l'acheteur en puissance est loin de pouvoir satisfaire la demande. Cela a conduit le gouvernement à recourir à des expédients destinés soit à décourager cette demande, soit à empêcher la pénurie de se traduire par des pratiques intempestives. Pour acheter une voiture, le particulier doit tout d'abord prendre rang sur une liste d'attente. Pour cela, il se fait inscrire au point de vente local chargé d'écouler les voitures, mais avant de figurer sur la liste il est tenu de verser intégralement le prix d'achat de la voiture qu'il désire acheter. Lorsque son tour arrive, il en est averti et peut aller prendre livraison de sa voiture. Vers le milieu de 1962, nous avons visité un de ces points de vente à Moscou. Sur les murs, des pancartes indiquaient que la liste d'attente comptait 93.500 noms pour la Volga et 22.750 pour la Moskvitch 9 • Une autre pancarte annonçait que la liste pour ces deux modèles· avait été close en mars 1956 et qu'aucune demande n'avait été acceptée depuis lors ; ceux qui figuraient sur la liste recevraient leur voiture vers le -milieu de l'année 1963 ou en 1964 et le moment où les inscriptions pourraient reprendre serait annoncé bientôt. Un observateur sur place en ·mai 1963 a affirmé que certaines commandes passées avant mars 1956 n'étaient toujours pas satisfaites. Ainsi, ceux qui avaient pris rang et payé leur future voiture auront dû patienter six ou sept ans avant d'en prendre livraison. Malgré la perspective d'une attente interminable, les listes sont désespérément longues. Pour améliorer la situation, il semble que les 9. Approximativement le même chiffre est donné pour la Volga et 115.000 pour la Moskvitch par A. Goudimov: « J'ai acheté une automobile », in Bk. Gaz., 24 aoüt 1963, p. 40. BjbliotecaGino Bian·co ' L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE . , . , . autorites aient encourage certaines personnes à retirer leur demande. En avril 1963, les prix des nouvelles voitures furent augmentés de 25 à 3 5 % 10 • Le prix de la Moskvitch passa ainsi de 2.500 à 3.400 roubles. Ceux qui ne voulaient pas ou qui ne pouvaient payer 900 roubles de plus avaient la possibilité de renoncer. Une autre méthode consistait à reprendre les listes pour décourager ou écarter ceux « qui avaient l'intention de se rendre acquéreur non pas pour satisfaire leurs désirs matériels ou culturels, mais pour vendre ou céder leurs automobiles à d'autres personnes » 11 • Les commissions sociales ( obchtchestviennye) destinées à surveiller les listes d'attente pour c1npêcher des pratiques malhonnêtes sont probablement responsables en partie de ces révisions. Lesdites commissions, instaurées d'abord dans les années 50, furent relancées au début des années 60. Par suite de ces mesures, au milieu de 1963, tous ceux qui demeuraient sur les listes avaient pu obtenir leur automobile, et les inscriptions sur les nouvelles listes d'attente étaient de nouveau acceptées. En très peu de temps, des centaines de milliers de Moscovites avaient signé 12 • Ce dernier point est au moins significatif à un égard : bon nombre de citoyens soviétiques ont à la fois le vif désir d'acheter une auto et les moyens de le faire. Quiconque est prêt à supporter le délai et les hausses de prix arbitraires est un consommateur vraiment endurci. Autre fait digne d'intérêt, les prix pratiqués aujourd'hui. La vieille Zaporojets à 2.000 roubles, la Moskvitch à 3.400 roubles et la Volga à 5 .500 roubles sont évidemment beaucoup plus chères que les voitures correspondantes en 1 Occident. Un journaliste occidental rapporte · qu'à l'usine qui monte la Moskvitch on ne lui a pas caché que, outre que l'exportation permet d'obtenir des deyises étrangères, la voiture est destinée principalement à éponger le pouvoir d'achat excédentaire de la population soviétique 13 • Il est significatif que les prix des voitures soviétiques exportées doivent être fortement · réduits pour pouvoir concurrencer l'étranger. Il est presque aussi ardu de se procurer une voiture d'occasion que d'en acheter une neuve. Jusqu'au commencement de 1961, une voiture 10. New York Times, 28 mai 1963. 11. A. Stepanova in la Justice soviétique, juillet 1962, p. 24. 12. Goudimov, Zoc. cil. 13. New York Times, 12 janvier 1964.
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