Le Contrat Social - anno VIII - n. 4 - lug.-ago. 1964

A PROPOS D'UN ANNIVERSAIRE par A. Bru1nberg SI KHROUCHTCHEaVvait pu en faire à sa tête, son 7oe anniversaire eût sans doute été célébré avec plus d'éclat que ce ne fut le cas le 17 avril dernier au Kremlin. Non pas qu'il ait manqué de discours et de messages flagorneurs qui auraient dû disparaître avec le « culte de la personnalité» et dont voici quelques échantillons : l' « ami le plus intime et le très cher frère » des « peuples industrieux de l'Orient soviétique » ; Khrouchtchev, « aimé sincèrement et profondément respecté par les peuples de l'Azerbaïdjan, de l'Arménie, de la Géorgie et de la Biélorussie»; «Les écrivains d'Ukraine n'oublieront jamais (...) tout ce que le bon Nikita Serguiéïévitch a fait pour la littérature ukrainienne » (Iouri Zbanatski, homme de lettres ukrainien) ; «Pour nous, compositeurs soviétiques, la bienveillance et la sollicitude de Nikita Serguiéïévitch à l'égard de notre art musical nous ont toujours été particulièrement chères » (Dimitri Chostakovitch). Les militaires aussi, quels que soient leurs divergences avec le premier secrétaire, débordaient d'enthousiasme délirant en se plaçant dans la perspective historique de rigueur. Dans les Izvestia du 17 avril, le maréchal Gretchko rappelait «l'immense contribution personnelle [de Khrouchtchev] à la victoire sur le fascisme allemand». Le même journal publiait une« photographie rare » remontant au mois de septembre 1920 : on y voyait une trentaine de participants à une «réunion de travailleurs politiques de la 9e armée du Kouban » - parmi lesquels Khrouchtchev, alors instructeur dans la section politique de l'armée. La photographie s'accompagnait du texte d'un certificat à lui décerné à l'issue d'une certaine mission militaire - document assez ordinaire mais étayé d'une note de la rédaction faisant allusion aux mémoires de « vieux communistes) qui travaillaient de concert avec Khrouchtchev» à cette époque et qui avaient gardé le souvenir d'un «commissaire militant, adroit organisateur, homme avide de savoir et camarade sensible ». Biblioteca Gino Bianco Pourtanti' 1964 n'est pas 1949 (date à laquelle !'U.R.S.S. célébrait le 7oe anniversaire de Staline), ni même 1959 : alors, les orateurs du XXIe Congrès portaient à l'actif de Khrouchtchev le fait d'avoir, entre autres, «montré nettement la voie à la biologie soviétique», d'avoir été l'artisan des succès dans «la construction et le lancement de satellites artificiels et de fusées cosmiques»; dans le «développement de l'industrie chimique», dans la« construction de centrales et de lignes électriques ». Il est certain que cette discrétion est due, au moins en partie, au fait qu'un grand nombre de ses projets favoris, mis en œuvre au cours des dix dernières années, ont échoué. Il eût été indélicat de s'étendre sur la contribution apportée par Khrouchtchev à l'agriculture soviétique, alors que presque toutes ses tentatives, depuis la culture massive du maïs jusqu'à la mise en valeur des terres vierges sibériennes, ont été des échecs retentissants. Comment insister sur ses talents d'administrateur alors que ses multiples réorganisations de l'industrie, de l'agriculture et du Parti ont donné de si maigres résultats? Que dire de la promesse grandiose de dépasser les Etats-Unis pour la production de la viande et du beurre et d'instaurer le «communisme total» du vivant de la génération actuelle - promesse qui a fait place au plaidoyer plus prosaïque en faveur d'une copieuse portion de goulasch dans l'assiette de chaque prolétaire? Quel que soit le pouvoir de Khrouchtchev, son prestige, tout bien pesé, ne peut être bien grand. NULLEPARTce prestige n'est aussi bas que dans celui du communisme international. En dépit de ses incroyables échecs, le pouvoir personnel de Khrouchtchev dans le parti soviétt~ue et dans l'Etat est aussi ferme que jamais. Il n en est pas de même sur le terrain du mouvement communiste international, où ses échecs ont non

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