rev11e historÎtJUe et critique Je1 /ait1 et Jes iJées Mai-Juin 1965 Vol. IX, N° 3 LA GUERRE IMPOSSIBLE par B. Souvarine DEPUISQUESTALINEd, ès 1925, a parlé de cohabitation pacifique, puis de coexistence pacifique, pour définir la politique extérieure du régime soviétique, héritée de Lénine, cette politique n'a jamais varié quant à l'essentiel, même sous le nom occidental de guerre froide, avec des aspects changeants que commandent les changeantes circonstances. De Staline en Khrouchtchev et en Brejnev, elle consiste à entretenir dans et contre le monde non communiste des hostilités incessantes sous toutes les formes possibles, « jusqu'au bûcher exclusivement», c'est-à-dire jusques et non compris une guerre générale. Maintes fois la démonstration de cette vérité a été faite, contradictoirement aux conceptions admises dans les cercles dirigeants, les milieux officiels, les sphères supérieures de la société en Occident, admises de même inévitablement par l'opinion publique moutonnière sous l'influence de la presse écrite et orale. La hantise d'une troisième guerre mondiale pèse depuis vingt ans sur l'attitude des nations occidentales vis-à-vis de l'ennemi communiste, incitant à des préparatifs exclusivement militaires, alors que les initiatives incendiaires de Moscou et de Pékin, celles aussi de leurs satellites, s'exercent dans toutes les directions sans exposer les responsables de cette activité pernicieuse et multiforme à des représailles décisives. Mais autant les préparatifs militaires atlantiques se justifient par les mobilisations et les armements formidables du militarisme pseudocommuniste, autant apparaît inconcevable l'inertie obstinée dont les démocraties inconscientes font preuve devant l'impérialisme idéologique du despotisme oriental qui gagne du terrain en Asie, en Afrique et en Amérique latine par ses procédés Biblioteca Gino Bianco trop connus d'infiltration, de corruption, de subversion, partout fomentant des troubles, ici des maquis, là des émeutes, et déjà des guerres locale~. Une telle inertie intellectuelle et politique ne s'expliquait jusqu'à présent que par la prévision obsessionnelle d'un conflit guerrier éclipsant les luttes politico-psychologiques menées sans trêve à sens unique, télécommandées de Moscou et de Pékin, du Caire et de La Havane, qui sapent et minent l'ordre relatif et précaire que les vainqueurs du totalitarisme avoué s'efforcent en vain d'améliorer et d'affermir. Les « avertissements » répétés, les « mises en garde » de Khrouchtchev et de Mao, leurs sommations, leurs menaces constantes d'intervention armée sous-entendant un risq~ de troisième guerre mondiale ont été inconsidérément pris au sérieux à Washington, à Paris et à Londres et ailleurs. La presse irresponsable qui abêtit ses lecteurs pour vendre du papier n'a cessé d'entretenir la peur d'une guerre atomique et la mentalité de soumission au chantage communiste. Cependant depuis vingt ans les avertissements comminatoires alternent avec les mises en garde furibondes, les menaces succèdent aux sommations, et il ne se passe rien qui ressemble au cataclysme final. Ce ne sont que discours, ce ne sont que paroles. La tournure des événements au Vietnam au cours des derniers mois devrait dissiper une fois pour toutes les idées fausses qui ont stérilisé trop longtemps la politique strictement défensive opposée aux entreprises conquérantes des Etats prétendus communistes. Les Américains, seuls capables de tenir en échec l'invasion qui pénètre la péninsule indochinoise et met en danger l'Asie du Sud-Est jusqu'aux confins de l'Inde, se sont décidés très tard à recourir aux ,
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