Le Contrat Social - anno VIII - n. 4 - lug.-ago. 1964

254 firent exception : il y en avait vraiment trop, et on ne pouvait vraiment pas les considérer comme étrangers à l'Egypte. Mais s'il est difficile de chasser les Coptes de leur pays ancestral, il est facile de leur enlever peu à peu, insidieusement, toutes les places qu'ils détiennent dans la société et dans l'économie, en les enfermant progressivement dans une sorte de ghetto intérieur - dans le silence que permet un régime de censure permanente. Telle est la situation réelle où vivent, ou plutôt végètent les Coptes, depuis ces dernières années. Point de persécution sanglante, mais un étouffement lent et sûr. Il semble que les Coptes eux-mêmes n'aient plus d'illusion sur ce qui les attend dans leur propre patrie égyptienne, transformée par Nasser en « République Arabe Unie ». Ainsi que l'écrit Edward Wakin (pp. 75-76), « les Coptes sont convaincus que les musulmans n'accepteront jamais les non-musulmans comme citoyens à part entière. A peu d'exceptions près, lorsqu'un musulman parle des Arabes, de l'unité arabe, de nationalisme arabe, de renaissance arabe, etc., c'est uniquement aux musulmans qu'il pense. Ce sont principalement des chrétiens au Moyen-Orient qui tentent de s'inclure eux-mêmes dans cette définition d' "Arabes ". Quant aux musulmans, ils l'appliquent uniquement à ceux qui acceptent la mission de Mahomet en tant que " fait central de !'Histoire ". » Le livre d'Edward Wakin est un rappel à la réalité, qui vient à son heure en cette époque d'ignorance où le problè~e copte est traité par le silence et le mépris. L'auteur appartient lui-même à l'une de ces « minorités » qui constituent une si grande part du monde pseudo-arabe, considéré à tort comme homogène. E. W akin, quoique citoyen des Etats-Unis, est d'origine chrétienne libanaise. Journaliste et pédagogue (de l'Université catholique Fordham) il voyage fréquemment dans les. pays du Moyen-Orient pour y étudier directement les divers groupes sociauxet ethniques. Son ouvrage sur les Coptes est le fruit d'un long séjour sur place et de conversations avec des centaines de personnes, pour la plupart anonymes - pour des raisons évidentes. L'atmosphère qui se dégage du livre est faite de méfiance, de crainte, de désarroi, mais aussi d'espoir - l'espoir d'un peuple qui, malgré tout, veut vivre. Ces pages doivent donc être lues comme on aborde un rapport honnête, mais circonspect, sur la situation dans un pays à peu près totalitaire : il faut savoir lire aussi entre les lignes. C'est dire qu'il n'est point facile de résumer les 176 pages de ce «rapport». Il nous a paru préférable d'y ajouter une brève introduction historique, dont l'absence se fait sentir dans un texte qui semble s'adresser surtout à un public déjà au courant des affaires du Moyen-Orient, de son passé, de ses communautés chrétiennes. Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL L'auteur a le mérite de la sincérité. Il ne cache pas les côtés misérables et déplorables dans le caractère et dans l'existence de la communauté copte; il s'étend sur la décadence de l'Eglise copte, sur l'ignorance crasse de la plupart de ses prêtres et moines engoncés dans une tradition mourante ; il souligne non moins impitoyablement la veulerie et les dissensions des laïcs devant les affaires d'intérêt commun. Pourtant il perçoit bien des signes de renouveau, qui se manifestent depuis quelques années, bien des initiatives qui tendent déjà à une réorganisation de la communauté - en dépit de l'hostilité du monde extérieur, ou peut-être même sous la pression de la nécessité. Des gens qui ne sont point <l'Eglise, prennent désormais à cœur les intérêts de la communauté copte, du peuple copte, notamment en matière d'instruction publique. On est à la recherche d'une issue... L'un des symptômes les. plus significatifs de ce renouveau est l'enseignement en langue copte, qui se répand dans les écoles primaires auprès des églises. Selon E. Wakin, il y a maintenant au Caire plusieurs dizaines de familles (appartenant justement à la bonne société) où le copte est pratiqué en tant que langue vivante. Pourquoi hausser les épaules, alors qu'en Israël voisin, en l'espace de deux ou trois générations, l'hébreu est redevenu langue de civilisation et langue véhiculaire, parlée par plus de deux millions de personnes ? Les Coptes se trouvent-ils au seuil d'une renaissance spirituelle et nationale ? Il est trop tôt pour répondre. Mais de toute évidence une telle renaissance, laïque et linguistique, pour ne rien dire de ses aspects religieux, serait tout à fait incompatible avec l'orientation « arabe » de l'Egypte. Quoi qu'il en soit, les « Egyptiens véritables » sont encore bien vivants. A. G. HORON. Colonisation et « colonialisme » . KARL MARX et FRIEDRICHENGELS: Textes sur le colonialisme. Moscou, s.d., Editions en langues étrangères, 431 pp. LE MOTCOLONIALISMn'eExistait pas du vivant de Marx et d'Engels et par conséquent c'est par un abus de langage qu'il figure comme titre de ce recueil factice où les éditeurs ont groupé plus ou moins, logiquement des écrits ou fragments d'écrits traitant de sujets connexes ou supposés tels.· La publication de la brochure de Paul Louis intitulée Le Colonialisme au début de notre siècle indique à peu près le moment où ce terme, forgé par le socialisme traditionnel, était entré dans le vocabulaire de la 2e Internationale. On entendait par là distinguer entre la colonisation pro-

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