116 C'est ainsi que la notice biographique sur Bakounine, signée par B. Gorev, dans la première édition de la Petite Encyclopédie Soviétique (1928), se terminait sur les lignes suivantes : « Les erreurs de Bakounine sont depuis longtemps réfutées par l'histoire, en particulier par l'histoire de la première grande révolution prolétarienne et de notre guerre civile. Son profond enthousiasme révolutionnaire et sa foi en l'avenir de la création révolutionnaire des masses restent son mérite immortel. » Or la dernière phrase, sur « son mérite immortel », a été supprimée dans la 2e édition de la même Encyclopédie, sous Staline. Il ne saurait être question de récapituler 1c1 une bibliographie générale ayant trait à Bakounine, le sujet traité étant celui des recueils de ses œuvres. Tous ceux qui s'intéressent au théoricien de l'anarchisme savent que nombre de ses écrits ont été publiés en maintes brochures, et souvent réédités. En français, on dispose notamment (à part les six volumes dus, le premier à M. Nettlau, les cinq suivants à J. Guillaume) de Dieu et l'Etat (Paris 1892) ; de la Correspondance, Lettres à Herzen et à Ogareff, avec préface et annotations de Michel Dragomanov (Paris 1896); de la Confession, avec une introduction de Fritz Brupbacher et des annotations de Max Nettlau (Paris 1932). Désormais, la grande édition d'Amsterdam éclipsera toutes les autres. Quand Lénine, de retour à Pétrograd, en avril 1917, fit valoir ses conceptions sur le cours de la révolution russe, heurtant de front toutes les * V oi.ci la notice sur « les Bakounine » dans le classique dictionnaire encyclopédique Brokhaus-Ephron ( Saint-Pétersbourg 1893), pour les lecteurs qui n'ont pas accès direct aux sources: Famille noble du XVIIe siècle, issue manifestement de secrétaires de chancellerie (tel fut, par exemple, Nicéphore Evdokimov, clerc, en 1658, et porté noble sur le rôle de Moscou, en 1677) et qui paraît tirer ses origines de trois frères venus de Hongrie pour servir à Moscou, en 1492. Toutefois, jusqu'au clerc Nicéphore, le nom de Bakounine ne se trouve dans aucun de leurs papiers. L'arrière-petit-fils de Nicéphore, Michel Ivanov, fut commandant de la place de Tsaritsine, sous Pierre Ier. Son fils, Basile Mikhaïlovitch, traducteur au collège des Affaires étrangères, devint membre dudit collège et mourut, en 1766, avec le grade de conseiller d'Etat en exercice. C'est à Basile Mikhaïlovitch Bakounine que l'on doit une Description des tribus kalmouks et, en particulier, des Torgoouts, restée à l'état de manuscrit, aux archives du ministère des Affaires étrangères. Pendant la campagne de Pierre contre la Perse, Basile Mikhaïlovitch Bakounine fut chargé de ramener, de chez le khan Ayouka, des Kalmouks et il décrivit, en détail, toutes les manœuvres de ceux-ci en vue de tromper les Russes. Notes d'un témoin et observateur intelligent, l'ouvrage de Bakounine constitue une étude historique de valeur. Les deux fils de ce personnage portent le même nom : Pierre Vassiliévitch l'aîné et Pierre Vassiliévitch le cadet furent membres du collège des Affaires étrangères • sous Catherine II. L'aîné naquit en 1724 et mourut en .1782; le cadet, n·é en 1734,. est mort le 16 mai 1786. Ce dernier fut, par l'influence qu'il exerça sur l'administration du comte Pl:llline, 1~ ·rival 4e. l3iezborodko et tous deux furent intimes avec les Vorontsov. Non seulement les deux frères ne se désintéressaient pas de la litt~rature, ·mais encore .iis possédaient)a ~angue ,russe comme peu de gens à leur époque. Un troisième frère, Michel