Le Contrat Social - anno VIII - n. 4 - lug.-ago. 1964

220 ment rural, de l'ordre de 2,5 à 3 milliards de roubles. La résolution de la session du C.C. de février 1964 sur « l'intensification de l'agriculture » dit : La session demande au Comité central du P. C., au Conseil des ministres des Républiques de l'Union et au Département de l'aménagement des eaux (Goszemvod) de !'U.R.S.S. de prendre des mesures d'urgence pour que la totalité des terres irriguées soient effectivement utilisées. Il faut en finir avec cette situation anormale où nombre de kolkhozes et de sovkhozes obtiennent sur les terres irriguées de très faibles récoltes. La « direction » Nous AVONCSOMMENCcÉet article en rapportant l'anecdote contée par Abramov (note 1). La rémunération fixée pour la fenaison était si minime que les foins étaient condamnés à périr sur pied. Des incidents de ce genre pullulent dans la vie soviétique. En 1955, des mesures furent prises pour décentraliser la planification de l'agriculture. En fait, cela se ramena à peu de chose. Les chiffres de la collecte des produits agricoles continuèrent à être fixés par les organismes centraux ; or ce sont ces chiffres qui déterminent dans une large mesure la production. Le 28 février I 964, à la Conférence des cadres consacrée à l'application des résolutions du dernier Comité central sur « l'intensification de la production agricole », Khrouchtchev prononça un discours qui dura cinq heures. C'était le quatrième grand discours qu'il consacrait, en moins de trois mois, à l'agriculture. Particulièrement importantes étaient les directives suivantes : «Mettre fin une fois pour toutes aux excès en matière de planification et à l'esprit bureaucratique dans la direction des kolkhozes et des sovkhozes 29 • » Il en ressort que le principe de la non-immixtion des organismes centraux, même dans des limites aussi étroites que celles de 1955, fut rarement respecté, pour ne pas dire jamais, jusqu'en 1963. Khrouchtchev cita un certain nombre d'exemples absurdes de cet esprit bureaucratique. Il parla longuement de la loi de 1955 sur la décentralisation de la direction agricole, pour montrer que cette loi n'était pas appliquée. Une juste rémunération du travail qui stimulerait la production tant en quantité qu'en qualité est un des problèmes dont il est beaucoup question actuellement en U.R.S.S., mais on n'arrive pas à y trouver de solution. Le discours de Khrouchtchev en dit long à ce sujet. ~es principales anomalies de l'agriculture soviétique (23 millions d'hectares de maïs dont le grain n'a pas le temps de se former et les immenses pertes qui en résultent; l'emploi de la betterave sucrière « hautement productive» comme «nour29. Pravda, 7 mars r 964. Biblioteca Gino Bianco L'EXPÉRIENCE COMA1UNISTE riture à bon marché du bétail » ; la réduction considérable des cultures de luzerne et de trèfle et leur remplacement par les pois ; la suppression presque totale des terres en jachère, etc.) sont toutes le résultat de la direction de l'agriculture assumée par Khrouchtchev lui-même, auquel nul n'a le droit d'objecter quoi que ce soit. Viennent ensuite les autres dirigeants des Républiques de l'Union, puis ceux des régions et enfin les cadres administratifs des kolkhozes et des sovkhozes. Tous ont «besoin» de commander. Selon les propres termes de Volkhovski, « beaucoup trop des cadres de ces kolkhozes [retardataires] : comptables, techniciens, chefs d'équipe, ne ménagent pas les kopeks du kolkhoze, travaillant à l'aveuglette, selon le principe : et vogue la galère 30 ». Le même Volkhovski souligne que les kolkhozes savent très bien ce dont ils ont besoin, mais ceux qui, au-dessus d'eux, tiennent les leviers de commande, gâchent tout par un flot d'instructions et de directives. Tout ce gâchis perdure trente ans après le début de la collectivisation, dix ans et plus après la mort de Staline. Quelles raisons aurait-on de croire que les plans quinquennaux ou décennaux ultérieurs auront des résultats très différents ? QUEdécoule-t-il de ce qui précède ? Simplement ceci, sur quoi il est aisé d'être d'acc?rd av~c Khrouchtchev, que l'agriculture soviétique dispose de vastes potentialités. S'il en est ainsi, c'est que le retard est énorme, la désorganisation générale et que les kolkhozes et sovkhozes géants sont incapables de travailler normalement. Le fait que les investissements aient été insuffisants a, certes, freiné le développement de l'agriculture. Mais la « direction » de Khrouchtchev a eu, elle aussi, et continue d'avoir, une influence considérable. Les gros investissements en cours pourront entraîner une amélioration des conditions de trav~. ~'accroissem~nt de la fabrication des engrais c~ques et l_edeveloppement des moyens d'irrigation aboutiront sans doute à une production accrue. Et celle~ci devrait avoir pour conséquences une augmentation de la rémunération du travail et d'autres améliorations des conditions de vie. Il reste que la direction et les méthodes de Khrouchtchev n'ont pas disparu. Dans ces conditions, une agr~cult~re_~ussi efficiente que celle que les entrepn,ses ~cµviduelles de l'Europe occidentale et de 1 Amenque du Nord ont su créer est, semble-t-il, pour l'Union soviétique dirigée par Khrouchtchev, un objectif inaccessible. ( Traduit du russe) NAOUM lASNY. 30. Questions d'économique, nov. 1963, p. 67.

RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==