Le Contrat Social - anno VI - n. 6 - nov.-dic. 1962

LB CONTRAT SOCIAL maintes reprises - du bouton de guêtre aux pantalons rouges et de l'affaire de Suez à la triste farce de la guerre révolutionnaire - elle l'a été en matière militaire. Les mauvais effets de notre insuffisance théorique tendent d'ailleurs à fortifier notre ignorance : car l'homme d'action puise une doctrine dans l'arsenal de la théorie, l'adapte aux circonstances, la met en œuvre. Et comme elle ne donne pas les résultats escomptés, il en déduit que toute théorie est une chimère. Au lieu de pousser à la constitution d'une théorie mieux étudiée, il est tenté de se livrer au génie de l'improvisation (au mauvais génie de l'improvisation), et à l'occasion, parce que c'est la solution la plus facile, il répétera une expérience qui a toujours donné de mauvais résultats, en se berçant de l'illusion que la torche du passé a cessé d'illuminer le présent. Sans doute la France de 1962 n'est pas celle de 1848. Mais ce qui fait, de notre point de vue, le principal intérêt des objections de M. Michel Debré, c'est qu'elles posent un problème théorique. Sa thèse est en effet qu'une matière sociale différente exige une forme politique différente. Or il est bien certain qu'il existe une relation entre l'état d'une société et sa structure politique. Aristote l'affirmait, et Machiavel a donné à cette relation une importance qui est généralement méconnue. Nous ne pouvons songer à traiter aujourd'hui ce problème, mais nous y reviendrons prochainement, et nous tenterons sinon de le résoudre, du moins de le définir. Yves Lévy. Commentaires Quarante ans après la condamnation à mort de Sacco et Vanzetti, leur célèbre« affaire» a suscité de nouveaux commentaires et de nouvelles études aux Etats-Unis. Dans notre numéro de novembre-décembre 1961, une Chronique résumait aussi objectivement que possible un article de Max Eastman, également aussi objectif que possible. Cela nous a valu une lettre d'André· Prudhommeaux (cf. notre numéro de mars-avril 1962) conseillant à Max Eastman « de faire, à ce propos, retour sur lui-même ». Ce qui s'appelle se tromper d'adresse, car si quelqu'un n'a pas eu besoin de ce conseil, c'est bien Max Eastman, pour les raisons dites dans notre Chronique. Depuis, un nouveau livre a paru, traitant de l'affaire Sacco-Vanzetti : Tragedy in Dedham, par Francis Russell (Mc Graw-Hill, 478 pp.), qui enrichit la bibliographie dont nous avons donné une idée. L'auteur conclut comme Upton Sinclair, comme Carlo Tresca, comme Max Eastman, à la culpabilité de Sacco et à l'innocence de Vanzetti. Son livre a provoqué une lettre d'un Italien publiée dans le New York Times en aoftt dernier (le texte et la date exacte nous manquent) et laissant entendre que toute la vérité ne tardera pas à voir le jour, innocentant les deux anarchistes. Dans Commentary, de New York, numéro de janvier 1962, un article de James Grossman : The Sacco-Vanzetti Case reconsidered va dans le sens du livre de F. Russell. La réplique lui a été donnée, même revue, numéro de septembre dernier, par un juge de Pennsylvania, Michael Musmanno, suivie d'une réponse de J. Grossmann. Attendons la suite. A propo• d' " Un exemple d'engagement » Dam M,diatiom, n° s, M. J.-P. Faye nous a fait l'honneur de nous citer dix fois sa~ préciser où a Biblioteca Gino Bianco 381 été publié l'article dans lequel nous cr1uquions sa traduction des écrits politiques de Martin Heidegger 1 • On découvre cependant cette référence dans une note de la rédaction en fin de livraison, note que rien ne signale dans le texte de M. Faye. M. Faye «regrette » pour nous que le dictionnaire de Berteaux et Lepointe ne donne pas d'autre traduction pour volkisch que celle que nous lui avons reprochée (i.e.« raciste»), ce que nous avons déjà mentionné 2 • Nous le regrettons, quant à nous, pour ce dictionnaire. Se fierait-on à sa seule autorité, il s'ensuivrait que ni M. Eric Weil, philosophe français d'origine allemande, ni W. Shirer, historien du nazisme, ne connaissent la langue germanique puisqu'ils ont admis d'autres traductions. Nous n'allons pas exposer de nouveau les raisons pour lesquelles l'une ou l'autre de ces traductions, dans le cas litigieux, s'imposait plutôt que celle de M. Faye. Notre intervention n'aura pas été inutile puisqu'elle a incité M. Faye à divulguer les attaques hitlériennes contre Heidegger après les péchés non moins hitlériens de ce philosophe. Mais cela ne nous contente qu'à demi : nous sommes aussi peu enclin à blanchir qu'à noircir les uns ou les autres. La rédaction de Médiations s'étonne que nous ayons pu mêler Staline à cette affaire où, selon elle, il n'aurait dft être question que d'Hitler. En la remerciant d'avoir donné à son lecteur le moyen de se reporter à notre texte, nous l'y renvoyons pour information. Nous y traitions du problème général de l' « engagement » et le cas de Heidegger n'intervenait qu'à titre d'exemple. Au demeurant, rien de plus logique que d'évoquer Staline quand on parle d'Hitler. Aimé Patri. Livres reçus - PIERRENAVILLE: Trotsky vivant. Paris 1962, Julliard, éd. (Dossiers des Lettres nouvelles), 198 pp. - ALBERTMEISTER: Principes et tendances de la planification rurale en Israël. Paris-La Haye 1962, Mouton et Co, 148 pp. - Marxismusstudien. Tübingen 1960, J. C. B. Mohr (Paul Siebeck), Schriften der Evangelischen Studiengemeinschaft, 221 pp. - JOSEPHGABEL: La Fausse Conscience. Essai sur la réification. Paris 1962, les Editions de minuit, 264 pp. - KosTAS PAPAIOANNO:U Hegel. Paris 1962, Ed. Seghers, 206 pp. - LAZARPISTRAK: Khruschtschow unter . Stalin. Stuttgart 1962, Deutsche Verlags-Anstalt, 342 pp. - ROBERTS. LOPEZ: Naissance de l'Europe. Paris 1962, Libr. Armand Collin, 488 pp., planches, figures, cartes. - La Menace communiste sur le monde. 28 Congrès international de la Conférence sur la guerre politique des Soviets, 18-22 novembre 1961, Rome, 2 vol. - ROBERTAMAoou et ALICBJOLY: De l'Agent inconnu au Philosophe inconnu. Paris 196.2, Ed. Denoël, 262 pp. - Rapport sur les méthodes de colonialisme communiste en Europe centrale et orientale. Conseil de l'Europe, Assemblée consultative, 17 septembre 1962, 32 pp. 1. Contrat social, janv.-f~v. 1962, p. 37. 2. Ibid., mara-avril 1962, p. 128.

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