298 totale, recevront des « pouvoirs considérables » dans des domaines allant de la recherche en matière de technologie à la commercialisationt des produits ; ces « combinats socialistes» seron chargés de la mission de confiance qui consiste à « exécuter le plan de façon créatrice». Quatre de ces V.V.B. procèdent déjà à des expériences pour déterminer les effets pratiques d'une plus grande autonomie sur la production, les ventes, la rentabilité, etc. Dans l'agriculture également, le régime espère que le principe d'intérêt matériel amènera quelque amélioration. Il propose, par exemple, de supprimer des subsides agricoles préjudiciables à l'économie, dont le besoin était né, pour une large part, de l'abandon du principe de la rentabilité, certaines nécessités psychologiques mises à part. Le système de fixation arbitraire des prix des produits agricoles sera remanié afin de mieux l'adapter au concept de la rentabilité. A entendre Ulbricht exposer ces plans au vie Congrès du Parti, on pouvait avoir l'impression que le grand patron s'orientait, au moins quant à sa politique économique, vers le camp des « révisionnistes» tant détestés. En réalité, il ne faisait que s'aligner sur le dernier modèle soviétique, comme l'a démontré la réorganisation totale de l'administration du Parti et de l'économie sur la base du « principe de production» (c'est-àdire la séparation de l'industrie et de l'agriculture 5 ). L'échec patent de la politique économique d'Ulbricht 6 a eu, de plus, un effet néfaste s~ tous les. autres pays «socialistes» d'Europe onentale, et il est probable que le Comecon, qui depuis un certain temps a cessé de tenir pour taboues telles théories relatives au cc marché libre », a exercé des pressions qui ont eu quelque influence sur le. revirement du chef du gouvernement de Pankow. Comment expliquer autrement qu'Ulbricht, du moins en apparence, se soit approprié les vues des technocrates qui le critiquaient de longue date ? . Autre imitation significative·de l'exemple soviéaque, le vie Congrès a, pour la première fois, accordé aux économistes une représentation digne de ce nom au Politburo. Outre le nouveau chef de la Commission d'Etat pour la planification, le Dr Erich Apel, qui avait été nommé membre suppl~t dll:Politburo dès 1961, les experts éconormstes swvants sont devenus suppléants : Günter Mittag, secrétaire du Comité central ; Herbert Jarowinski et l'agronome Margarete Müller. (Le professeur Karl-Heinz Bartsch, expert agricole, fuJ également nommé suppléant, mais dut bientôt 5. La réorganisation prévoyait l'établissement de conseils industriels et agricoles distincts à chaque échelon administratif. Le même dualisme est introduit dans l'organisation du Parti, où des services distincts ont été installés pour l'industrie et l'agriculture à tous les niveaux; depuis le Politburo jusqu'au quartier général local du Parti. 6. La baisse du taux d'accroissement industriel (12,4 % , en 1959: ~ %. ~n ~96o, 6,2 % en 1961) est la preuve de cet échec. A uJourd hw, ce taux est parmi les plus bas de ceux du bloc soviétique d'Europe orientale. Biblioteca Gino Bianco·- L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE donner sa démission lorsqu'on eut découvert ses attaches passées avec les nazis.) Le gouvernement Ulbricht - composé presque · exclusivement d' apparatchiki typiques du Parti, dépourvus de formation professionnelle - a accordé de mauvaise grâce à ces experts une place au Politburo en ne les y admettant qu'à titre de suppléants. Réduits au rôle de simples conseillers, il leur manque, de toute façon, la base de pouvoir qui leur permettrait de s'opposer avec succès à Ulbricht. Celui-ci s'en tient toujours à son style typiquement stalinien en matière d'administration économique, comme en témoigne la création, en mai dernier, d'un « corps d'inspecteurs ouvriers et paysans» : sous l'égide de ce dernier, une phalange de fonctionnaires dotés de pouvoirs extraordinaires va surveiller l'économie afin de prévenir la mauvaise gestion et les «violations de la discipline d'Etat», avec l'aide du pr~cureur d'Etat, si nécessaire. Il semble donc qu'Ulbricht n'ait aucunement l'intention de lâcher la bride au sens des responsabilités et à l'intérêt matériel personnel des entités économiques à l'échelon inférieur, que ce soit dans le domaine économique ou dans le domaine psychologique. Le pouvoir total concentré dans ses mains empêche Ulbricht d'en accepter la limitation, de même qu'il lui interdit de renoncer à s'ingérer dans le fonctionnement de l'appareil économique. Quelques mois à peine après l'apparente réorientation, au vie Congrès, de la politique économique, les méthodes habituelles de contrôle et de contrainte reprennent le dessus, une fois de plus. Les efforts des économistes réformistes pour résoudre les problèmes par des me~~res de caractère éco~omique et non plus politique - façon de proceder qu'Ulbricht semblait préférer lors du Congrès - ont ainsi été, pour une bonne part, réduits à néant. Sur le « front cu_lturel » DANSpresque tous les domaines, sauf celui de l'économie, le gouvernement a resserré son contrôle, après le léger relâchement de 1962. Vis-à-vis de l'intelligentsia artistique et littéraire, le régime a repris la position rigide caractéristique des_années postéFieures à 19~7. A part quelques maigres concessions accordees après 1960 et presque aussitôt retirées, cette rigidité s'est maintenue jusqu'au début de l'année dernière. A ce moment, le «dégel» culturel accéléré en Union soviétique semble avoir insufflé un nouveau courage à- certains artistes, à certains écrivains et même _à la !édaction de plusieurs publications. Des voix touJours plus nombreuses se sont jointes à celle de Heinz Kahlau, disciple de Brecht, pour lequel le peuple était à présent « assez fort socialement » pour qu'on puisse rapporter les mesures restrictives, cc précautions, réserves, thèses, tabous et autres», pour qu'on donne aux jeunes l'occasion de « rechercher la vérité de façon indépendante » 7. 7. Sonntag, 1er juillet 1962.
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