Le Contrat Social - anno VII - n. 6 - nov.-dic. 1963

A. DE TOCQUEVILLE en bon état et à laquelle on donne le privilège de prélever sur ledit parcours des droits dont le maximum est fixé. Ces individus se réunissent et choisissent un agent matériel qu'on nomme the surveyorof the road. Ils le dirigent et l'inspectent. En général, ce corps a le droit de se recruter de lui-même, mais à la place du membre qui cesse ses fonctions, il faut choisir un individu résidant dans la même portion de route. C'est une condition nécessaire de l'éligibilité. Ces hommes se nomment trustees._ D. - Sont-ils forcés d'accepter ces fonctions ? . R. - Non. D. - Sont-elles payées directement ou indirectement? \ R. - Non. Les droits (tolls) ne doivent être calculés que pour couvrir les frais d'entretien de la route. S'ils excèdent les besoins, ils doivent être baissés. Mais on s'arrange en général pour qu'ils n'excèdent pas les besoins. D. - Est-ce qu'on trouve un grand nombre d'individus qui se prêtent volontiers à accepter ces fonctions ? R. - Oui. Ces petites occupations publiques remplissent l'existence de la plupart de nos petits propriétaires et leur donnent une certaine importance dans leur canton qui leur plaît. D. - J'en arrive toujours à la grande question, cellede savoir comment on peut forcer les paroisses à entretenir leurs chemins communaux et les trustees à tenir leur route en bon état. · R. - Je ferai ici la même réponse que j'ai déjà faite à toutes les demandes analogues. C'est sur l'intérêt particulier que la loi s'en repose presque toujours. Prenons d'abord le cas de la paroisse: chaque paroisse nomme un surveyor of the road qui a le droit de lever dans la paroisse l'argent nécessaire pour entretenir les chemins (je vous ai expliqué que ceux qui croiraient cette levée d'argent excessive ou arbitraire ont un recours aux tribunaux). Maintenant, tous les individus de la paroisse et l'homme quelconque qui souffre du mauvais état de la route, par exemple le voyageur qui y casse sa voiture, ont le droit d'actionner et de demander des dommages-intérêts au surveyor. Le surveyor ainsi menacé a intérêt à user de son droit de taxer les habitants pour cet objet et il n'abuse pas de ce droit parce que les habitants o~t, à leur tour, le droit de résister à une taxe excessive ou mal répartie. Passons maintenant au cas des trustees : le même système se retrouve. Les trustees se sont engagés moyennant une certaine redevance à tenir une portion de route e:Qt.rès ~on état. Tout Biblioteca Gino Bianco 357 homme qui aperçoit qu'ils ne remplissent ~as leurs obligations, peut les actionner et les faire condamner à l'amende. Le grand jury, à défaut des particuliers, peut exercer ce droit et l'exerce souvent. D. - Tout cela est très ingénieux. Mais je crois que le succès d'un semblable système ne peut s'obtenir qu'à la longue et tient en partie à des habitudes et à un état de civilisation qu'il ne concourt pas seul à créer. Vos_paroisses sont presque toujours habitées par un certain nombre de particuliers .aisés ayant chevaux et voiture. La masse de la population y est assez éclairée pour sentir l'utilité pratique et l'agrément des bons chemins. Dans une pareille paroisse, il est naturel qu'on attende de grands résultats des travaux du surveyor et qu'on l'attaque volontiers, s'il ne remplit pas bien et complètement sa tâche. Non seulement l'intérêt particulier est armé du pouvoir de créer un bien général, mais il a la volonté d'agir. La même remarque est applicable aux grandes routes. Peut-être dans un pays encore peu éclairé, peu riche, peu avancé, serait-il difficile d'obtenir le concours qui vous suffit : l'Angleterre elle-même, il y a 80 ans, avait, dit-on, des chemins détestables. Je reconnais, du reste, qu'à la longue votre système est infiniment préférable au nôtre. Il est de plus des avantages tout politiques que je n'ai pas le temps d'énumérer. Pour faire un ensemble de ces notions, je crois devoir joindre ici ce que j'ai réuni de différents côtés, sur le shériff et le lieutenant gouverneur des comtés. Tous les deux sont nommés, je crois, par le roi et le représentent jusqu'à un certain point dans le comté. L~ lieutenant gouve1:1~ur présente les juges de paix, commande la milice. Ses fonctions se réduisent, je crois, à très peu de chose. Celles du shériff sont très importfntes, mais elles ne le font presque pas dépendre du rcuvoir central. C'est lui qui, en général, reçoit les writs de convocation pour le parlement et qui préside les élections du comté. Je crois qu'il fournit la liste des jurés pour les quarter sessions et les cours de circuit. Il est l'exécuteur de tous les arrêts de justice dans le comté. L'exécution de ses devoirs comme pour les autres fonctionnâires publics est assurêe, je crois, par l'action des individus lésés devant les tribunaux. Je ne sais quels sont ceux compétents. La place du shériff qiµ ne dure qu'un an est ambiticnnée par les plus riches propriétaires parce qu'elle donne un commencement de position publique dans le comté, le shériff étant le seul fonctionnaire un peu central. ALEXIS DE TOCQUEVILLE,

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