Le Contrat Social - anno IX - n. 2 - mar.-apr. 1965

AUTOUR DU ''TESTAMENT Il DE LÉNINE par M~x Eastman Sous le titre Amour et Révolution, et le sous-titre Mon voyage à travers une époque, Max Eastman a publié récemment ses souvenirs d'une vie riche d'impressions, de péripéties et d'expériences sur le triple plan personnel, artistique et politique (Random House, 665 pages, New York 1964). Avec sa permission, nous en extrayons, traduisons et reproduisons un chapitre, celui qui a trait au « Testament » de Lénine, document essentiel dans l'histoire de la tragédie du bolchévisme et que Max Eastman en 1926 avait révélé au grand public en le publiant dans le New York Times et dans le New York Herald. Nous n'en retranchons que quelques lignes relatives aux affaires privées .. Max Eastman est sans doute la figure la plus originale de l'avant-garde intellectuelle aux Etats-Unis. Envers et contre les tabous traditionnels, il avait pris fait et cause polir le socialisme et milité aux côtés• de la classe ouvrière militante dans les années précédant la guerre de 1914. La logique de ce comportement devait le conduire en Russie soviétique où ses sympathies pour le bolchévisme furent mises à dure épreuve quand, après la mort de Lénine, les luttes intestines du parti communiste révélèrent l'agonie de la révolution et l'avènement durable d'une nouvelle oligarchie décidée à perpétuer une exploitation de l'homme par l'homme plus cruelle qu'en aucun pays capitaliste moderne. Max Eastman fut alors le premier dans l'avant-garde intellectuelle qui eut le courage, selon l'expression de Jaurès, « de chercher la vérité et de la dire», il fut le premier des révisionnistes authentiques, au meilleur sens du terme, qui surent remettre en question les idées d'une époque révolue et affronter sans faiblir l'incompréhension de leurs concitoyens abusés par la propagande du communisme irrémédiablement perverti sous Staline. Fils de père et mère ministres du culte protestant, il avait fait ses études supérieures à Columbia University, en disciple du philosophe et éducateur John Dewey, et il y devint professeur tout en s'adonnant à la poésie. Il n'était pas âgé de trente ans quand parut son premier livre, Enjoyment of Poetry (1913), ouvrage encore classique sur l'esthétique poétique. En même temps, il se faisait connaître comme le plus brillant des écrivains 1< radicaux » et bientôt fut choisi comme directeur des Masses, publication socialiste littéraire et artistique à laquelle il donna une impulsion de plus en plus subversive, gagnant l'élite de la gauche intellectuelle de ce temps. La revue fut interdite en 1917 par les autorités en raison de son opposition à la guerre et Max Eastman, deux fois traduit en justice, mais exonéré de poursuites quand la guerre prit fin, créa The Liberator pour rem- /placer The Masses. Il ne quitta la direction de ce « magazine »en 1922 que pour se rendre en Russie soviétique où il passa deux années, apprit le russe, entra en relation avec les principaux leaders politiques, notamment avec Trotski, et épousa Eliena Krylenko, secrétaire de Litvinov et sœur du trop fameux procureur général Nicolas Krylenko qui devait partager le sort de ses victimes quand Staline Biblioteca Gino Bianco entreprit d'exterminer la 1< vieille garde » bolchévique. Témoin des circonstances qui imprimèrent au régime soviétique le tournant fatal, Max Eastman vint en 1924 se fixer en France et il y vécut jusqu'en 1927, y écrivit entre autres le petit livre Depuis la mort de Lénine (1925) qui déchaîna la tempête dont les échos se prolongent dans le chapitre « World-wide disgrace » de son dernier livre, ci-après reproduit. De retour aux Etats-Unis, il a déployé une grande activité d'écrivain, d'essayiste, de publiciste, d'orateur non conformiste, sans cesser d'être poète. Mentionnons, parmi ces œuvres variées, le roman Venture (1927), traduit en français sous le titre L' Apprenti révolutionnaire (Ed. Gallimard) ; The Literary Mind (1932) ; Art and the Life of Action (1934); The Sense of Humour, Enjoyment of Living (1948), Enjoyment of Poetry (1951), Enjoyment of Laughter (1952), publié en français comme Plaisir du rire (Paris, Société d'édition d'enseignement supérieur, 1958) ; Journalism versus Art, Heroes 1 Have Known (1942), recueil de portraits où figurent les personnages illustres que Max Eastman a fréquentés, entre autres Sigmund Freud, Charlie Chaplin, John Reed, Léon Trotski, Eugene Debs, Isadora Duncan. Ce recueil ne fait pas double emploi avec Great Companions, a Critical Memoir of somefamous Friends (1959), où figurent Einstein, Hemingway, Santayana, Pablo Casals, Bertrand Russell, John Dewey. L'essentiel de l'œuvre poétique est rassemblé dans les cinq volumes suivants : Child of the Amazons and other Poems ; Colors of Lif e ; Kinds of Love ; Lot' s Wif e (1942) ; Poems of Five Decades (1954). A quoi mérite d'être jointe une Anthology for the 1< Enjoyment of Poetry » (195_1), largement en usage dans les universités américaines. Sur le socialisme, le marxisme, la révolution russe, Max Eastman a écrit, outre Since Lenin died (1925), en français sous le titre Depufs la mort de Lénine (Ed. Gallimard), une esquisse biographique : Leon Trotsky, the Portrait of a Y outh, en français : La Jeunesse de Trotsky (Ed. Gallimard, 1929); Artists in Uniform (1934); The End of Socialism in Russia (1937); Marxism is it Science? (1940); Stalin's Russia and the Crisis of Socialism (1940); Marx and Lenin, the Science of Revolution (1926); Reflections on the Failure of Socialism (1955)t On a La Scaencede la Révolution en français (Ed. Gallimard, 1928). Mentionnons encore de Max Eastman ses traductions du russe : Gabriel, de Pouchkine; The Real Situation in Russia, de L. Trotski ; The History of the Russian Revolution et The Revolution betrayed, du même. En outre, son anthologie du Capital de Karl Marx. Dans notre r~vue, n° de janvier 1960, on a réimprimé une lettre d'Ivan Pavlov à Max Eastman, dans laquelle le grand savant russe s'exprime sans détour sur le bolchévisme. Dans Preuves, n° de novembre 1955, on peut lire « L'itinéraire New York-Moscou et retour», traduction française de l'introduction biographique du livre Reflections on the Failure of Socialism;

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