Vassiliévitch, fut .vice-président du BibliotecaGino Bianco LE CONTRAT SOCIAL tendances socialistes, l'ancien bolchévik Goldenberg s'écria : « La place de Bakounine est longtemps restée vide dans la révolution russe. La voici occupée par Lénine ... Nous venons d'entendre la négation de la doctrine social-démocrate et du marxisme scientifique. Lénine leader de notre parti socialiste est mort. Un nouveau Lénine est né, un· Lénine anarchiste. » A l'époque, de nombreux intellectuels socialistes et hommes politiques voyaient en Lé.ïine un nouveau Bakounine. L'intérêt de la publication entreprise par l'Institut d'Amsterdam dépasse donc la personnalité de Bakounine pour contribuer à l'étude de toute l'intelligentsia révolutionnaire russe, issue de la noblesse et de la bourgeoisie. En tant que rejeton d'une famille aristocratique et produit d'une école militaire, Bakounine apparaît en quelque sorte comme un prototype *. Le Comité de rédaction des Archives Bakounine composé de MM. A. Lehning, A. J. Rüter et P. Scheibert expose dans une courte préface le programme qu'il s'est tracé en prenant l'initiative d'éditer la totalité des œuvres actuellement rassemblées de Bakounine, dont beaucoup de manuscrits inédits jusqu'ici ont été patiemment réunis par l'Institut d'Amsterdam. On aura une idée de l'importance de ces archives quand on saura que l'Institut abrite une partie des écrits de Bakounine recueillis après sa mort par sa veuve bureau des Finances et mourut au début du règne d'A1exandre Jer. Pierre Vassiliévitch l'aîné ne laissa pas de postérité, mais le cadet eut deux fils d'une parente des Vorontsov : 1. Modeste Pétrovitch, conseiller secret et auteur d'ouvrages sur l'économie rurale, qui naquit en 1765 ; 2. Paul Pétrovitch, né le 24 mai 1776 et mort le 24 décembre 1805. De 1796 à 1798, il fut directeur de l'Académie impériale des sciences et de l'Académie russe. Modeste Pétrovitch fut directeur d'une école pratique d'agriculture et auteur d'un manuel : Pour une nouvelle répartition et pour le labJurage des champs (Pétersbourg 1800). ... Le fils de Paul, Alexandre Pavlovitch, fut, de 1842 à 1853, gouverneur de Tver et, en plus de travaux administratifs, .il écrivit ,Une gestion commune pour toutes les provinces de l'Empire de Russie qui ne sont pas dans une situation particulière. Du fils de Michel Vassiliévitch, Michel Mikhaïlovitch (1765-1826), sénateur et gouverneur, sont restés trois filles et un fils : fEudoxie Mikhaïlovna, dame d'honneur et artiste peintre. Grâce aux libéralités de Nicolas 1er, elle eut les moyens de vivre en Italie pour y développer son talent. En 1835, elle reçut la deuxième médaille d'or de l'Académie des BeauxArts. Sa sœur, Prascovie Mikhaïlovna, femme de lettres, écrivait dans le Moscovite. La troisième sœur, Catherine Mikhaïlovna, s'illustra comme infirmière à Sébastopol, pendant la campagne de Crimée, à la tête de la Congrégation de l'Exaltatidn de la Croix. Leur frère, Basile Mikhailovitch, auteur d'une brochure sur la colonne d'Alexandre 1er (1834), naquit en 1795 et mourut en 1863. Bakounine (Michel Alexandrovitch), né en 1814 dans la province de Tver et mort le I 3 juillet 1876, en Suisse. Elève de l'Ecole d'artillerie, il fut nommé enseigne sans avoir terminé ses étÜdes. En 1840, il quitta son pays et fréquenta, d'~9ord .en Suisse, puis en France, les cercles révolution~ naires socialistes. Par le discours qu'il prononça le 29 no- -vembre 1847> il .s'est fermé. le chemin du retour dans sa patrie.
RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==