Le Contrat Social - anno IX - n. 5 - set.-ott. 1965

302 ·sures concrètes étaient prises pour donner naissance à une nouvelle génération d'avocats « vraiment soviétiques » 13 • Nombreux furent, parmi les plus éminents, les juristes qui participèrent aux controverses au sujet de ce que devait être ce rôle de l'avocat soviétique. André Vychinski, procureur général sous Staline, doit être considéré comme le principal théoricien de la fonction de l'avocat dans le système juridique de !'U.R.S.S. Dans La Jurisprudence soviétique et les tâches des avocats soviétiques, ouvrage publié en 1934, il incitait les avocats à ne pas perdre de vue que ce qui transpire dans l'enceinte du tribunal est étroitement lié aux courants socio-politiques du dehors, en même temps que cela engendre une force politique fort précise. Tout particulièrement notable fut son adresse au congrès des membres du collège des avocats, à Moscou, en 1936 u, dans laquelle il souligna l'importance de la défense dans les procès et le caractère spécial de la fonction de l'avocat dans les affaires pénales. Un tribunal, dit-il, ne peut considérer une affaire du seul point de vue de l'accusation. Le rôle du procureur est de veiller à l'application de la loi; d'autre part, le défenseur, quoique tenu d'observer la loi, a pour fonction essentielle de prêter assistance à l'accusé, ce qui est particulièrement nécessaire dans les affaires criminelles complexes. Mais, ajoutait Vychinski, l'avocat n'a pas pour seule fonction de défendre l'accusé, de même que le procureur n'apparaît pas au tribunal à seule fin de soutenir l'accusation : l'un et l'autre sont « parties » au procès, et leur tâche commune consiste à faire toute la lumière sur les faits. Vychinski partait ainsi du principe suivant lequel l'Etat n'est intéressé qu'à la condamnation du coupable. Selon lui, dans un procès, le tribunal avait pour tâche de révéler la vérité positive. De ce point de vue, le rôle de la défense n'était pas moins important que celui de l'accusation : l'avocat était, en fait, considéré comme un « auxiliaire » du tribunal. En août 1939, une nouvelle « loi concernant le barreau » (polojénié ob advokatouré) redéfinissait le statut des collèges d'avocats. Cette loi demeura en vigueur jusqu'au 25 juillet 1962, date à laquelle de nouveaux règlements furent édictés pour la R.S.F.S.R. 15 • Ceux-ci, d'ailleurs, ne différaient que sur des points de détail des dispositions, de 1939 et ne changeaient en rien la structure et les obligations des collèges. 13. Tcheltsov : op. cit., p. 109. 14. Cf. le texte in la Légalité socialiste, n° 10, 1936, pp. 9 sqq. 15. Nouvelles du Soviet suprême de la R.S.F.S.R., n° 29, 1962, art. 450. Biblioteca Gino Bianco , L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE Chaque district ( oblast) avait son propre collège d'âvocats. Selon le régime de 1962, les collèges ont le droit de fournir l'assistance judiciaire non seulement aux citoyens privés, mais également aux entreprises et organisations d'Etat. Leur activité principale reste cependant de venir en aide au public au moyen de consultations (conseils, renseignements, explications, etc.); de préparer des pétitions, des plaintes et autres documents légaux réclamés par des citoyens; de défendre les accusés dans les procès criminels ; de représenter les plaideurs dans les affaires au civil. Les collèges fournissaient ces services par l'intermédiaire de centres de consultations juridiques établis au siège des « rayons » et dans les villes. Tel citoyen en quête d'une assistance judiciaire s'adresse à l'un de ces centres où on lui assigne un avocat moyennant le versement d'honoraires fixés par un barème. Dans certains cas, si le chef du centre y consent, le client peut obtenir l'avocat de son choix. L'avocat reçoit son indemnité non pas du client mais du centre. Sa part équivaut à quelque 70 % des honoraires exigés, le reste couvrant les frais du centre 16 • Les collèges sont considérés comme des « organisations sociales » et des associations « volontaires » de personnes qui s'adonnent à un travail. juridique et ils jouent en quelque sorte le tôle des sociétés professionnelles d'avocats. Leur organîsation, leur direction et leur activité sont surveillées par les comités exécutifs des soviets d'oblast et en dernier ressort par les organes qualifiés des Républiques fédérées 17 • · Les règlements concernant le barreau actuellement en vigueur stipulent qu'en général il faut avoir terminé ses études de droit à l'université et, en outre, avoir deux ans de pratique dans quelque administration judiciaire pour être autorisé à exercer le métier d'avocat. Les collèges _peuvent cependant accepter la candidature de personnes qui, tout en ayant la formation exigée, n'ont pas deux ans de pratique; ces personnes doivent travailler en qualité de stagiaires au moins six mois avant d'être admises comme membres titulaires. Dans des cas exceptionnels, des personnes sans formation juridique peuvent être admises, à condition qu'elles puissent se prévaloir de cinq années de pratique dans des organes j1,1dicairesd'Etat; leur admission doit cependant être approuvée par le '?omité exécutif de l'oblast. 16. D. S. Karev : Sowjetische Justlz, Berlin-Est, 1951, pp. 129-30. t 7. Auparavant, le dernier mot appartenait au ministère do la Justice des Républiques fédérées; aujourd'hui, il appartient soit au Conseil des ministres des Républiques fédérées, soit, comme en R.S.F.S.R., à la commission législative du Conseil des ministres.

RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==