256 violations de la frontière soviétique à partir du temtorre chinois » ont eu lieu depuis 1960. La politique de Mao, y lit-on, est « une trahison envers le socialisme mondial, envers le mouvement de libération nationale, envers la cause de la révolution mondiale». Néanmoins, « l'arrêt de la polémique entre les deux gouvernements et les deux partis demeure toujours actuel ». Et en conclusion, si les Chinois continuent, « ils se heurteront à la riposte la plus décisive». Or les Chinois continuent, sans rien provoquer de «décisif». Un troisième article-fleuve (30.000 mots) paraît le 26 septembre, injurieux au possible : « Khrouchtchev a abandonné le marxismeléninisme (...) et se vautre dans la fange avec la clique rénégate de Tito, en totale violation des intérêts de l'Union soviétique, du peuple soviétique et des peuples du monde entier.» On répugne à citer des méchancetés de ce niveau intellectuel, même en abrégeant au maximum. Mentionnons pour mémoire l'éditorial (40 pages) du Kommounist de Moscou (n° 15, d'octobre) qui juge toute la plate-forme du communisme chinois décidément « incompatible avec le marxismeléninisme et étranger à la ligne générale du mouvement communiste international». Puis l'article d'Hélène Stassova dans.les Izvestia du 13 octobre, assimilant les thèses chinoises au « trotskisme ». Puis le quatrième article-fleuve (17.000 idéogrammes) publié à Pékin le 21 octobre, qui accuse Khrouchtchev d'être « au service du néo-colonialisme impérialiste » et d'avoir « liquidé la politique étrangère de ·1a révolution d'Octobre ». Le Kommounist (n° 16, de novembre) flétrit « l'anticommunisme » des Chinois qui tentent « de remplacer le léninisme par le maoïsme » et se livrent à « une véritable croisade contre les assisesmêmes du marxisme-léninisme». On voit que les antagonistes se répètent à l'infini en puisant au même vocabulaire dépourvu désormais de signification authentique. MALGRÉ tout ce qui réduit à néant l'idéologie de façade masquant un conflit d'intérêts et d'individus sous le nom de marxismeléninisme, la fiction prévaut sur la réalité en Occident où les milieux officielsou influents, sauf rares exceptions, prennent très au sérieux les allégations intéressées qui veulent définir l'orthodoxie et le révisionnisme dans la logomachie communiste actuelle. Quantité de gros ouvrages paraissent sur ce sujet, qui n'arrivent jusqu'à nous que sous forme de compte-rendus sommaires et qu'en outre peu de privilégiés auraient le loisir de lire. On discutera-succinctement ici d'autant plus volontiers l'article de Z. Brzezinski: Threat and oppor!unity in. t~e Co"!munist schism 2 , qui expose au nueux les 1deesprevalentes avec le mérite de la clarté et de la brièveté dans une matière ingrate. 2. For_eignA_ffairs, avril 1963. Notr~ revu·e a publié, de Z. Brzezmski. : « Coup d'œil sur la Pologne », vol. I n° 5 novembre 1957. ' ' Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL M. Brzezinski admet l'existence d'un communisme orthodoxe et d'un communisme révision- _ niste, ainsi que celle d'une idéologiequi «embrasse - 40 % de la population du monde »(consentante ?). Il convient pourtant que le communisme de Stalin~- était du «national-communisme »(donc une variété de nazisme ?). Il croit que les leaders soviétiques sont sincères en pensant que la supériorité écono~ mique fera « pencher la balance de l'histoire » (quid de la primauté américaine sous ce rapport, jusqu'à -présent ?). Il préconise « d'encourager !'U.R.S.S. à se réconcilier avec l'Occident» (encourager comment ?), tout en repoussant à juste titre la notion à la mode, chère aux Polonais et aux Yougoslaves, qui identifie Khrouchtchev au maintien de la paix. Il juge possible « d'attirer et absorber graduellement le communisme révisionniste dans le monde occidental » : les « forces de modération comme celles de Pologne et de Hongrie sont à encourager par de l'aide et des contacts plus étroits». Quant à la Chine, opine l'auteur avec raison, inutile de lui faire la cour, la meilleure politique étant de la laisser à son sort. La thèse découle donc de prémisses impliquant l'orthodoxie et le révisionnisme comme politiques distinctes, divergentes et désormais incompatibles : il vaut la peine de les examiner. Si la coexistence pacifique tient lieu de critère, les Chinois prétendent l'avoir inventée (les cinq principes de Colombo, les dix de Bandung), alors qu'elle est en vérité l'invention de Staline, comme nos articles précédents l'ont prouvé ( cf. entre autres Le spectre jaune, numéro de mars-avril 1962). On ne compte plus les professions de foi chinoises, maintes fois citées ici, dans le même sens. La théorie de Lénine sur l'impérialisme et la guerre a été révisée par la voix de Khrouchtchev en 1956 avec l'approbation de Mao, lequel ne l'a dogmatisée, en paroles, qu'en avril 1960, sans cesser de se contredire : son tigre de papier a pris l'allure d'une métaphore plutôt rassurante. Quant aux actes, ce sont les Russes, non les Chinois, qui créent de toutes pièces des risques de casus belli à Berlin et à Cuba, qui arment jusqu'aux dents les Etats musulmans contre Israël, menacent l'Iran, soutiennent les agressions de Nasser contre les royaumes arabes. Si l'attitude envers le titisme ou la « voie yougoslave» sert de pierre de touche, c'est Khrouchtchev qui a écrit en 1949 : «La trahison envers l'Union soviétique, envers l'internationalisme prolétarien, conduit nécessairement dans le camp <l:u~ationaJ.ïs~e,du fascisme, de la réaction impér1~ste .. Tem~m la ~ande d'assassins et d'espions T1to-Rankov1tchqw a consommé son passage du nationalisme au fascisme et est devenue l'agence directe de l'impérialisme... » L'assassin, espion et «renégat» Tito redevient camarade en 1955 pour Mao comme pour Khrouchtchev. L'ambassadeur chinois à Belgrade apporte à Tito en juin 1955 des cadeaux personnels de Mao. Celui-ci salue en 1956 « la normalisation des rapports avec la Yo~goslavie» et, en 1957, envoie un télégramme à Tito pour lui souhaiter de nouveaux succès dans « l'édification du socialisme ». Au VIIIe Congrès
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