L. DAN archives se trouvent toujours aux mains de la social-démocratie allemande 7 • Paris, été I949. Tout récemment, en novembre 1949, j'ai eu l'occasion de parler de cette affaire à Fritz Adler, auquel je montrai une traduction de ces notes. Adler se rappela fort bien toute l'histoire, à laquelle il avait été quelque peu mêlé. Il me rappela que lui aussi avait pris part aux conversations, car les sociaux-démocrates allemands, et en particulier Wells, voulaient à tout prix éviter un contact direct avec les représentants soviétiques. C'est pourquoi ils l'avaient invité, en sa qualité de secrétaire de l'Internationale à l'époque, à les représenter dans ces conversations. Ainsi avait-il pris part à un voyage par avion à Copenhague où étaient alors conservées ces archives, car les Soviétiques voulaient prendre connaissance des documents d'après les originaux, et non pas seulement sur inventaire. Nicolaïevski (en qualité d' « expert »), Boukharine et Adoratski étaient également du voyage. A cette occasion, Adler passa toute une journée avec Boukharine. Selon Adler, Boukharine prenait un très vif intérêt à n'importe quelle conversation ; il alla jusqu'à dire : « Vous savez, c'est avec plaisir qu'au lieu de cette affaire je discuterais avec vous d'autres questions. » A quoi Adler, qui ne pouvait se défaire de l'impression que toute cette histoire n'était qu'une provocation dirigée contre Boukharine, répondit fort discrètement : « Non, d'abord les affaires, ensuite l'agrément ... » Si tout cela n'était en effet qu'une provocation dont Boukharine devait être la victime, on comprend peut-être dès lors pourquoi Dan avait été impliqué dans l'affaire, et pourquoi on avait tenté d'y entraîner également Blum. Si, dans la pensée de quelque « diable », tout cela devait un jour être présenté comme une action criminelle ou un complot, la présence de Dan et de Blum aurait pu être d'une importance fatale et servir de base à une accusation de complot à l'échelle internationale ... LYDIA DAN. ( Traduit du russe) Comment les archives social-démocrates ont été sauvées En 1933, quand aucune illusion n'était plus ec:rmise sur ce qu'on pouvait attendre d'Hitler, J'écrivis de Paris une lettre à B. Nicolaïevski (qui vivait alors à Berlin) pour lui demander si toutes mesures nécessaires avaient été prises afin 7. Erreur de Lydia Dan : les archives sont • l'Institut international d'Histoire sociale, à Amsterdam. - N.d.l.R. Biblioteca Gino Bianco 201 de mettre les archives de la social-démocratie allemande et celles du R.S.D.R.P. hors d'atteinte des nazis. (J'avais fait connaissance avec B. N. sous l'égide de D. Riazanov, alors que nous étions correspondants de l'Institut Marx-Engels, l'un à Berlin, l'autre à Paris. Plus tard, nous travaillâmes ensemble pour l'Institut d'Histoire sociale d'Amsterdam. Nous avions en commun le goût des recherches historiques et le souci de la documentation en matière de sciences sociales.) A ma grande surprise, B. N. me répondit qu'aucune précaution n'avait été prise, que l'immeuble du Parteivorstand était sous surveillance des nazis, qu'il n'y avait plus rien à faire pour sauver les archives. Tout en blâmant dans mon for intérieur ce que je considérais comme la passivité impardonnable des social-démocrates, j'écrivis de nouveau à B. N. pour exprimer mon étonnement devant ce fatalisme et formuler l'opinion que tout n'était peut-être pas perdu, qu'il fallait tenter quelque chose. B·.N. me répondit que si je pouvais prendre une initiative à cet égard, il en serait fort heureux, mais que, quant à lui, il ne voyait pas ce qu'on pourrait entreprendre en de telles circonstances. (Cette correspondance a été saisie par les nazis lors de l'occupation allemande en France. Je ne puis donc citer les termes exacts mais je rends bien le sens, resté très présent à mon esprit.) Je me rendis alors chez Anatole de Monzie, qui m'accordait grande estime et confiance, qui s'intéressait vivement aux questions sociales, aux affaires russes, au marxisme, etc., et je lui exposai le cas en soulignant l'importance de ces archives qui contenaient, d'une part, les papiers de Marx et d'Engels, et, d'autre part, une documentation unique sur l'histoire du bolchévisme et du menchévisme. De Monzie était certainement le seul homme politique en France capable à la fois de comprendre immédiatement l'intérêt de la chose et de prendre une décision sans s'embarrasser d'aucune considération secondaire, capable vraiment de joindre l'acte à la parole. Il n'hésita pas un instant et, posant sa main sur le téléphone, me dit à peu près textuellement: « J'appelle François-Poncet à Berlin et je lui dis que ces archives sont à nous. Je vais aviser Julien Cain que vous irez voir de ma part et à qui vous expliquerez l'affaire 'en détail. Nous dirons aux Allemands que ces archives sont acquises par la Bibliothèque nationale. L'essentiel est d'empêcher leur destruction. Ensuite, nous verrons. » Ainsi fut fait. Je rendis compte de ma démarche à B. N. af rès avoir causé avec Julien Cain et le reste de 1 opération incomba à B. N. de concert avec l'ambassade de France à Berlin. Plus tard, B. N. m'écrivit : « Il y a aussi les archives du Bund ». Je répondis en substance : « Cela ne
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