Le Contrat Social - anno VIII - n. 5 - set.-ott. 1964

306 Ce qui était implicite dans les changements de 1960, c'était la conviction du régime qu'un pourcentage croissant d'étudiants chinois recevant un enseignement supérieur devait d'abord occuper un emploi à plein temps dans la production et étudier en dehors des heures de travail. Dans cette optique, on insista encore davantage sur l'enseignement donné en dehors des heures de travail en créant une commission nationale de contrôle chargée de développer et de coordonner les activités dans ce domaine. On mit l'accent sur l'extension des études, en dehors des heures de travail, au niveau de l'enseignement supérieur (en 1959-60, on dénombra 300.000 inscrits aux cours spéciaux, c'est-à-dire deux fois plus que l'année précédente) et au niveau des classes terminales de l'enseignement secondaire. Au niveau des premières classes du secondaire, où les étudiants, en général, n'ont pas encore 17 ans, le système préconisé restait moitié travail manuel, moitié études. Dans quelques grandes villes, on eut recours à la télévision et à la radio comme moyens complémentaires d'enseignement en dehors des heures de travail. Enfin, en 1960, on· reprit la lutte générale contre l'analphabétisme, lutte favorisée cette fois par l'introduction d'un système officiel de romanisation destiné à faciliter la lecture des idéogrammes. Malgré les résultats décevants des cours antérieurs d'alphabétisation accélérée, le régime mobilisa derechef un nombreux personnel pour reprendre cette lutte. Pendant plusieurs mois, la publicité faite pour cette campagne se maintint à un maximum, puis elle tomba à zéro au cours du second semestre de 1960, quand la situation économique du pays devint de plus en plus sérieuse. Années d'économies Au DÉBUT de l'année 1961, il était parfaitement clair que le « grand bond en avant » était arrêté par des obstacles. On commença alors à parler ouvertement de mesures d' « ajustement » et de « consolidation » qui, en fait, avaient déjà largement servi de directives l'année précédente. Le régime était très_préoccupé ?e porter _remède à la crise de l'agriculture, et il se rendit compte qu'il faudrait réduire les investissements dans d'autres domaines, y compris l'enseignement. Au cours de l'été 1961, l'organe de la jeunesse communiste avouait : Les bases de notre économie étant encore faibles, et notre production agricole ayant souffert de calamités naturelles pendant plusieurs années de suite, il nous est impossible actuellement de développer davantage nos activités en matière d'enseignement 14 • Le même éditorial donnait, en chiffres ronds, le nombre d'élèves et-d'étudiants inscrits dans 14. Chung-Kuo Ch'ing-nien Pao (le Quotidien de la jeunesse chinoise), 16 août 1961. Biblioteca Gino Bianco \ L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE l'enseignement primaire, secondaire et supérieur (probablement pour l'année scolaire 1960-61) : le total faisait apparaître une baisse de près d'un million par rapport à l'année 1959-60. Les signes indiquant que le régime s'orientait vers une politique d'économies en matière d'enseignement contribuèrent à détériorer 1~mor3! ,d~s étudiants au printemps de 1961. Mais ce n etait pas la seule raison. I:es effets ':umulés de la .J?riorité donnée au travail productif et à la politique militante, en application des réformes scolaires de 1958, avaient sérieusement affecté le niveau de l'enseignement, aussi bien en ce qui concerne les maîtres que les élèves, surtout dans les classes supérieures. Cette situation amena les milieux officiels, au printemps de 1961, à se préoccuper à nouveau de la qualité de l'enseignement, et conduisit finalement à un autre tournant important. Pendant le « grand bond », le régime considérait qu'il était plus important de faire des étu- ,. diants des communistes accomplis plutôt que des experts. Cependant, en août 1961, le ministre des Affaires étrangères, Chen Yi, annonçait un changement d'orientation et assurait aux diplômés de l'enseignement supérieur que désormais ils seraient jugés d'après leurs connaissances spécialisées et occuperaient des emplois en conséquence 15 • Des articles de presse, commentant cette nouvelle politique, révélèrent que les étudiants, les éducateurs et les administrateurs d'établissements d'enseignement avaient négligé le travail scolaire par suite de l'obligation d'assumer des activités sur le plan de la production ou de la politique. Par contraste, un enseignement consciencieux et une étude diligente devinrent les grands points sur lesquels on mit l'accent pour l'année scolaire 1961-62. Les efforts pour relever le niveau de l'enseignement ont pris des formes diverses. Des professeurs expérimentés furent appelés pour conseiller les jeunes enseignants et même pour participer personnellement à l'enseignement de base. Ces mesures étaient particulièrement destinées à remédier aux lacunes constatées dans l'enseignement des connaissances fondamentales, lacunes patentes jusque chez les étudiants de l'enseignement supérieur. On laissa plus de temps aux enseignants pour préparer leurs cours, pour diriger des recherches et pour guider les étudiants déjà diplômés, obligés, en nombre toujours plus grand, de poursuivre leurs études en Chine même par suite des difficultés croissantes avec l'Union soviétique. Autre changement reflétant le refroidissement des relations sino-soviétiques, l'encouragement officiel donné à l'enseignement de l'anglais dans les écoles chinoises, langue qui, jusqu'alorss passait après le russe. Enfin, on réduisit le temps de travail dans le secteur productif et les activités politiques afin de permettre aux étudiants et aux éducateurs de se consacrer davantage aux tâches scolaires. 15. Ibid., 2 sept. 1961.

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