40 · indétermination et il les supprime. C'est pourquoi., pendant la Révolution., le peuple a détruit une fois de plus le~ institutions qu'il avait créées lui-même., puisque n'rmporte quelle institution est contraire à l'autoconscience abstraite de l'égalit.é (§ 5., add.). PLUSENCORqEue les citations, le rapprochement et l'explication des textes nous confirment dans notre opinion. Il y a certaine naïveté à croire qu'annoncer et louer la Révolution à ses débuts signifie en approuver le cours. La prise de la Bastille est un acte qui symbolise la chute de l'Ancien Régime, non pas la venue du nouveau. De nos jours, combien ont salué la révolution de Février et même la révolution d'Octobre en Russie et ~ontinue,nt de les justifier (la première pour avo~ a~ene la chute du tsarisme, la seconde pour avoir rms un terme à la première guerre mondiale s~ le front oriental), qui ont en horreur la direct1on,que la !éyolution a prise par la suite... Chaque annee, le 4 Juillet, les Filles de la révolution américaine et la John Birch Society ne célèbrent-elles pas elles-mêmes avec une grande ferveur les événements de 1776 ? A aucun moment Hegel n'a plaidé en faveur de l'Ancien Régime, mais à parur du moment où il fut évident dans n'impo~e quel pays que les intendants de l'évolution socialene devaient être ni des bureaucrates ni des fonctionnaires, mais les tribuns du peuple, censément responsables devant ce dernier et non deyant un autocrate ou un monarque, il devint mefiant envers le cours pris par les événements. Il alla jusqu'à trembler devant les vagues révolutionnaires, pourtant modestes, de 1830. Les spé~ialist~squi s'efforcent de rendre le personnage moll?-snoir passe.nt tous sous silence le fait qu'il reI?rtt aux ~mpruneurs la préface de sa Philosophie du Droit afin d'y ajouter une dénonciation de J. F.. Fries, philosophe néo-kantien qui avait des ennws avec la police pour avoir participé au fameux banquet de la Wartburg 2 • Là comme ailleurs, l'attaque de Hegel était dirigée non pas contre la Sainte-Alliance, mais contre les adversaires de celle-ci. Herbert Marcuse soutient que la Bursch~~af t et autres ~ssociations dénoncées par Hegel etaient proto-nazies; cela n'est pas raisonnable. S'il faut considérer comme nazis ou comme « ne valant pas mieux que les nazis » tous ceux 9ui ont ~xprimé des sen~ents antisémitiques, il faudrait compter parmi les précurseurs de Hitler non seulement Voltaire, mais Marx en personne. * 'JI- 'JIPEUT-tTREceux qui voient en Hegel un prophète du libéralisme emploient-ils le terme « libéralisme» dans un sens atténué. Il est erroné d'admettre, comme le fait Russell, que le libéralis2. Banquet organisé le 18 octobre 1817 pour commémorer à la fois la victoire de Leipzig et le tricentenaire de Luther. - N.d.l.R. Biblioteca Gino Bianco • DÉBATS ET RECHERCHES me est nécessairement marié à l'empirisme ou vice versa. Socialement parlant, les rapports entre les deux notions sont moins que logiques et plus que simplement psychologiques. Un penseur peut défendre une position libérale en se fondant sur une métaphysique idéaliste (et même théologique) au sens où les raisons qui lui servent de justification sont exprimées dans l'idiome de son système ou de sa croyance. Mais qu'est-ce qui définit une position libérale en matière sociale et politique ? Aucun trait de caractère, aucun programme précis assurément, qu'il s'agisse de la « libre entreprise » ou bien de la conception qui fait de l'Etat un arbitre neutre entre des groupes sociaux hostiles. Il existe un faisceau de traits de caractère qui définissent le tempérament libéral, dont plusieurs doivent être réunis avant de pouvoir à juste titre classer un penseur comme libéral. Parmi les qualités que l'on attend d'un penseur libéral, il y a la reconnaissance de la primauté morale de l'individu quand il s'agit d'évaluer les institutions, l'acceptation d'un libre ~~rché de~ f dées, la tolé~~c~ à l'égard de l' opposit1on politique, l'appreciat1on de la diversité, l'a~ésion au droit d'autodétermination nationale, sociale et personnelle, y compris le droit moral à l'insurrection si l'aspiration à l'autodétermination est contrecarrée avec persistance. Et puis, soustendant le tout, la confiance dans les méthodes de l'intelligence conçue non pas comme une Raison r~alisant d~s fins dont nous ne sommes pas conscients~mats co~~ le bon ~ens raffermi par une connaissance sc1ent1fiqueadequate. Le libéralisme n'est pas tant une doctrine qu'une attitude envers les affaires politiques ; une attitude qui, tout en tenant compte des limites de l'homme et du caractère incertain du jugement humain, ordonne cependant d'agir avec vigueur dans les moments de crise. Il considère comme blasphématoire d'attribuer la perfection ou la divinité à l'Etat (ce que nous trouvons chez Hegel) ou à toute autre institution humaine. Il suffit de lire quelques pages de n'importe quelle œuvre de Hegel touchant à la culture et à l'histoire pour sentir combien l'auteur est éloigné de la perspective libérale. De sentiment et de · jugement, c'est un conservateur-né. Son système d'idées l'incline en faveur de l'ordre en place. Son tempérament peut-être, plutôt qu'une position de principe, explique le fait que, dans les moments de crise, il était plus porté à être un compagnon de route des réactionnaires (tout en critiquant leurs fautes) qu'un ami des réformateurs sociaux (sauf quand les réformes venaient de ceux qui étaient déjà au pouvoir). Mais une position de principe l'aidait à rationaliser ses timidités ·et ses craintes. * 'JI- "1NÉANMOINSil,est quelque chose que les libéraux d'aujourd'hui peuvent apprendre de Hegel. C'est l'importance des principes de continuité et de polarité pour ne pas tomber dans des positions
RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==