Le Contrat Social - anno IX - n. 5 - set.-ott. 1965

318 Tout en sachant qu'en raison de notre pénurie de cadres, tout diplomate cultivé et expérimenté est particulièrement précieux, vous avez attiré à Moscou et anéanti les uns après les autres presque tous les représentants plénipotentiaires soviétiques. Vous avez détruit de fond en comble le commissariat des Affaires , ' etrangeres. . Anéantissant les élites, la jeune génération, vous avez exterminé à la fleur de l'âge des diplomates dé talent et pleins de promesses. A l'heure où la menace militaire s'accroît, où le fer de lance du fascisme est dirigé contre l'Union soviétique, où la lutte pour Dantzig et la guerre en Chine ne font que préparer une intervention contre l'U.R.S.S., où l'objectif principal de l'agression germano-nippone est notre pays, où la logique d'une lutte conséquente pour la paix exige l'adhésion ouverte de l'Union soviétique au bloc des Etats démocratiques et la conclusion rapide d'une alliance politique et militaire avec l'Angleterre et la France, vous hésitez, vous tergiversez et oscillez. comme un pendule. Dans tous vos calculs de politique intérieure et extérieure, vous agissez en fonction non pas de l'amour de la patrie, lequel vous est étranger, mais d'une peur animale de perdre votre pouvoir personnel. Votre dictature sans principes, tel un tronc pourri, barre la route de notre pays. « Père des peuples », vous avez trahi les révolutionnaires espagnols /vaincus, les abandonnant à leur sort et laissant à d'autres Etats le soin de s'occuper d'eux. Sauver magnanimement des vies humaines n'est pas dans votre caractère. Malheur aux vaincus ! Vous n'avez plus rien à en tirer. Vous avez d'un œil sec voué à la mort les ouvriers, intellectuels, et artisans juifs qui fuyaient la barbarie fasciste en leur fermant les portes de notre pays qui, sur son vaste territoire, peut donner asile à ·des milliers d'émigrants. ,., Comme tous les patriotes soviétiques, j'ai travaillé en fermant les yeux sur bien des choses. Je me suis tu trop longtemps. Il m'était difficile de rompre les derniers liens non pas avec vous et votre régime condamné, mais avec les restes de l'ancien parti de Lénine dans lequel je suis resté près de trente années et que vous avez saccagé en trois ans. Il m'était épouvantablement douloureux d'être privé de mon pays. 0110 eca Gino Bianco r MATÉRIAUX D'HISTOIRE Plùs l'on va, plus les intérêts de votre dictature personnelle s'opposent irréductiblement aux intérêts des ouvriers, des paysans, des intellectuels, aux intérêts du pays tout entier sur lequel vous vous acharnez comme un tyran parvenu .au pouvoir personnel. Votre base sociale se réduit de jour en jour. Cherchant fébrilement des appuis, vous vous répandez en compliments hypocrites à l'égard des « bolchéviks sans-parti », vous créez l'un après l'autre des groupes privilégiés, les comblez de faveurs, les nourrissez d'aumônes, mais vous ne pouvez garantir à ces nouveaux « califes d'une heure », non seulement leurs privilèges, mais même le droit à la vie. Votre folle bacchanale ne saurait se prolonger longtemps. ~ La liste de vos crimes est infinie, comme l'est également celle de vos victimes ! Les énumérer est impossible. Tôt ou tard, le peuple soviétique vous traînera au banc des accusés comme traître au socialisme et à la révolution, comme le principal saboteur, le véritable ennemi du peuple, l'organisateur de la famine et des procès fabri- , ques. 17 août 1939. F. RASKOLNIKOV. Comment on a fait de,;moi un « ennemi du peuple >~ LE 17 JUILLET, la Cour suprême de !'U.R.S.S. m'a condamné par contumace à I? peine capitale - et mis hors la loi. J'ignore sur quels faits précis est basé le verdict du tribunal qui aurait prétendument établi que j'ai « déserté mon poste, rejoint le camp des ennemis du peuple et refusé de rentrer en U.R.S.S. ». Personne ne m'a interrogé ni demandé d'e~plications sur les accusations portées contre moi. , Je déclare, afin que nul ne l'ignore, que le verdict rendu dans mon procès est fondé sur une fausse inculpation. Je ne me reconnais coupable d'aucun des chefs d'accusation relevés contre moi. On m'accuse d'avoir déserté mon poste. Cela est contredit chronologiquement par les faits.

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