J. R. AZRAEL la religion et les Eglises. Les membres des sectes ont en effet été qualifiés d' « ennemis objectifs» du régime, et bien que cette accusation n'ait pas été étendue aux autres fidèles, d'ores et déjà tous les « ministres chrétiens et musulmans», tous les croyants dévots au point d'observer les jednes, ont été qualifiés de « parasites » malveillants. Enfin, l'emploi accru de la coercition dans le secteur agricole est lié à la prémisse idéologique suivant laquelle le communisme signifie la fin de toute propriété privée. Certes, le Kremlin prétend qu'on usera de la seule persuasion pour amener les gens à renoncer à leurs biens, mais les moyens employés dans la pratique permettent d'en douter; en théorie même, la collectivisation rapide continue d'être citée dans les écrits sovié- ~ques comme un excellent exemple de « persuasion». * ,,. ,,. MALGRÉ le regain de ces dernières années, le niveau de la coercition n'a assurément pas atteint les sommets de l'ère stalinienne. Beaucoup prétendent que l'évolution économique et socialerend impossible un « retour au stalinisme », mais il y a de bonnes raisons de rester sceptique. Qu'il suffisede rappeler l'exemple de l'Allemagne nazie : ni la « maturité industrielle » ni un peuple des plus cultivé ne constituent des garanties contre un système politique terroriste. Sans compter qu'en Russie soviétique, comme le montre la mise en œuvre des grands programmes de Khrouchtchev malgré l'opposition de certains technocrates, la force de résistance de la « nouvelle classe» .est bien limitée. Il n'y a pas de barrières institutionnelles contre un << retour au stalinisme». Le procureur général de !'U.R.S.S. Biblioteca Gino Bianco 115 a prétendu que la Constitution et la juridiction offrent des « garanties » contre pareil retour, mais il suffit de rappeler les diverses « garanties » contenues dans la « Constitution stalinienne » (toujours en vigueur) pour voir combien l'argument est spécieux. Chélépine, le chef de la police, a fait preuve de plus de réalisme en affirmant au XXl8 Congrès que « cette histoire abominable (...) ne se reproduira jamais », car « le Parti et le Comité central ne le toléreront pas». Les intentions des dirigeants sont aujourd'hui et demeureront, au moins pour un temps, le facteur-clé quant à la coercition dans la société soviétique. Ayant consolidé leur position, les dirigeants ont accru la contrainte et paraissent vouloir continuer en ce sens. Il est cependant peu vraisemblable qu'ils veuillent la pousser jusqu'aux limites atteintes par Staline. Non pas que le régime actuel soit moins désireux que Staline de s'assurer l'emprise totale sur la population : il est simplement moins paranoïaque ; il a en main des moyens de surveillance plus subtils dus à la réussite de l'industrialisation; et, grâce en partie à l'endoctrinement massif (contrainte intellectuelle) des quarante-cinq dernières années ainsi qu'au relâchement de la terreur sans frein, il peut compter sur un accueil plus favorable à sa politique, même si celle-ci ne fait que renforcer le règne totalitaire. L'Union soviétique est encore bien loin d'un totalitarisme « unanime »ou « populaire» dans lequel la contrainte extérieure serait inutile en raison du caractère totalitaire des mœurs. Elle n'en est pas moins aussi éloignée - en réalité plus éloignée - d'une démocratie constitutionnelle. JEREMY R. AzRAEL. {Traduit de l'anglais)
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