,. L'AFFAIRE KIROV par Hugo Dewar L E TRENTIÈMEANNIVERSAIRdEe la mort de Serge Kirov, grand dirigeant bolchévik et membre du Politburo, assassiné le 1er décembre 1934, a passé sans qu'il fût question de l' « enquête approfondie » promise par Khrouchtchev sur cet événement qui marqua le début des grandes épurations staliniennes. Certes, la Pravda inséra un article commémoratif, et une biographie de Kirov par S. V. Krasnikov fut publiée en 1964. Aucune des deux proses n'apportait cependant le moindre élément nouveau permettant de voir plus clair dans cette mystérieuse affaire. Dans son discours « secret » au xxe Congrès du Parti, en 1956, Khrouchtchev avait annoncé que les dirigeants n'étaient pas satisfaits de la version officielle : « Il faut dire que, aujourd'hui encore, les circonstances entourant le meurtre de Kirov cachent bien des choses inexplicables et mystérieuses et exigent l'examen le plus sérieux. » Il y a quelque raison de croire, ajoutait-il, que le meurtrier de Kirov, Nikolaïev, a été « aidé par l'un de ceux dont la mission était de protéger la personne de Kirov ». Il donnait alors quelques détails : Un mois et demi avant le meurtre, Nikolaïev avait été arrêté en raison de son attitude suspecte, mais il avait été libéré sans même avoir été inquiété. Le fait que le tchékiste chargé de la protection de Kirov, qui devait être interrogé le 2 décembre 1934, ait été tué dans un «accident» d'automobile où les autres occupants de la voiture n'ont pas été blessés, constitue une circonstance extraordinairement suspecte. Après l'assassinat de Kirov, de très légères peines ont été prononcées contre de hauts fonctionnaires du N.K.V.D. de Uningrad, mais ils ont été fusillés en 1937. On peut supposer qu'ils ont été fusillés afin de faire disparaître les pistes qui auraient conduit aux organisateurs de l'assassinat de Kirov. En 1961, quelque cinq années après les premières révélations de Khrouchtchev, le grand public soviétique entendit parler del' « affaire» Biblioteca Gino Bianco Kirov au cours de l'attaque du premier secrétaire contre le « groupe antiparti » pendant le XXIP Congrès. Molotov, Kaganovitch, Malenkov, Vorochilov et consorts, affirma-t-il, avaient « violemment » résisté à la décision du xxe Congrès de lancer la campagne de déstalinisation, et ils avaient continué à résister après coup, de crainte que « leur rôle de complices dans les répressions de masse » ne soit révélé : Les répressions massives commencèrent après l'assassinat de Kirov. De grands efforts sont encore nécessaires pour connaître les vrais responsables de sa mort. Plus nous étudions les documents sur cette affaire, plus nombreuses sont les questions qui surgissent (...). On procède actuellement à une étude minutieuse des circonstances de cette affaire compliquée (Discours du 27 oct. 1961). Au XXIIe Congrès, d'autres orateurs affirmèrent ensuite que Nikolaïev avait effectivement été arrêté par deux fois avant le crime, qu\On avait trouvé des armes sur lui, mais qu'il avait été néanmoins relâché. Le garde du corps de Kirov aurait été tué alors qu'on l'emmenait pour l'interroger chez Staline, Molotov et Vorochilov. On ne « supposait » plus, mais on présentait comme un fait que des fonctionnaires du N.K.V.D. avaient été fusillés afin de faire disparaître les traces des individus impliqués dans l'assassinat. SI r.'oN EXAMINEles preuves produites au procès de Moscou de mars 1938, on s'aperçoit que l'essentiel des « révélations » de Khrouchtchev avait été depuis longtemps versé au dossier. Les témoignages révélaient leur double objectif : renforcer les charges antérieures contre les « trotskistes et zinoviévistes » et, du même coup, « épurer les épurateurs ». Cependant, en laissant de côté l'habillage, certains ,
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