Le Contrat Social - anno VIII - n. 3 - mag.-giu. 1964

LE CONTRAT SOCIAL toujours une fausse neutralité vis-à-vis des communistes, en vérité une bienveillance complice, cite sans réserv~ ,les ~arions les plus cyniques de l' Humanite e~ y Juxtaposant ?es extraits de l'hebdomadaire pro-commuruste France-Observateur qui tend à interpréter comme « erreur de jugement » ce qui fut connivence avec l'ennemi, ce qui reste « trahison permanente». Ainsi, même les objections de détail inspirées d'arrière-pensées inavouables et tardivement formulées par des auxiliaires du stalinisme servent à escamoter l'essentiel et à conférer un aspect de respectabilité aux amis de l'ennemi, aux «sansscrupules conscients» que Léon Bl?Jll ~ pu définir comme membres d'un «parti nationaliste étranger», mais d'un parti mortellement hostile aux valeurs de civilisation pour lesquelles· ont péri les volontaires de la vraie Résistance. Le Monde, sur qui s'alignent tant de journaux sans boussole, ne se borne pas à faire écho à la propagande communiste et à l' «école sta.µruenne de falsification» historique dont elle s'alimente : il y contribue par des apports _propres (c'est-~- dire malpropr~s). -qne anth,olog~ede ses co~~: butions à la distorsion systematique de la vente - par le parti affiliéau Guépéou exigerait un travail immense et un volume énorme. En attendant qu'un compilateur avisé s'y mette, l'actualité offre deux exemples récents pour illustrer la façon dont ce journal prend part aux malheurs de Clio. L'apologie délirante du déserteur M. Thorez par M. Fauvet, dans le numéro du 19 mai, bat probablement tous les records de servilité envers la version française du stalinisme. Pour y parvenir, il n'a pas fallu moins d'~ me~songe par ligne, en moyenne. Un seul echantillon, ~o~ l'heure, montrera comment. ce. flagorneur ,e~rit l'histoire. Il raconte qu'en Janvier 1923, Lemne aurait dit à Sémard et à Monmousseau : « Il n'y a pas de ~arti comm~ste .en France, ,voulezvous en creer un? » Et il aJoute effrontement : « Ce parti, c'est Maurice Thorez qui devait le fonder.» (En quelle année?) Par chance, q~tité d'impossibilités matérielles et chronologiques démentent ces inventions misérables dont B. Lazitch a fait justice dans Est et Ouest, n° 322 du 1er juin (Lénine était alors confiné à la chambre sous stricte surveillance médicale et ses deux interlocuteurs imaginaires en prison à Paris). Le registre détaillant l'emploi du temps de Lénine, tenu par quatre secrétaires du 21 novembre 1922 au 6 mars 1923, et publié l'an dernier à Moscou, est là pour confondr~ le peu scrupuleux rédacteur du Monde._ Mais me1!1e sans cela, qui donc ayant la momdre connaissance du sujet et un minimum de probité intellec: tuelle pourrait prêter à Lénine des propos aussi stupides qu'ignobles à l'adresse implicite de Loriot, de Rosmer et de Souvarine? Il faut une Ame bien vile pour les forger ainsi de toutes pièces. Quant à la « création », à la « fondation » au Parti par le digne fils du hideux « Père des Bibfioteca Gino Bianco. 191 peuples » (le pleutre dans le placard, cf. Est et Ouest, n° 177, juillet 1957, Le groupe BarbéCélor ), on en reparlera, car cela exigerait de remonter aux quatre lettres envoyées par M. Thorez à Souvarine pour se solidariser avec lui en 1924, et notre Chronique ne dispose que de deux pages. L'autre exemple figure dans le Monde d~ 20 juin qui, sous un titre fracassant sur trois colonnes, annonce que « M. Togliatti lance une bombe »en publiant une lettre d'Antonio Gramsci « protestant contre la persécution des oppositionnels en Russie», en 1926. Un imbécile écrit des imbécillités comme un pommier produit des pommes : cela doit limiter le commentaire: Indiquons simplement que la lettre de Gramsci se trouvait dans les papiers d'Angelo Tasca et a été publiée par Eugenio Reale dans la Corrispon-. denza Socialista en 1958, puis dans les Annalt Feltrinelli en 1962. Elle prouve que Gran1sci était d'accord avec Souvarine au sujet des conséquences fatales de la lutte intestine consécutive à la mort de Lénine : son argumentation coïncide exactement avec celle de Souvarine formulée à la tribune du XIIIe Congrès du P.C. de Russie en mai 1924 (cf. pp. 371-373 du compte rendu sténographique, éd. Krasnaïa Nov, M;osc?u _1924). D'ailleurs tous les membres de l'Executif a cette date étaient du même avis, sauf deux ou trois qui se sont prostitués. Souvarine fut sacrifié 1~ premier pour intimider les autres parce qu'il s'était ingénument exposé aux coups, ,s~s calcul, mais les autres, les prudents, les hes1tants, les temporisateurs, furent tous exclus à leur tour. Ceux qui ne purent rentrer dans leur _pays,~t~- line les « liquida » à sa façon en les faisant penr dans les tortures. On doit souhaiter que puisse bientôt paraî~re l'étude de B. Lazitch sur« le massacre du Conuntem », saisissant nécrologe des victimes de Staline et de ses acolytes genr~P..Togli~t:ti~t M. Tho!ez. L'article Quand Togliatti participait aux crimes de Staline, dans le n° 293 d' Es~ et_Ouest (Pages. extraites de la brochure Togliatti assassino dt communisti, Rome, nov. 1962), donne _déjà 1m:e idée de l'abjection du personnage maintes fois exalté dans le Monde. Togliatti a approuvé le supplice de ses camarades russes et internationaux couvert d'injures Zinoviev et Kamenev conchunn.és à mort, applaudi à l'exécution de Toukhatchevski, de Boukharine, de Bela Kun, de· milliers d'autres, glorifié Staline et Iéjov à chaque tuerie, dénoncé et envoyé à la mort ses plus proches collaborateurs du Comintem. Aussi M. Vaussard (le Monde du 23 août 1955) le voit «de la taille des plus grands, très peu au-dessous de Lénine lui-même ». Peu après le même expert ignare découvrait en Gramsci le « Lénine italien» (7 septembre 1955~, exagération insensée q~ atteste une méconnaissance complète de Gramsci autant que de Lénine. « Et voilà comme on écrit l'histoire. Puis fiez-vous à messieurs les savants»... Mais le dernier mot n'est pas dit.

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