Le Contrat Social - anno VIII - n. 6 - nov.-dic. 1964

B. SOUV ARINE a rien de nouveau pour l'essentiel en politique intérieure ni en politique extérieure soviétiques, encore qu'on doive escompter qu'elles soient mises en œuvre d'une façon désormais moins trépidante, mieux mesurée, plus rationnelle. Quand on fera le bilan de la période Khrouchtchev, les absurdités commiseset les fautes accumuléesétonneront, qu'il eftt été facile d'épargner au malheureux pays soumis à tant d'expériences cruelles et coûteuses. Les successeurs n'auront aucun mal à s'en abstenir après avoir si bien contribué à les imposer. Au Soviet suprême, que les têtes de linotte de la presse occidentale regardent comme un cc parlement »alors que personne n'y est élu et que tout y est décidé d'avance par la direction du Parti, un orateur a été autorisé à déclarer, le 10 décembre: « Le plus grand service que l'on puisse rendre à l'agriculture, c'est de la laisser en paix... »C'est en effetce que tous les observateurs sérieuxn'ont cessé d'écrire au cours des années où Khrouchtchev I • A • perorait sans treve pour enseigner aux paysans tantôt la culture du maïs, tantôt la plantation des pommes de terre. Toutes les réformes prônées par le Secrétaire touche-à-tout ont abouti au désastre agricole de l'an dernier, alors que les travailleurs des villes et des campagnes livrés à eux-mêmes tirent un excellent parti de leurs modestes lopins sans lesquels la population souffrirait d'une demifamine. Les principaux discours de Khrouchtchev en matière agricole tenaient déjà 4.000 pages en huit volumes in-octavo quand le noyau du Comité central a décidé d'y mettre un terme et de parer aux difficultés d'approvisionnement non par des paroles, mais en autorisant les gens à déployer leur initiative individuelle pour produire une alimentation plus abondante. Certes, il en résultera d'autres problèmes, notamment un inflation croiss~te et. l'~u~entatio~ du pouvoir ~'a~hat ·q~c l'mdustne etatique est mcapable de satisfaire,mais à force de tourner dans un cercle vicieux, les doctrinaires finiront par réviser leur doctrine inopérante, quel que soit le premier Secrétaire. Pas plus que le Soviet suprême n'est un parlement, le pouvoir communiste.n'a changé de nature ni de forme après la péripétie d'octobre dernier, et le New York Times se moque du public quand il va jusqu'à parler du cc nouveau régime soviétique», s'abaissant ainsi au niveau de la presse ., Biblioteca Gino Bianco 329 chinoise qui raconte que cc la chute de Khrouchtchev est le résultat inévitable de la lutte que le peuple soviétique et tous les autres peuples révolutionnaires du monde mènent avec persévérance contre le révisionnisme » (Hongqi du 21 novembre). Le tissu d'inepties que Mao a dictées pour triompher du cc khrouchtchévisme » ne trompe que la plus basse espèce de journalistes et n'avance en rien les affaires des deux grands Etats totalitaires empêtrés dans leurs contradictions insolubles. Avec ou sans Khrouchtchev, les dirigeants soviétiques ne savent que balbutier, en réponse aux diatribes chinoises, et ne réussissent qu'à gagner un peu de temps avant de réunir leur conférence vouée au ridicule. Mao ne sait que copier Hitler (racisme, espace vital, défilés au pas de l'oie, dressage de la jeunesse fanatisée) comme il a copié Staline (psittacisme, chauvinisme, dogmatisme, culte de sa propre personne), mais la direction collective de Moscou ne démord pas de ses intentions, de son programme, de ses résolutions de congrès, bref de sa cc ligne ». Il n'y aurait d'issue que la violence à cette impasse et plutôt que de recourir à des armes par trop inégales, les antagonistes ne peuvent s'assouvir qu'en violence verbale. Le mensongeinouï de Mao sur « le peuple sovié- ' tique et tous les autres peuples » dont la lutte contre ' le révisionnisme aurait causé la chute de Khrouchtchev, mensonge énorine qui là encore apparente Mao si étroitement à Hitler et à Staline, ce mensonge fantastique met en évidence frappante un trait des plus caractéristiques de l'épisode en question : non seulement le peuple soviétique, pour ne pas parler des autres peuples, mais le Parti lui-même a tout ignoré de ce qui se tramait dans la coulisse, il est resté absolument étranger à l'opération concertée entre un petit nombre de dirigeants, pas même débattue devant tout le Comité central. Sous ce rapport aussi, le procédé• ne révèle rien de nouveau et l'on est fondé à conclure qu'avec Brejnev comme avec Khrouchtchev, cc plus ça change, plus c'est la même chose», autrement dit qu'en ce qui concerne l'Occident la guerre politique suivra son cours tant que les pays libres accepteront de subir les hostilités sans les rendre. B. Souv ARINE • ..

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