222 J. V. :Staline devinait avec une perspicacité excep- .tionnelle les plans de l'ennemi et leur opposait les siens, lesquels conduisaient immanquablement à la défaite de l'adversaire 2 ••• Telle était la figure surhumaine imposée au lendemain de la guerre à l'admiration du monde entier. C'était là un atout maître de la propagande communiste. Aux yeux d'un Occidental moyen, Staline demeure l'un des trois grands vainqueurs d'Hitler. Pour la grande mass_edes Soviétiques, l'éblouissante image, autour de laquelle s'étaient cristallisés pendant la guerre l'ardeur patriotique et l'esprit de sacrifice d'un peuple qui défendait son pays, restait immaculée, malgré les souffrances et les sévices dus à la folie des grandeurs et à la manie de la persécution du dictateur. Staline bénéficiait en l'occurrence· de la séculaire tendance du peuple russe à idolâtrer le détenteur du pouvoir suprême et à attribuer à son entourage ses fautes et méfaits. Les vieux proverbes russ~s disent, par exemple: « Ce n'est pas le tsar qui t'oppresse, c'est son favori » ; « Ce n'est pas le prince qui commet des péchés, ce sont ses conseillers qui le poussent à les commettre » ; « Ne crains point la persécution du tsar, mais redoute celle de ses serviteurs » 3 • · * . '1- '1Au LENDEMAIN de la mort, si opportune, du despote dément qui devenait chaque jour plus dangereux pour ses collaborateurs immédiats, il ne pouvait être question pour ces derniers, devenus ses successeurs, de toucher au mythe de Staline ou de ternir sa mémoire. Leur autorité n'était due qu'~ la faveur du défunt etïl $'agissait avant tout pour eux d'affermir leur pouvoir et leur prestige. . · Une fois la momie du généralissime couchée ·aux côtés de celle·de Lénine et offerte à la vénération des foules, la << direction collective » devait tout d'abord· disculper Staline de toute responsabilité dans les atrocités commises par sa police politique et son régime concentrationnaire, afin _d'esquiversa propre participation à ces horreurs: Les ennemis jurés du Parti et du peuple, Iagoda Iéjov et Béria, qui avaient réussi à capter la confiance de J. V. Staline, ont calomnié et exterminé un grand 1;1ombre d'hommes honnêtes et dévoués au Parti... ~a· découverte et l'anéantissement en 1953 de la bande criminelle de Béria ont permis de mettre en lumière ~t de liquider les violations de la légalité socialiste ~ornmises par .cette bande 4 • · La situation économique désastreuse imposait dès 1953 de nouveaux efforts et des réformes ·----- . . 2. Grande Encyclopédie Soviétique (titre abrégé : G.E.S.); 28 éd., t. 10, fév. 1952, pp. 401-402. 3. V. Dahl : Les Proverbes du peuple russe, Moscou 1957, p•. 243. ': . /. r • • •• 4' • • • • • . · 4. G.E.S., 28 éd., t. 40, nov. 1957, p. 423._ · Biblioteca Gino Bianco L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE urgentes, particulièrement en matière d'agriculture. Le présidium du Comité central du Parti, prétendument « monolithique », était en fait très divisé à ce sujet. Le groupe des vieux dirigeants, ennemis des réformes et pleins de nostalgie pour les méthodes de l'ère stalinienne, s'opposait à Khrouchtchev et aux parti~ans de toutes les innovations. Ces adversaires du premier secrétaire avaient naturellement derrière eux la grande majorité de l' « appareil » du Parti, de ses cadres supérieurs et moyens, dont toute la carrière s'était déroulée sous Staline. ·Clients, créatures et protégés de Malenkov, Molotov et autres staliniens de la direction collective, ces cadres pouvaient fournir aux adversaires de Khrouchtchev un appui solide dans le nouve:;iu Comité central à élire par le xxe Congrès. Il était donc indispensable pour Khrouchtchev, avant cette élection, de prouver aux membres du Congrès qu'une ère était définitivement révolue, que tous les mérites acquis sous le régime .précédent par le dévouement. à Staline étaient re~is en question. Il fallait leur faire comprendre .que, pour se maintenir en place; il valait mieux pour eux se ranger derrière Khrouchtchev · et sa politique. · · . ·· Cette preuve fut apportée au Congrès, réuni à huis clos le 25 février 1956,. par le fameux « rapport secret». Bien entendu, ce brutal renversement de l'idole, accepté à contrecœur par les adversaires de Khrouchtchev, ne devait pas s'ébruiter. Dans sa péroraison, Khrouchtchev proclamait avec force : · · Aucune information à ce sujet ne doit filtrer à l'extérieur. La presse, surtout, ne doit pas en être informée. C'est pour cette raison que nous examinons cette question ici, en séance secrète. Il y .a des limites à tout. Nous ne devons pas fournir des munitions à l'ennemi, nous ne devons pas laver notre linge sale devant lui. Je pense que les délégués comprendront et apprécieront à leur juste valeur toutes les propositions qui leur seront faites. Camarades, nous devons abolir le culte de la ·personnalité d'une manière décisive ét une fois pour toutes. . Couverts par des « applaudissements tumultueux », ,le discours de Khrouchtchev fut parfaitement compris de ceux à qui il s'adressait. Le premier secrétaire pouvait désormais compter sur un soutien suffisant au nouveau Comité ·c~ntral, même si la coalition de ses· adversaires le mettait en minorité au Présidium. En effet, quand, en juin 1957, Malenkov, Molo- _tov,Boulganine, Vorochilov et autr~s ~dvers~ires -de la « coexistence pacifique» et de. la politique ·agricole de Khrôuchtchev tentèrent de le dest~tuer de ' son poste de premier secrétaire,. il convoqua d'urgence le Comité central qui,: réuni en · sessi~n extraordinaire, infligea · une ·défane définitive au « groupe antiparti »~ · < ~. ç~~è ~ictoire ·ne fut· p~s .x:emport~ -~.~.s p~~il. JJ~ë partie de~ ~dres. $_upéi1~u~ d_u P~, :im.p_ré:-
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