Le Contrat Social - anno VI - n. 6 - nov.-dic. 1962

M. MASSENET telle qu'elle a été jusqu'à présent pratiquée, sera m?se en cause par une Assemblée cantonnée dans le législatif; certes, un partage de l'~~ative législative peut fort bien respecter la. rmss1on qui, dans un pays comme la France, mcombe en la madère au gouvernement, mais, à notre avis, la pression exercée par l'Assemblée sera telle que l'on devra s'incliner devant elle. L'évolution des institutions sera donc déterminée par le sort d'une bataille sur les droits des assemblées. Le classicisme de cette situation nous ramènera, par-delà les transformations prop~es au xxe siècl~,,à certains termes ~~ débat politique du xixe s1ecle. La lutte politique se portera sur l'usag~ des moyens de diff?si~n ~t sur la réglementation du monopole de 1 executif sur la radio et la télévision - et cela ne manquera pas de rappeler les péripéties de la lutte p~ur la liberté de la presse au x1xe siècle. Il faudrait, en particulier, faire admettre la nécessité d'une u magistrature de l'objectivité», destinée à préserver le pouvoir lui-même des tentations de la propagande. Une bataille décisive se livrera autour de !'habeas corpus, dont le rétablissement intégral apparaîtra nécessaire dès lors que la puissance de l'Etat pourra prendre une forme policière. A cet égard, un grand jury national d'accusation, composé de parlementaires et de juristes, possédant un droit d'enquête ·illimité et, dans certains cas, habilité à juger, en mesure de s'adresser en outre à l'opinion publique, pourrait être une des institutions destinées à donner au pouvoir de contrôle un contenu réel. D'une manière générale, c'est la mise en place de nouvelles institutions de ce genre qu'appelle dans son excès la récente réforme. Le problème est de savoir si notre pays possédera une vitalité politique suffisante pour leur donner vie. Il est possible qu'un des mérites de la réforme d'octobre dernier apparaisse au cours des prochaines années sous une forme qui touchera davantage aux structures des partis qu'aux rapports des pouvoirs publics. Admettons que l'émotion des milieux démocratiques aboutisse à un regroupement stable de certains des anciens partis sous une étiquette de démocratie libérale, Biblioteca Gino Bianco 323 par opposition au style autoritaire de démocratie du pouvoir actuel, on aurait ainsi obtenu une simplification de l'échiquier politique. C'est ce que souhaitent depuis plusieurs décennies tous ceux qui préconisent une refonte des institutions démocratiques françaises, sans jamais parvenir à l'esquisser. APRÈSchacune de ses épreuves, la France se tourne vers de nouvelles chimères constitutionnelles au lieu de chercher à corriger empiriquement des mœurs qui rendent toute nouvelle tentative aussi illusoire que la précédente - tant il est vrai qu'il est plus aisé d'adopter de nouveaux principes que de nouvelles coutum~s. Après un siècle et demi d'alternance excessive entre la liberté et l'autorité, la Constitution de 1958 représentait une sorte de traité d'armistice. En la respectant, en la renforçant par une pratique souple et par le, choix ~'un système ~e scrutin adéquat, on s engagerut sur une vote qui pouvait faire découvrir aux Français que le plus sûr moyen d'opérer le renouveau de leur vie politique résidait dans le respect de leurs institutions. Une autre direction a été choisie, qui ranime les luttes abstraites et inutiles de notre histoire. Il faut agir en sorte que cela ne conduise pas à une série d'impasses, génératrices de coups d'Etat. Ou bien l'indifférence des citoyens et l'atonie de l'opinion cesseront; à travers des heurts inévitables, une évolution coutumière s'amorcera qui restituera un équilibre aux pouvoirs sans remettre en cause la restauration d'un exécutif efficace - et, dans un régime proche du régime présidentiel, un usage raisonnable de la liberté serait ainsi assuré. Ou bien l'incivisme deviendra une donnée permanente de la situation, et un despotisme plus ou moins éclairé de quelques lueurs technocratiques prendra la relève, mettant_ fin à la période démocratique de notre histotre. MICHEL MASSENET.

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