Le Contrat Social - anno VI - n. 4 - lug.-ago. 1962

L. PISTRAK dépendance nationale et assurent le développement du pays sur la voie du progrès social. Et, dans les pays émancipés où les peuples sont encore privés des libertés démocratiques, la lutte pour créer un Etat national démocratique permet aux forces progressistes de balayer les vestiges de l'administration coloniale, d'arracher le pouvoir aux national-traîtres au service de l'impérialisme et de prendre en main le destin de leur pays 31 • Autrement dit, là où des « forces progressistes » (c'est-à-dire des partis marxistes-léninistes ou procommunistes) sont au pouvoir, ils doivent marcher au « socialisme » par la voie soviétique. Mais dans les pays où les « forces progressistes » ne tiennent pas encore les rênes de l'Etat, la lutte contre la « bourgeoisie nationale traîtresse » doit être poursuivie jusqu'à la défaite complète de celle-ci. Pour mener à bien cette lutte, il est nécessaire d'établir une base légale permettant à ces forces d'exister. C'est pourquoi la « liberté nationale» des anciens peuples coloniaux ne peut être affermie qu' « en accordant au peuple de larges droits démocratiques» : . L'octroi au peuple des droits et libertés démocratiques - liberté de parole, liberté de la presse, droit de réunion et de ma:tlfestation, droit de former des partis politiques et des organisations publiques, de participer à l'élaboration de la politique de l'Etat - est un facteur décisif dans le -développement de la révolution nationale démocratique. Ainsi les libertés politiques, refusées depuis plus de quarante ans au peuple soviétique et, depuis la deuxième guerre mondiale, aux peuples des pays « socialistes» et des « démocraties populaires», sont présentées maintenant comme essentielles et urgentes pour des pays dont les populations ont peu ou pas d'expérience de l'autonomie politique et sont encore largement analphabètes. 11est évident 9ue le but immédiat de ces slogans ultra-démocratiques est de créer dans les anciens pays coloniaux des conditions qui permettent la formation de partis communistes légaux. Leur but ultime est de préparer le terrain à une prise du pouvoir politique par les communistes dans ces nouveaux Etats. L'interdit prononcé contre les « méthodes de gouvernement dictatoriales et despotiques » dans les « Etats national-démocratiques indépendants » est expliqué par Ponomarev lui-même, qui attaque les « milieux supérieurs de la bourgeoisie indigène », lesquels, après avoir acquisl'indépendance nationale, « aspirent à établir des régimesréactionnaires, antidémocratiques». 11s'en prend ensuite nommément aux « autorités administratives » de la République arabe unie et de l'Irak et à leurs « méthodes de répression terroriste contre de 31. Kommounût, mal 1961, n° 8, pp. 41 aqq. Biblioteca Gino Bianco 213 valeureux combattants anti-impérialistes » et conclut: Les communistes ont toujours été aux premiers rangs des champions de l'indépendance nationale. Des milliers d'entre eux sont tombés en héros dans la lutte contre le colonialisme. Cependant, aujourd'hui encore, dans les pays les plus émancipés., les partis communistes sont dans la clandestinité. Est-ce juste ? Certainement pas. Les communistes représentent les intérêts de la classe ouvrière, du paysannat, les intérêts supérieurs de la nation. L'essentiel de la déclaration de Ponomarev sera repris presque textuellement dans le nouveau programme du P.C. de l'Union soviétique: « Les buts du communisme correspondent aux intérêts supérieurs de la nation. » Le sens est presque aussi clair que les termes et l'on sait maintenant à quoi s'en tenir sur les libertés « nationales démocratiques». Celles-ci sont destinées à assurer non seulement la participation des communistes à la vie publique, mais aussi à leur attribuer le rôle d'arbitres des « intérêts supérieurs de la nation». Toutes les autres forces politiques qui ne tiennent pas à être dénoncées comme agents de la « bourgeoisie nationale traîtresse » doivent accepter la voie communiste. Cela « exigera des concessions » de leur part, mais, si elles se soumettent, « leurs énergies » pourront «trouver une application » 32 • Le rôle lamentable réservé aux «partis » non communistes des pays satellites d'Europe orientale est un exemple parfait de la nature véritable de cette «application». La formule n'est qu'une invite polie à capituler sans conditions. MALGRÉ tous les avatars par lesquels la stratégie soviétique en Afrique et dans d'autres régions du monde est passée depuis quarante ans, «le but », pour reprendre l'expression de Khrouchtchev, reste immuable. En 1920, Lénine prévoyait des « révolutions bourgeoises-démocratiques » dans les pays coloniaux et dépendants et envisageait une alliance temporaire entre les communistes et la bourgeoisie nationaliste, à condition que les communistes luttent contre cette dernière et conservent l'originalité de leurs organisations et leurs objectifs propres. Aujourd'hui comme hier, le Kremlin continue d'appliquer la stratégie de Lénine. La révolution mondiale envisagée par celui-ci n'a pas eu lieu et les nécessités ont engendré de nouvelles méthodes et de nouvelles conceptions dans la politique communiste. Mais le but reste le même. LAZAREPISTRAK. ( Traduit de l'anglais) 32. Lu P,uplu d'An, ,t d'Afriqu,, 1961, n° 4, p. 6.

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