CHARLATANISME STATISTIQUE par N. Valentinov On ne saurait mieux honorer la mémoire de N. Volski qu'en publiant ses études inédites en français, même si elles ne sont pas de date récente, comme c'est le cas du texte ci-dessous qui traite du revenu national de !'U.R.S.S. et des procédés mis en œuvre sous Staline pour soumettre les statistiques aux exigences de la politique et de la propagande. On ne méconnaît pas qu'une certaine réaction contre les monstruosités staliniennes se soit dessinée, dans ce domaine comme en d'autres, au cours des dix années consécutives à la mort de Staline ; mais elle ne suffit encore pas à assainir les PARMI les nombreuses questions analysées par le professeur S. N. Prokopovicz dans son livre, la plus importante et la plus complexe est celle du revenu national de l'U.R.S.S. Voulant supprimer l'influence du mouvement des prix, la statistique soviétique a chiffré l'accroissement du revenu national en prix « constants » et adopté comme tels les prix appliqués aux produits agricoles et industriels en 1927-28. Ainsi, le revenu national a été estimé, pour 1913, à 21 milliards de roubles ; pour 1928, à 25 milliards ; pour 1932, à 45,5 milliards ; pour 1937, à 96,3 milliards; pour 1940, à 128,3 milliards ; pour • 1950, à 210,4 milliards ; enfin pour 1951, à 235 milliards de roubles. De 1913 à 1951, la population s'est accrue de 50 %, le revenu national de plus de 1.000 %-Un véritable miracle... Ce qui frappe, c'est la progression du revenu national à partir de I 940. Les pertes et les destructions subies par l'Union soviéuque pendant la deuxième guerre mondiale, bien que sciemment exagérées dans les rapports officiels,ont été immenses. Or les indices relatifs au développement de la production industrielle communiqués par Malenkov au XIXe Congrès font apparaitreque celle-ci, effaçant les dommages et destructions subis penBiblioteca Gino Bianco méthodes en vigueur au nom du prétendu « marxismeléninisme », comme le prouvent les rodomontades de Khrouchtchev et la censure qu'il exerce sur ses discours quand il les publie en volumes. Les observations critiques de Volski sur le calcul du revenu national, suscitées par l'ouvrage de S. N. Prokopovicz sur !'Histoire économique de l' U.R.S.S. (Paris 1952), sont de 1953, donc appellent des correctifs sur divers points, mais elles gardent toute leur valeur méthodologique - instructive et stimulante. Nous leur donnons la signature de N. Valentinov, celle dont Volski a toujours usé dans notre revue. dant la guerre, n'a pu dépasser son niveau de 1940 qu'à partir de 1948. L'accroissement surnaturel du revenu national, 107 milliards de roubles, soit presque 100 %, aurait donc été obtenu en quelque quatre années. Peut-on le croire? Quel effet a eu sur la progression du revenu national l'économie des régions annexées avec leurs 24 millions d'habitants? Sans parler des millions de prisonniers parmi lesquels des centaines de milliers n'ont pas été rendus, l'U.R.S.S., au titre de la contribution de guerre imposée à l'Allemagne et à l'Europe orientale, a mis la main sur une énorme quantité de marchandises, de machines, d'équipement industriel et de moyens de transport. Cette contribution de guerre ne serait-elle pas, d'aventure, venue alimenter la « progression » du revenu national? Analysant les différentes parties du revenu national émanant de l'agriculture, de l'industrie, des transports, de la construction et du commerce, S. N. Prokopovicz remarque que, « parmi ces cinq éléments, il n'en est pas un seul qui ait été calculé d'une manière juste ». Ses jugements sur les chiffres de 1932-1942 (assignés par le plan) sont fort sévères. Les récoltes n'étant pas calculées, en U.R.S.S., d'après les quantités effccti-
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