Le Contrat Social - anno VIII - n. 4 - lug.-ago. 1964

260 On ne peut donc que partager les conclusions de l'auteur : si, sur un plan théorique, par exemple pour la construction de « modèles » économiques, les efforts des planificateurs soviétiques - et, notamment, des mathématiciens - sont riches d'enseignements, en revanche on ne peut qu'être sceptique sur les chances de succès du système lui-même, quelles que soient les retouches ou LE CONTRAT SOCIAL améliorations qui lui seront apportées : « Un système qui suppose des qualités que les hommes n'ont pas n'est pas tout à fait un bon système », remarque M. Bernard. Il est difficile de prononcer sur un ton plus modéré une condamnation plus , ' severe. C. BASTIEN. CORRESPONDANCE Dans notre numéro de mars-avril de cette année, nous avons publié le compte rendu d'un livre de Louis Baudin par M. Melchior de Molènes et celui d'un livre de M. de Molènes par C. Bastien. Cela nous a valu des remarques ironiques suscitées par le fait qu'un de nos collaborateurs en a critiqué un autre. Il n'y avait pas de quoi ironiser. Notre revue est tout le contraire d'une publication « monolithique », comme disent les communistes, et les divergences de vues entre commentateurs de bonne foi nous paraissent bien naturelles. On ne se laissera pas contaminer ici par les mauvais exemples de fanatisme et d'intolérance qui infectent notre temps. Si nous avons pris parti une fois pour toutes contre la barbarie stalino-hitlérienne, ce ne fut pas de parti-pris a priori, mais pour des raisons dûment motivées que le Contrat social ne cesse d'expliciter depuis bientôt huit années. A part cela, une certaine diversité dans la collaboration intellectuelle n'a rien que de normal dans une « revue historique et critique des faits et des idées ». D'autre part, M. Melchior de Molènes, mécontent d'une critique sincère et mesurée, a cru devoir nous adresser la lettre suivante Monsieur le Directeur, Le Contrat social a publié un compte rendu de mon livre: La Carrière du président Kennedy et la vie politique américaine. L'auteur de ce texte, signé C. Bastien, paraît ne trouver dans ce volume que des défauts, d'un point de vue littéraire comme d'un point de vue technique. En conséquence,et tout en étant sensible au fait que votre revue ait signalé cet ouvrage, j'ai l'honneur de vous demander, en réponse à cet article et conformément aux usages, que vous vouliez bien apporter à vos lecteurs, par l'insertion de ma présente lettre dans vos colonnes, les quelques précisions suivantes. L'Académie française a décerné un de ses principaux prix d'histoire à ce livre, qui a été l'objet d'un exposé élogieux d'un professeur de droit, membre de l'Institut de France, à l'Académie des sciences morales et politiques, et qui avait bénéficié d'une subvention du ministère de l'Education nationale. Il était développé d'une thèse de doctorat d'Etat, soutenue à l'Université de Paris avec la meilleure mention. Ladite thèse m'avait fait devenir lauréat de la Faculté de droit et des sciences économiques de Paris. Le résumé de ces faits suffit, je pense, à,-,,montrerclairement quel a été au sujet de ce livre le jugement unanime d'un grand nombre de personnalités éminentes, très diverses par leur formation, par leurs spécialités, par leurs fonctions et par leurs opinions politiques, et de compétences au moins égales à celles de M. C. Bastien. Leurs appréciations concordantes sur ce volume constituent - soit dit en termes parfaitement courtois envers vous et sans aucune intention polémique de ma part - la BibliotecaGino Bianco meilleure réfutation, parce que c'est la plus objective et la plus qualifiée, des affirmations de cet article. L'auteur de celui-ci semblait, d'ailleurs, avoir visé à un jeu intellectuel de controverse humoristique plutôt qu'à l'esprit d'impartialité caractéristique de la critique littéraire éclairée et consciencieuse. Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'assurance de ma considération la plus distinguée. CH. MELCHIOR DE MOLÈNES. Cette lettre, contrairement à ce qu'elle annonce au début, ne répond nullement à l'article de C. Bastien. Son auteur se rend témoignage à lui-même en invoquant toutes sortes d'éloges et de certificats dont rien ne prouve qu'ils soient justifiés le moins du monde. Ni l'Académie française, ni celle des Sciences morales et politiques, ni la Faculté de droit, au niveau où elles sont tombées, ne nous en imposent, pas plus que le ministère de l'Education nationale. Une critique loyale et sensée vaut mieux que des mondanités, des complaisances et des lauriers décernés par des gens indignes. S'il fallait illustrer par des exemples le peu de considération que méritent actuellement les « autorités » invoquées par notre correspondant, on n'aurait que l'embarras du choix, ce serait à n'en plus finir et surtout entreprendre le procès d'un état de choses qui dépasse par trop le prétexte, donc ouvrir une autre rubrique. Il y a un temps pour tout, dit !'Ecriture, mais à part le temps, il nous manque la place. Une autre occasion s'offrira peut-être de traiter des affaires américaines et de montrer à M. Melchior de Molènes à quel point il se trompe. * * * Notr~ lecteur et ami Hyacinthe Dubreuil, qui fut une des personnalités les plus marquantes du syndicalisme authentique d'autrefois, et dont l'expérience multiple condensée dans des ouvrages comme Standards (1929), La Fin des monstres (1938), Des robots ou des hommes (1957), Promotion (1963) a vivement intéressé un public d'élite, nous communique une lettre adressée au journal Combat, lequel ne l'a pas insérée. Nous la publions d'autant plus volontiers qu'elle traduit notre propre sentiment et donne l'occasion d'y ajouter de notre crû sur un sujet qu'il y aura lieu de traiter plus largement, à loisir. Monsieur, 19 juillet 1964. L'éditorial que vous avez consacré le 17 juillet aux obsèques de M. Thorez m'incite à vous faire part de quelques réflexions. Je vois d'avance apparaître les objections qui naîtront probablement dans votre esprit. Objections dues à mon grand âge - je suis né en 1883 - qui

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