Le Contrat Social - anno VIII - n. 4 - lug.-ago. 1964

Débats et recherches QUAND LA FRANCE DÉCOUVRAIT L'' AMÉRIQQE par Yves Lévy ENTRE la chute de Napoléon 1er et le coup d'Etat de Louis-Napoléon, la France découvrit les Etats-Unis. Tandis qu'elle-même passait par trois régimes différents, les traits de la jeune République furent de mieux en mieux connus. Comment se transformèrent, pendant cette période, l'image que les Français se faisaient des Etats-Unis, les sentiments qu'ils éprouvaient pour eux ? M. René Rémond, pour le préciser, s'est livré à une vaste enquête *. Cet ouvrage considérable comprend cinq parties. Dans le premier volume l'auteur examine les relations des Français avec les Etats-Unis, puis brosse un tableau de ses sources d'inf ormation sur l'opinion publique dans la période considérée. Dans le second volume il dit ce que fut l'opinion française sur les Etats-Unis sous la Restauration, ce qu'elle fut sous la monarchie de Juillet, ce qu'elle fut sous la Seconde République. Une bibliographie de soixante pages complète l'ouvrage. On remarque que les livres et brochures du temps sont répertoriés selon la chronologie annuelle (de 1814 à 1853), ce qui devrait être la règle de toutes les bibliographies de quelque étendue. Mais ce devrait aussi être une règle que de compléter une bibliographie chronolologique par un index des noms d'auteurs : seul un tel index en fait un instrument parfaitement maniable. Certains ouvrages de la période considérée sont dispersés d9ns des rubriques particulières : ils devraient figurer dans la bibliographie chronologique. Enfin sont absents de celle-ci les ouvrages du temps où s'expriment occasionnellement des opinions sur les Etats-Unis. A vrai dire ce serait démesurément gonfler une bibliographie de ce genre que de ne rien laisser de côté, mais après tout, si l'on y voit le vicomte d'Arlincourt (à la date de 1848), pour un ouvrage • René Rémond : Les Etats-Unis devant l'opinion française, 1815-1852. Paris 1962, Libr. Armand Colin (Cahiers de la Fondation des sciences politiques, n°• n6 et 117), 2 vol. à pagination suivie, 968 pp. Biblioteca Gino Bianco qui ne semble pas être une étude sur les EtatsUnis, pourquoi Stendhal en est-il absent, qui dans De l'Amour ( 1822) consacre un chapitre - court, il est vrai - à l'amour aux Etats-Unis ? Encore y a-t-il dans le texte (p. 548) une référence à ce chapitre. D'autres ouvrages, où les EtatsUnis occupent une place importante, ne sont mentionnés ni dans le texte ni dans la bibliographie. On en citera un bon nombre dans les pages qui suivent, ce qui nous contraint à penser que l'auteur s'abuse lorsqu'il écrit (p. 7) : « Nous nous sommes fait une règle de lire tous les livres et brochures, et nous pensons présenter une bibliographie pratiquement exhaustive de tout ce qui a paru sur les Etats-Unis pendant notre période. » Ce qu'on lit dans ces ouvrages inconnus de M. Rémond ne concorde pas toujours - on le verra - avec ses conclusions. Mais avant d'arriver aux conclusions, il convient de préciser le projet de l'auteur. Un sondage rétrospectif « IL s' AGIT, dit-il (p. 3), d'un chapitre d'histoire de l'opinion et non d'histoire des idées politiques. » Dans sa thèse de 1943, J. Stoetzel écrivait à l'inverse (p. 371) : « L'histoire des opinions, plus souvent dénommée histoire des idées... » Cette opposition permet de mieux définir l'intention de l'auteur. Il précise d'ailleurs lui-même : « Nous ne nous croirons pas quitte avec notre sujet si nous avons réussi à mesurer l'influence des institutions politiques américaines sur la pensée politique française. » En fait, il se désintéresse à peu près totalement de cette influence. Il ajoute (p. 4) : « L'opinion, ce ne sont pas seulement des idées, ce sont aussi des sentiments, des tendances à peine formulées, tout un contenu affectif. >> Et voilà justement ce que l'auteur cherche à connaître : ces sentiments, ce contenu affectif.

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