4 représentants du Parti avec les hommes. politiques étrangers, il est contre les déplacements à l'extérieur.» P. N. Pospelov s'en prend à Molotov qui se permet de dénigrer le nouveau programme du Parti, qui après avoir « voté· toutes les résolu:- tions du xxe Congrès» s'attaque maintenant .à la thèse « concernant la possibilité de conjurer une nouvelle guerre mondiale ». Sur ce dernier point, les antiparti seront encore maltraités par M. T. Efremov, comme « adversaires de la nouvelle ligne de notre gouvernement en politique extérieure ». Affirmation peu convaincante, car Staline a plusieurs fois prôné la « coexistence pacifique» que Khrouchtchev autant que Molotov regarde comme une forme de « guerre froide». De l'énorme fatras des réquisitoires prononcés ~u Congrès, il est malaisé de dégager quelque chose de cohérent, d'autant plus que les mesquineries voisinent avec les pires imputations et les plus sanglantes injures. C'est ainsi que le président de l'Académie du bâtiment et de l'architecture, V. A. Koutcherenko, prend "à partie Kaganovitch, « lequel militait avec brutalité pour des solutions architecturales erronées », alors qu'avant et après ce grief, le même déchu ét~it et sera taxé d'infamie, de crimes épouvantables. Car outre le règlement de comptes ayant trait à la période écoulée depuis la mort de Staline, il y a une revue rétrospective partielle de la période antérieure, celle de la terreur dont des millions d'innocents ont été victimes sous Staline. Les dirigeants actuels ne sont pas enclins à avouer la vérité sur cette sinistre phase de l'histoir~ soviétique où ils ont trempé comme complices de ceux qu'ils condamnent · de nos jours, pas plus qu'ils ne peuvent se désolidariser du pacte conclu par Staline et Molotov avec Hitler et Ribbentrop pour provoquer la guerre en 1939. Mais ils jugent expédient de dévoiler certains épisodes propres à déshonorer leurs compagnons d'hier ou d'avant-hier, auxquels ils n'accordent pas le droit de se défendre. En quoi la « déstalinisation » relative entreprise par Khrouchtchev au nom de la direction collective s'accomplit par des moyens hérités de Staline. Le chapitre des atrocités dont les xxe et XXIIe Congrès ont eu l'avant-goût méritera d'être .traité à part. Aucun critique sérieux du régime soviétique, en pays libre, n'a jamais avancé ni envisagé la centième partie de ce que les congressistes ont entendu à titre d'échantillons tirés des ... dossiers entrouverts. Pour s'en tenir aux zizanies post-staliniennes masquées par les apparences monolithiques, on peut admettre en conclusion les caractéristiques formulées par les parvenus du communisme pour définir les deux tendances antagoniques issues de l'école dite marxisteléniniste :- toutes deux dogmatiques en réalité, le nouveau programme du Parti le prouve, mais l'une un peu moins figée que l'autre et plus volontiers encline à s'adapter aux « exigences de la vie », comme l'ont ressassé ses orateurs au Congrès. Si celle de Khrouchtchev peut se vanter «·d'esprit novateur » (Satioukov dixit) et blâmei Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL le «conservatisme» de celle de Molotov, elle n'en perpétue pas moins la tare foncière du stalinisme : le mensonge intégral, dosé selon les besoins du jour. Si celle de Molotov peut se targuer d'orthodoxie et dénoncer le « révisionnisme »de celle de Khrouchtchev, elle n'en devient pas plus capable de rompre la « coexistence pacifique » pratiquée avant Khrouchtchev par Staline. Certes, le renoncement à la saignée permanente dans la médecine politique du régime est un fait majeur appréciable, mais Staline lui-même n'aurait pu saigner indéfiniment ses sujets et Khrouchtchev ne se risque à ses expériences qu'à la faveur du sang versé avant lui. Encore la direction collective ne s'est-elle pas privée d'user de la peine de mort en grand mystère pour purger et reprendre en main sa police secrète. Le dernier mot n'est pas dit sur les controverses qui ont lézardé le monolithe. Si les antiparti ~ craignaient les conséquences du déboulonnage de Staline, les événements de Pologne, de Hongrie et d'ailleurs ne leur ont pas donné tort. Si Molotov a prévu que Tito ne se laisserait plus incorporer au pseudo-bloc communiste, la suite lui a plutôt donné raison. Ceux qui pensaient que l'exploitation des terres vierges ne serait pas rentable ne sont pas encore réfutés par l'expérience. La décentralisation de l'économie donne des résultats peut-être discutables, et dont on ignore le prix. Il est vrai que le niveau de vie a dû s'améliorer sensiblement après Staline, mais parce que le pouvoir a recours aux stimulants individuels : la production augmente par des voies et moyens capitalistes, non par la grâce du communisme. Quelque odieux que soient les sectateurs et zélateurs de Staline, ils ne seraient éventuellement pas en aussi mauvais posture dans leur milieu si ne leur était appliqué aussi strictement le bâillon : la peur de publier les écrits certainement stupides de Molotov ne témoigne guère pour les maîtres· de l'heure. Que ceux-ci n'aient pas encore exclu du Parti leurs contradicteurs couverts de h~nte et c~argés d'anath~mes, après la tapageuse · mise en scene du Congres, on doute que ce soit par grandeur d'âme. Du · point de vue « marxiste-léniniste », donc stalinien, commun aux novateurs et aux conservateurs,. aux révisionnistes et aux dogmatiques, la que_sp.~nessen~ielle r~ste en~èr~ : le régime soviettque a-t-tl fonde le socialisme et va-t-il établir le communisme ? Les affirmations tranc~aJ?,t~s~e Khrouc~tchev contr~dites par des réalites criantes ne tiennent pas heu de réponse, non plus que les citations de Lénine dont le stock inépuisable fournit même celle-ci, qui offre m~tièr~ â méditation au c~ef ~écanicien de l'apparetl d Etat pseudo-proletarien : « La machine [étatiqueJ échappe des mains : quelqu'ün semble la condwre, et elle ne va pas là où on la dirige, elle prend une direction où la pousse on ne sait qui ou quoi, quelque chose d'illégal, · d'illicite, venant Dieu sait d'où... » · B. SOUVARINE•.
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