312 . vos soudaines références à la coexistence pacifique ? », il répond : « Ce n'est rien de nouveau. Nous avons toujours été en faveur de la coexistence pacifique. Toute idée du contraire ne vient que de la presse occidentale. Les Américains disent qu'ils ne veulent pas la guerre, les Anglais disent qu'ils ne veulent pas la guerre, les Français disent qu'ils ne veulent pas la guerre. Même si nous voulions combattre, qui pourrions-nous combattre ? » (Time du 3 août 1962). En septembre dernier, le Comité central du parti communiste chinois adoptait une résolution que le communiqué officiel résume en ces termes : « ••• Développer, conformément aux principes de l'internationalisme prolétarien, les rapports d'amitié, d'assistance mutuelle et de coopération avec l'Union soviétique et les autres pays frères socialistes ; faire prévaloir, sur la base des Cinq principes, la coexistence·pacifique avec les pays de régime social différent et combattre la politique impérialiste d'agression et de guerre», etc. Plus loin : « Nous devons continuer (...) à défendre les principes révolutionnaires des Déclarations de Moscou de 1957 et 1960, à combattre sans défaillance le révisionnisme moderne, danger principal pour le mouvement communiste international (...) ; nous devons en même temps combattre sans défaillance le dogmatisme, le sectarisme, le chauvinisme de grande puissance (...); en bref, nous devons lutter pour préserver la pureté du marxisme-léninisme » (la Nouvelle Revue internationale, de novembre 1962). Abstraction faite du verbiage, de redondances abrégées ici, les affirmations relatives à la coexistence pacifique, aux Déclarations de Moscou, au révisionnisme, au dogmatisme, au marxismeléninisme, sont les mêmes que chez Khrouchtchev. Cependant l'éditorial de la revue citée, organe officiel du communisme, réplique en son jargon : « Sans doute, en paroles et en principe, les dogmatiques ne sont-ils pas, eux non plus, contre la lutte pour la· paix, contre la coexistence pacifique, et parfois même ils reconnaissent dans l'abstrait que ces revendications peuvent être satisfaites. Mais qu'on en vienne à parler des tâches concrètes qu'on ne peut négliger · sans gue la lutte pour la paix ne devienne du vent (...), voilà les dogmatiques qui se mettent à gémir sur l'abandon des principes, à lancer des accusations de lâcheté devant l'impérialisme sinon de renonciation à la révolution. Mais dans le même temps, ils n'apportent et ne peuvent apporter aucune contre-proposition pratique véritablement réalisable. Tout ce qu'ils demandent, ce sont des discours condamnant l'impérialisme » (ibid.). Il ne s'agit donc pas d'idéologie, mais de chicanes inavouables, et inavouables de part et d'autre, quant à la mise en pratique des idées communes. La revue communiste confirme nos articles parus ici-même, notamment Vent d'Est (septembre 1960) en disant, somme toute, que . Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL la rhétorique chinoise n'est que « du vent», et Ombres chinoises (novembre 1960) ainsi que Khrouchtchev et Mao (avril 1961) en constatant que la surenchère chinoise se ramène à cc des discours ». Ce sont les commentateurs occidentaux qui prennent trop au sérieux le verbalisme monotone, à la longue écœurant, de Mao et consorts ; qui sont dupes des racontars de Tito sur les 300 millions de Chinois destinés à survivre en cas de guerre ·nucléaire ; qui inventent une fraction chinoise au Présidium, ·concurremment à une « pression des militaires », chaque fois qu'un geste de Khrouchtchev leur paraît incompréhensible. Quant aux causes de la discorde réelle qui alimente la chronique, le secret dont s'entourent les deux cercles dirigeants du communisme ne se laisse plus ou moins déchiffrer qu'à l'aide d'une « ignorance éclairée», sous réserve de rectifications possibles à mesure que le temps passe. Les hypothèses formulées dans nos articles déjà mentionnés, puis dans Le spectre ~ jaune (notre numéro d'avril 1962), ne sont pas infirmées par les données plus récentes. MAo n'entend point se subordonner à l'hégémonie de Moscou, traditionnelle dans le monde communiste. Incapable de rien . concevoir de son crû en matière doctrinale, ou idéologiq~e, pour ambitionner une supériorité imaginaire qui l'érigerait en théoricien du marxisme-léninisme, ce en quoi il n'est qu'un vulgaire imitateur de Staline, il a cherché dans les saintes Ecritures de ses maîtres, dont sa connaissance est tardive et très limitée, des arguments à s'approprier pour se faire valoir. Il n'a trouvé que dans la _ brochure périmée de Lénine sur l'impérialisme un thème à exploiter, celui qui interprète certains phénomènes économiques du xrxe siècle comme inhérents à la nature du capitalisme et portant en eux la guerre « comme la nuée porte l'orage » (trouvaille de Jaurès, non de Lénine ; expression de poésie, non de science). Il ne sait que rabâcher son refrain sur l'impérialisme américain et l'inéluctabilité des guerres, sans être capable de traduire en actes ses paroles creuses et vaines. Il lui est plus facile, à l'instar de Staline, de se faire encenser dans son pays pour compenser son infériorité intellectuelle par le « culte de la personnalité», mise en scène qui peut abuser des masses ignorantes en Chine et des « intellectuels » stupides en Occident, mais ne trompe personne dans l'oligarchie communiste à Moscou, ni à Belgrade ou ailleurs. On comprenp. qu'il ait ressenti le déboulonnage de Staline comme un coup porté par Khrouchtchev à son propre prestige. Divers signes donnent à penser que l'jncompatibilité d'humeur entre les deux personnages - s'est envenimée par suite d'exigences chinoises impossibles à satisfaire. Non pas en matière
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