Le Contrat Social - anno VIII - n. 3 - mag.-giu. 1964

QUELQUES LIVRES ques disciples de Marx (entre autres, Kautsky, Boukharine, Hilferding, Sternberg, Grossmann, Bauer) dont les citations, nécessairement fragmentaires, embrouillent l'exposé. Peut-être eût-il mieux valu se borner, dans ce chapitre, à exposer les seules vues de Marx, quitte à consacrer un chapitre spécial au développement ultérieur de la théorie des crises dans le tome II, lequel embrasse dans l'essentiel l'évolution de la théorie économique marxiste après la mort de Karl Marx. Le tome II comprend les chapitres suivants : 12. le ·capitalisme des monopoles ; 13. l'impéria..: lisme ; 14. l'époque du déclin du capitalisme ; 15. l'économie soviétique; 16. l'économie de la période de transition ; I 7. l'économie socialiste ; 18. origines, essor et dépérissement de l'économie politique. Après avoir résumé la théorie de Marx dans le premier tome, l'auteur se propose donc d'exposer dans le second la théorie économique marxiste du xxe siècle, ce qui implique de présenter les thèses de nombreux disciples qui ont enrichi la doctrine initiale en analysant les faits nouve2ux caractéristiques de l'économie contemporaine. Malheureusement, le tome II ne tient pas les promesses du premier. Le 12e chapitre, consacré aux monopoles, reste bon : exposé très complet des modifications apportées par les monopoles à la structure et au fonctionnement du capitalisme concurrentiel du xixe siècle, remarques judicieuses sur les limites des prix de monopole, schémas mettant en relief la formation de taux de profit différents dans le secteur monopolisé et le secteur concurrentiel. L'auteur indique à la fois le frein que_constituent les monopoles pour le progrès technique et l'impulsion qu'ils donnent malgré cela 2.u développement de la productivité du travail. Il souligne qu'ils ne suppriment pas la concurrence, mais qu'ils la reproduisent à une échelle plus élevée. M. Mandel cite d'innombrables économistes contemporains, il puise aux statistiques les plus récentes pour étayer sa propre thèse qui est, pour l'essentiel, celle de R. Hilferding dans son Finanzkapital ; or, dans ce chapitre de 61 pages, cet ouvrage n'est pas cité une seule fois et Hilferding n'a droit qu'à une seule mention (pas même une citation), à propos d'un article publié dans le Berliner Tageblatt en 1926. JI n'est pas plus question de Boukharine, dont L'Economie mondiale et l'lmperialisme (1917) - que l'on appr_ouveou non ses thèses - devrait àbsolunierit figurer dans un traité d'économie marxiste lorsqu'il est question du capitalisme des monopoles. L'étonnement s'accroît au chapitre 13 : «L'impérialisme». Là non plus, nulle trace de Hilferding, de Boukharine, de Sternberg. Quant à Biblioteca Gino Bianco 179 Rosa Luxembourg, l'auteur ne la cite qu'une seule fois, mais non point pour se référer à sa théorie. L'auteur ne mentionne pas non plus des économistes soviétiques des années 20 ( époque où la recherche économique était encore relativement libre en U.R.S.S.) tels que Dvolaïtski, Pavlovitch, Piletski et Motylev. Pareilles omissions sont inadmissibles dans un traité d'économie marxiste au chapitre de l'impérialisme. Dans ce même chapitre, on cherche en vain une subdivision (ou ne serait-ce qu'un bref passage) traitant de l'impérialisme soviétique. Au contraire, les trois dernières pages de ce chapitre sont consacrées au «néo-impérialisme» ou « néocolonialisme » à propos duquel M. Mandel nous apprend (pp. 123-24) que, sous le couvert de l'aide aux pays sous-développés, «l'exploitation du " tiers monde " par les pays impérialistes se poursuit de plus belle »... On croit rêver. Au chapitre suivant, qui traite du déclin du capitalisme, l'auteur met en relief la concentration et la centralis2tion internationales du ~apital, le rétrécissement et le fractionnement du marché mondial, la cartellisation générale de l'industrie. Il décrit la fusion croissante entre l'Etat et les monopoles, derechef sans mentionner Boukharine (père de cette théorie bien plus que Hilferding), avant de présenter l'Etat comme «garant du profit des monopoles ». Or, si l'Etat subit en effet la pression des monopoles, ceux-ci ne sont pas les seuls à peser sur sa politique économique : l'Etat moderne du monde occidental se trouve en permanence sous la pression des groupes ~'intérêts les plus divers et les plus opposés, parmi lesquels les syndicats ouvriers, et plus récemment le syndicalisme agricole, sans parler du patronat non cartellisé (les P.M.E. en France), jouent un rôle souvent très efficace. * ,,.. ,,.. En abordant le problème des crises dans cette phase de déclin du capitalisme, M. Mandel ne semble pas très à l'aise. Il est bien obligé de constater (t. II, p. 189) : L'économie capitaliste de cette phase tend à assurer à la fois à la consommation et à l'investissement une stabilité plus grande qu'à l'époque de la libre concurrence, ou que pendant le premier stade du capitalisme des monopoles ; elle tend vers urie réduction des fluctmitions cycliques qui résulte avant tout de l'intervention croissante de l'Etat dans la vie économique [souligné par M. M:indel]. Cette intervention, l'auteur la voit surtout dans la politique des armements, bien qu'il mentionne aussi ~< la redistribution d'une partie des ressources sociales par l'intermédiaire de l'Etat », en s'efforçant de la minimiser. En dépit des faits, il demeure persuadé (p. 191) que « tout le système n'évolue pas tellement vers la croissance ininterrompue que vers une stagnation à long terme » ( souligné par M. Mandel). Mais comme il voit dans la course

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