100 Bref, dans les années 40 et 50, la politique de Moscou a consisté à réserver à des Russes et autres Européens (surtout Ukrainiens et Biélorusses) certains postes dans l'appareil du Parti et du gouvernement, la liste des postes réservés s'établissant comme suit: 1. le deuxième secrétaire du Parti ; 2. le chef de la section des organes du Parti, de la section spécialeet de la grande majorité des sections économiques du Secrétariat; 3. le ministre de la Sécurité d'Etat (plus tard, président du comité de la Sécurité d'Etat), le ministre des Communications et les chefs des ministères d'une importance locale toute spéciale ; 4. les adjoints à tous les indigènes placés à la tête des sections du Parti et les adjoints à tous les ministères indigènes ; 5. les commandants de la région militaire du Turkestan et des garnisons locales. Aux échelons inférieurs A . L'ÉCHELON DE LA RÉGION, le système de surveillance exercé par les Russes sur l'appareil du Parti ouzbek est similaire à celui exercé à l'échelon de la république : on retrouve des Russes aux mêmes positions-clés (deuxième secrétaire, chef de la secti9n des organes du Parti, chef de la section spéciale, etc.) 29 • Ainsi, en 1945, dans sept des neuf comités régionaux, les deuxièmes secrétaires étaient des Russes, dans le huitième le premier. secrétaire était un Russe, et dans le neuvième seulement (Boukhara) le premier comme le deuxième secrétaires étaient ouzbeks - situation exceptionnelle pour l'Asie centrale. En 1958, cinq années après la mort de Staline, les deuxièmes secrétaires étaient tous des Russes. En 1946, à l'exception d'un seul, tous les chefs des sections organisation-formation étaient des Russes, ainsi que tous les chefs connus des sections spéciales. Nous ne disposons · pas de données sur la fin des années 50 en raison de la répugnance croissante de la presse de Tachkent à publier des informations sur ce chapitre. Une comparaison entre les états de service des deuxièmes secrétaires russes et ceux des premiers secrétaires indigènes peut aider à évaluer leur statut respectif à l'intérieur du Parti. Sur six deuxièmes secrétaires russes successifs (1941-46) du comité régional du Parti à Samarkand, deux avaient été auparavant deuxièmes secrétaires dans d'autres régions et trois autres furent nommés par la suite au secrétariat · du Comité central ouzbek. Quant aux trois premiers secrétaires indigènes successifs, aucun ne pouvait se prévaloir d'un pareil curriculum vitœ ou d'une ancienneté équivalente. Pendant la période considérée (1941-46), Tachkent, la capitale de l'Ouzbékistan, subissait ' 29. Sur la répartition des postes importants du Parti au niveau de la région et du district, ·cf. Rywkin, op. cit., tables 8-18, 20 et 27. Biblioteca Gino Bianco L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE une étroite domination russe. Tous l<:!spremiers secrétaires et la moitié des deuxièmes secrétaires étaient des Russes ou autres Européens, et, à . l'exception de l'administration des cadres, aucun poste important (et seulement quelques postes secondaires) dans le comité urbain du Parti ne fut occupé sans interruption· par des Ouzbeks_. La pénurie de cadres indigènes compétents, qui aurait obligé le Parti à faire appel à des Européens plus qualifiés, ne suffit cependant pas à expliquer pourquoi certains postes-clés ont touto~ été confiés à des Européens, alors que les mdigènes étaient cantonnés dans des postes de pur prestige n'impliquant guère plus que des responsabilités de relations publiques. La vérité, c'est que les cadres européens du Parti, outre leur ~ plus grande efficacité, sont là pour avoir l'œil sur les communistes indigènes, pour prévenir toute tendance nationaliste ou séparatiste. L'essentiel de la structure politique de la région se répercute au niveau du district, y compris l'attribution des postes-clés suivant le critère de la nationalité. Alors que les données concernant les sections organisation-formation et les sections spéciales à ce niveau sont généralement insuffisantes, on sait que le système du deuxième secrétaire est maintenu, quoique de façon moins rigide. Ainsi, sur les vingt et un districts de la région de Samarkand, en 1941-46, sept eurent pour deuxième secrétaire, la plupart du temps, un Russe ou autre Européen, un district eut pour premier secrétaire un Européen pendant les années décisives de la guerre, et seulement deux districts eurent des indigènes aux deux postes. (Les données manquent pour huit districts.) Les trois plus importants districts de la région se conformaient au modèle habituel, alors que dans les trois villes de la région de Samarkand les Européens exerçaient une surveillance renforcée. A Samarkand, des Russes occupaient les postes de premier et deuxième secrétaire du Parti, dirigeaient la majorité des sections du comité urbain et occupaient le poste de premier secrétaire dans deux des trois quartiers de la ville. Ils dirigeaient également la plupart des usines. Dans cinq des sept grandes entreprises, les directeurs furent des Européens pendant toute la période de 1941 à 1946, et dans une autre le directeur fut un Russe la moitié du temps. Sur vingt-trois petites usines, sept furent dirigées constamment par des Européens, cinq la moitié du temps, et seulement six eurent un directeur indigène en permanence. (Les données manquent pour cinq usines.) Des huit trusts sur lesquels nous disposons de renseignements, cinq eurent tout le temps un directeur européen, deux la moitié du temps, et un seul un directeur indigène en permanence. Dans les coopératives d'importance régionale, le rapport était de quatre Européens pour trois indigènes. .Parmi les directeurs des M.T.S. (stations de machines et tracteurs) eux-mêmes, les Russes
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