N. IASNY tous les autres domaines, à faire porter la totalité de l'effort sur un seul point, en l'occurrence sur une seule céréale sans tenir compte de ses besoins en ce qui concerne le climat, le sol, les assolements. Un beau jour, Khrouchtchev décida que le maïs était la céréale la plus productive et qu'on pouvait le semer partout. Ce qu'on s'empressa de faire à une échelle de plus en plus grande. Il a fallu les importations massives de blé (rendues nécessaires par la mauvaise récolte de la seule année 1963) pour que le Kremlin s'aperçoive que la culture du blé est préférable à celle du maïs. En Ukraine, en Moldavie, dans le nord du Caucase, le maïs vient bien, mais on peut également y cultiver avec succès les blés d'hiver, plus précieux que le maïs. Dans la basse Volga, en Sibérie et au Kazakhstan, les blés de printemps ne sont que d'un faible rendement. Mais ces régions n'étant pas favorables au maïs, il est néanmoins plus avantageux d'y cultiver des blés de printemps que des blés d'hiver. Or, au début de 1963, Khrouchtchev et consorts ne s'en étaient pas encore aperçus. En 1962, dernière année de la décennie post-stalinienne, la surface ensemencée en blés d'hiver était supérieure de 2,3 % à celle de 1953 et ne faisait qu'égaler celle de 1958. Au contraire, la surface emblavée en maïs était dix fois supérieure à celle de 1953 et deux fois plus étendue qu'en 1958 8 • En 1962, les cultures de maïs ne couvraient pas moins de 37,1 millions d'hectares. Mais il ne s'agit pas uniquement de maïs récolté à maturité. La plupart du temps, il est coupé encore vert et utilisé comme fourrage, soit parce que dans les régions où il mûrit on en sème trop pour le récolter avec les moyens techniques dont on dispose, soit parce qu'on le cultive dans des régions où il n'arrive pas à maturité. En 1962, sur 37,1 millions d'hectares emblavés en maïs, celui-ci ne fut récolté mûr que sur 7 millions d'hectares, soit 20 % de la surface cultivée. Une quantité légèrement supérieure (7,1 millions) fut récoltée quand le grain était déjà formé. Sur les 23 millions d'hectares restants, le maïs fut coupé encore vert et utilisé comme fourrage, d'où une perte considérable 9 • Certes, 1962 fut une année défavorable, mais même en 1961, meilleure année pour le maïs, sur 25, 7 millions d'hectares emblavés, 7,1 millions 8. L'Economie nationale en 1962, p. 259. 9. Dans le Kommounist, n° 2 de 1964, p. 55, on trouve l'information suivante en provenance d'un kolkhoze de la région de Kostroma : u Certaines années nous avons semé jusqu'à 400 hectares de mais. Mais il n'est venu qu'en 1954 et 1961, soit une récolte tous les trois à cinq ans I Et quelle r~lte ... Du maïs vert pour le fourrage. On sait que le maïs ne fournit un aliment de bonne qualité que lorsque le grain est déjà formé. Dans nos conditions climatiques, en raison des gelées précoces, le maïs ne réussit pas. En revanche, il existe d'autres cultures qui fournissent des récoltes régulières et excellentes, telles que les pois, la vesce, les hybrides de légumineuses, le trèfle, le seigle. Sans grande dépense de main-d'œuvre, ces cultures peuvent donner 200 quintaux et, ai on les soigne, 300 quintaux et plus de fourrage vert à l'hectare, • Biblioteca Gino Bianco 217 donnèrent du maïs mûr et 6 millions du maïs dont le grain était déjà formé ; sur 12,5 millions d'hectares (soit presque la moitié de la surface emblavée), le maïs fut récolté avant la formation des épis. Aussi bien l'on ne s'étonnera pas de ne pas trouver dans l'Economie nationale pour 1962 (après les premiers achats de blé à l'étranger) de données sur le prix de revient du maïs 10 • De tels chiffres n'ont été publiés que pour la première année de la deuxième décennie poststalinienne. Comme on pouvait s'y attendre, le prix de revient du maïs est bien supérieur à celui des autres céréales. M. Léméchev le donne (sans expliquer pourquoi ces contrées ont été choisies) pour les régions de Krasnodar, Stavropol et Rostov. La moyenne pour les années 1959-61 est de 94 °/o, 70 o/ 0 et 50 0 / 0 supérieure aux autres céréales11 • Le fait que le prix de revient du maïs ait été publié montre que l'engouement dont celui-ci a bénéficié s'est déjà calmé. Avant même que le Kremlin en ait révélé le prix de revient, il avait cessé, dans les slogans officiels, d'être présenté comme la céréale la plus rentable. Aujourd'hui, on a substitué les blés d'hiver au maïs qui n' occupe plus que la seconde place 12 • Et il n'est plus question de la culture du maïs comme d'une « reine des cultures ». Une sensible extension des emblavures, surtout de blés d'hiver, fut décidée dès l'automne 1963, peut-être avec quelque retard sur le meilleur moment des semailles. Cette extension n'a pu se faire en grande partie qu'au détriment du maïs. Ainsi les emblavures de maïs auront été réduites là même où les conditions étaient les plus favorables à sa culture. Les légumineuses DANSTOUSLESPAYSs,auf en U.R.S.S., les légumineuses, en raison de leur faible rendement, ne sont cultivées qu'à titre exceptionnel et de plus en plus comme produit alimentaire. Seuls leurs déchets sont utilisés pour la nourriture du bétail. En Russie soviétique, on a décidé ces dernières années de faire des légumineuses, surtout des pois, un élément essentiel de la farine destinée à l'alimentation du bétail. De 1959 à 1963, la superficie cultivée en légumineuses s'est accrue de cinq fois (passant de 2,5 millions à 12,8 millions d'hectares). Le plan de 20 ans envisageait de porter cette superficie à 30 ou 40 millions d'hectares et cette culture était censée devoir atteindre son plus haut degré de développement dès 1965. La surface semée en pois devrait être à l'heure actuelle presque cinq fois supérieure à celle de tous les autres pays. 10. Le prix de revient des céréales est indiqué dans ce recueil de statistiques « à l'exception de celui du maïs» (voir pp. 332, 333 et 338). 11. L'Economie planifile, janv. 1964, p. 24. 12. Ce qui, de toute évidence, est une erreur. Dans les régions favorables à la culture du maïs, celui-ci donne un meilleur rendement que les blés d'hiver.
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