KHROUCHTCHEV ET LE SYSTÈME DE TERREUR par S. DEPUIS plus de six ans, depuis le xxe Congrès où fut dénoncé «le culte de la personnalité de Staline », le P.C. de !'U.R.S.S., réagissant contre le système de terreur stalinien, hésite constamment à s'engager à fond. Au XXIIe Congrès d'octobre dernier, Khrouchtchev s'est efforcé d'accréditer le mythe que toute la lumière aurait été faite d'une manière conséquente sur ce système. «A la veille du XXe Congrès, dit-il, la question se posait ainsi : ou bien le Parti condamnera ouvertement, à la Lénine, les erreurs et les déformations de la période du culte de la personnalité de J. V. Staline (...), ou bien dans le Parti prédomineront les forces qui s'accrochent au passé et s'opposent à tout ce qui est novateur ou créateur.» Ayant ainsi souligné que la dénonciation du culte de Staline avait été rendue nécessaire par l' «acuité» de la lutte dans le Parti, Khrouchtchev eut ces paroles quelque peu imprudentes : «Le Comité central, profondément conscient de sa responsabilité vis-à-vis du Parti et du peuple, n'a pas voulu cacher ni voiler les erreurs et les déformations commises dans le passé (...). Le Parti est allé hardiment au-devant des difficultés, il a dit honnêtement et sincèrement au peuple toute la vérité » ( souligné par nous). Au xxe Congrès déjà le Parti avait dit« honnêtement et sincèrement » au peuple «toute la vérité »... Et cela dans un rapport soigneusement caché au «peuple », aujourd'hui encore resté secret en U.R.S.S., et que les journaux soviétiques, quand la presse étrangère le publia, traitèrent tout simplement d'invention impudente. Et non seulement après le XXe, mais même après le XXIIe Congrès, lorsqu'on se mit effectivement à parler de la terreur stalinienne, il ne pouvait encore être question d'une confession « honnête et sincère » de « toute la vérité». Mais l'émotion soulevéedans le payspar « la lutte contrele culte de la personnalité » exigeantimpérieusementque Biblioteca Gino Bianco Schwarz «toute la vérité » soit dite, les dirigeants communistes cherchent à accréditer l'illusion que la vérité est d'ores et déjà entièrement révélée, afin précisément de la mieux cacher et de faire en sorte que ne soient pas découverts le véritable mécanisme du système terroriste ainsi que le rôle qu'y ont joué les ex-«fidèles compagnons du grand Staline » qui, aujourd'hui encore, président aux destinées du pays. Pour ne pas affirmer sans preuves, nous mentionnerons ne fût-ce que quelques questions qui attendent toujours des réponses. I. Pourquoi, après la mort de Staline, s'est-on tu presque trois années durant sur l'effroyable pratique du « culte de la personnalité » ? Le 21 décembre 1955 encore (lors du 76e anniversaire de Staline), deux mois avant le xxe Congrès, on pouvait lire dans les lzvestia les lignes suivantes, qui semblent aujourd'hui incroyables, consacrées au cc grand révolutionnaire et profond penseur » : cc Le nom de Staline est proche et cher à des millions de travailleurs dans tous les coins du globe. Dans des millions de cœurs, ses paroles brûlent d'une flamme qui ne saurait s'éteindre. » Et même dans son rapport au XXe Congrès, Khrouchtchev, tout en énumérant un grand nombre de faits bouleversants sur la cruauté et le despotisme extravagant de Staline, prenait néanmoins sa défense : Staline était convaincu que c'était nécessaire pour la défense des intérêts de la classe ouvrière contre les intrigues des ennemis et contre les attaques du camp impérialiste. En agissant comme il l'avait fait, Staline était convaincu qu'il agissait dans l'intérêt de la classe laborieuse, dans l'intérêt du peuple, pour la victoire du socialisme et du communisme. Nous ne pouvons pas dire que ses actes étaient ceux d'un despote pris de vertige. Il était convaincu que cela était nécessaire dans l'intérêt du Parti, des masses laborieuses, pour défendre les conquêtes de la révolution.
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