Le Contrat Social - anno IX - n. 3 - mag.-giu. 1965

Débats et reclaerclaes LES DÉBUTS DU MACHINISME DEVANT LES CONTEMPORAINS (1760-1840) par Michel Collinet LA DIVISION DU TRAVAIL a toujours existé et il n'est pas concevable qu'aucune société puisse s'en passer. Mais, avec le développement du capitalisme commercial, elle a pris des formes spécifiques inconnues dans la société médiévale européenne. A côté des jurandes ou de l'artisanat libre, des manufactures se sont créées au début des temps modernes, avant tout progrès dans l'utilisation des forces motrices. Fondées sur le principe de la fragmentation des tâches en de nombreuses mains, elles ont contribué à la disparition de fait, devenue légale, des anciennes corporations ; elles ont refoulé l' artisanat dans des branches industrielles où l'homme pouvait encore imprimer à son œuvre la marque de sa personnalité. A la fin du XVI/Je siècle, les machines mues par des forces mécaniques ont, à leur tour, limité le développement des manufactures et changé les /ormes de la division du travail, sans modifier sensiblement les relations entre le capital et le travail salarié. Machinisme et division du travail sont apparus sous deux aspects contradictoires : d'une part, source du progrès matériel de la société, d'autre part, ruine de nombreux producteurs, mt'sère des salanës. De cet état de choses, des appréciations divergentes, quelques-unescatégoriques,d'autres ambiguls, n'ont cesséd'être f nrmulées depuis le XVI//e siècle. Biblioteca Gino Bianco La division du travail a eu ses dé/enseurs et ses détracteurs, sans qu'objectivement on puisse démentir lesunspar lesautres. D'AdamFerguson à P.-J.Proudhon, marquant similitudes ou différences, nous avons-interrogé quelques penseurs qui tous furent placés devant un phénomène dont ils saisissaient l'importance sans toute/o·z"sle dominer pleinement. Ils eurent conscience qu'une société millénaire disparaissait pour faire place à une autre, aux contours difficiles à cerner, et dont la durée était d'autant plus imprévisible que, par des mutations successives, généralement décelées après coup, elle s'ouvrai't sur un avenir où les uns voyaient des catastrophes apocalyptiques, les autres un âge d'or retrouvé pour toujours. La révolution industrielle est, à nos yeux, la seule qui soit permanente; elle réalise cet état de mouvement que les coperniciensavaient déclaré être aussi naturel que l'état de repos. C'est la raison pour laquelle les analyses les plus remarquables, comme celle de Marx, sont en fin de compte si peu exhaustives, en dépit de leurs prétentions à saisir l'ensemble du phénomène et à en prévoir les conséquences logiques. Néanmoins, nombreuses detneurent les vérités partielles énoncées depuis deux siècles ; quelques-unes, parmi les plus importantes, sont encore actuelles. Nous les retrouverons ici à leur place, avec les divers auteurs brièvement étudiés.

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