M. RYWKIN effectifs, la proportion des Kirghizes, Turkmènes et autres groupes indigènes pris ensemble étant encore moindre 4 • ~nscie~t _del'étendue de la révolte, le KremUn pnt. une. sene de mesures pour en venir à bout. En Janvier 1922 fut créée une commission dictatoriale extraordinaire pour les affaires de Boukhara-:Est, avec pleins pouvoirs dans ce secteur principal foyer de l'agitation ; elle fonctionn~ jusqu'en 1924. Simultanément, une commission spéciale d? Comité.cen~ du P.C. russe, comprenant ~t~e, !chitch 7nn~ et Kouibychev, fut chargee d etudier la situation. En mai 1922, un bureau pour l'Asie centrale du C.C. du P.C. russe reçut mission de coordonner l'action des partis communistes du Turkestan, de Boukhara et de Khiva...Des bolchéviks de premier plan, t~ls que Kowbychev, Roudzoutak et Ordjonikidzé, furent envoyés l'un après l'autre pour se -rendrecompte sur place. S. S. Kamenev, commandant en chef de l'Armée rouge, prit en main les opérations militaires ; l'aviation russe et les troupes fraîches affluèrent. En même temps d'importantes concessions étaient faites aux indi~ gènes : rétablissement temporaire des tribunaux musulmans «kazi » dans certains secteurs, réduction des impôts, distribution de vivres à la population 5 • Cette combinaison de mesures militaires et politiques - ainsi que l'isolement de l'Asie centrale par rapport au monde non communiste ___,f;init par déterminer l'issue de la lutte. En 1925, le Tadjikistan, centre de la révolte basmatchi, n'était plus que ruines. Plus de 200.000 habitants avaient fui en Afghanistan, abandonnant les deux tiers des terres cultivées. Les paysans musulmans demeurés sur place se lassaient de plus en plus de cette guerre sans espoir, et en 1926 la révolte nationaliste en était réduite à .des activités de guérilla devant la· cavalerie russe qui ,~e!lait des ?pérations ·de nettoy!lge et des ex~dition! pum~ves contre les villages qui osai~nt preter assistance aux rebelles. Quelques survivants des unités basmatchi, réduites à de petits groupes isolés, combattirent jusqu'en 1933. Alors, enfin, la pax sooietica régna dans la région. . L~s cadres communisJes ·~usulmans, presque mexistants pendant la revolutton, souvent nationalistes pendant la révolte basmatch et hésitants pendant la collectivisation, finirent par prendre quelque aplomb au début des années 30. Assu4. A. Briskine : Le Pays des Tadjiks, Moscou-Léningrad 1930, J?P• 37-38; ainsi que Le Deuxième Congrès panouzbek · des soviets, Tachkent 1927, p. 131. S· M. lrkaiev, V. Nikolaïev, la. Schapirov : Précis d'histoire du Tadjikistan soviétique (1917-1957), Stalinabad 1957, pp. 77-79; Le Deuxième Congrès..., oP• cit., pp. 21, SI et 53; Ch. Ourazaiev : La R4publique autonome du Turkestan et sa personnalité politico-furidique, Tachkent 1958, op. 146-47; T. Kh. Keldiev : La Débdcle de la contre-révolution dans les régions du Ferghana et de ~amarkand (19181.923), Tachkent 1959 ; S. B. Ginsburg : « Le mouvement t>asmatch au Ferghana ", in Orient nouveau, 1925, n° 10-11. Biblioteca Gino Bianco 97 rance qui devait être bientôt ébranlée. Entre 1930 et 1940, sept épurations successives élimi- · nèrent presque tous les membres musulmans du Parti. Parmi les «liquidés », des dizaines de « gros bonnets » du Parti et du gouvernement, ajnsi qu'un grand nombre de moindres fonctionnaires 6 • ~u cours de l'épuration de 1937, plus des deµx tiers de tous les fonctionnaires régionaux du Parti furent limogés 7 • Quand la tempête s'apaisa, l' «appareil» indigène était devenu faible, terrorisé et encore plus dépendant de l'aide russe que Moscou ne l'eût désiré. Collectivisation, industrialisation et enseignement LA PREMIÈRE GRANDE INITIATIVEdu Kremlin en Asie centrale après l'écrasement de la révolte basmatch fut la collectivisation de l'agriculture. Alors que les premières réformes concernant la terre et l'irrigation (1921 et 1925-27) avaient été bien accueillies par les paysans et les nomades, la collectivisation, elle, rencontra une forte résistance. Conséquence directe de cette opposition, le cheptel du Kazakhstan tomba en 1932-33 à 14 °/4 par rapport au niveau de 1929, et à 20 % dans les quatre autres Républiques 8 • Le rendem':nt du blé à l'hectare tomba de 5,7-6,3 à 4-4,4 qumtaux en 1931-32 9 • Des centaines de communistes indigènes furent chassés pour «mollesse » ou «_nég~gence », beau~oup furent exécutés pour «nationalisme bourgeois » - autrement dit pour s'être opposés à la collectivisation forcée. A la fin des années 30, la quasi-totalité des terres étaient collectivisées, et en 1960 le cheptel de la région n'avait toujours pas atteint le niveau d'avant la collectivisation 10 • B!en que _Lénine ait condamné la politique tsanste consistant à transformer le Turkestan .en un «appendice cotonnier de la Russie », le régime soviétique n'en a pas moins fait de même, avec la méthode qui le caractérise. Faïzoulla 6. ~riskine, op. . cit., pp. 44-46 ; Le Deuxième Congrès..., loc. cit. ,· Le Premier Congrès panouzbek des soviets. Compte rendu sténographique, Tachkent 1925, p. 77. 7. Parmi les liquidés, il convient de nommer: N. Maksoum (193~) _et Chotemar. (1937), présidents de la République du TadJikistan; KhodJaïev et Rakhlmbaïev (1937), présidents . du Conseil du Tadjikistan; Ou. Koulambetov (1935), et Ou. lssaïev (1938), présidents du Conseil du Kazakhstan; I. Abrakhamov, président du Conseil de Kirghizie; Faïzoulla Khodjaïev (1937), ancien chef du gouvernement de la République populaire de Boukhara en 1922-24 et président du Conseil des commissaires du peuple d'Ouzbékistan e~tre 1924 et 1937; Akmal Ikramov (1937), premier secrétaire ~u P. C. ouzbek; T. Ryskoulov, vice-président du Conseil de la R.S.F.S.R. et ex-président du Conseil du Turkestan. Sur les résultats de l'épuration de 1937 cf. Vincent Monteil : « Essai sur l'Islam en U.R.S.S. ", in Revue des études islamiques, vol. XX (1952), pp. 57-58. 8. Sur les sources utilisées, cf. notre : Russia in Central Asia, New York (Collier Books) et Londres (Collier-Macmillan), 1963, p. 64. 9. Ibid. 10. Ibid., p. 68.
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