Le Contrat Social - anno VI - n. 1 - gen.-feb. 1962

P. BARTON Il s'ensuit que tout excédent de croissance en Ukraine et en Biélorussie, depuis la fin de la dernière guerre, est entièrement imputable au mécanisme de la remontée. Or voici les taux d'accroissement enregistrés pendant chacune des périodes quinquennales : U.R.S.S. Ukraine Biélorussie 1941-1945 -8 - 74 - 80 1946-1950 88 342 475 1951-1955 85 91 ro6 1956-1960 63 64 80 Calculé d'après L'industrie de l' U.R.S.S., recueil statistique, Moscou 1957, pp. 50 et sr ; L'Economie nationale de /'U.R.S.S. en 1958, Moscou 1959, p. 141 ; L'Economie nationale de L' U.R.S.S. en 1959, Moscou 1960,pp. 131,145 et 148; L'U.R.S.S. en chiffres, 1960, p. 125. Les différences et changements de rythme dont ce tableau ne révèle que les grandes lignes se lisent plus aisément lorsqu'on groupe les accroissements successifs de la production industrielle, de manière à traduire l'évolution d'année en année et à éliminer en même temps tout flottement passager U.R.S.S. Ukraine Biélorussie 1951 - 1955 85 91 106 1952 - 1956 75 84 97 1953 - 1957 73 78 94 1954 - 1958 70 75 89 1955 - 1959 68 71 8r 1956 - 1960 63 64 80 · Si l'on en croyait les mêmes chiffres officiels artificiellement gonflés, la valeur brute de la production industrielle de 1940 fut dépassée de 73 % en 1950 pour l'ensemble de !'U.R.S.S. et de 15 % en Ukraine et en Biélorussie. Suivant les estimations de Iasny, la production industrielle de 1950 fut de 40 % supérieure à celle de 1940 (p. 362). Iasny lui-même n'a pas révisé les données officielles pour l'Ukraine et la Biélorussie. Mais pour obtenir des chiffres grossomodo comparables on peut avoir recours à un procédé simplifié : en supposant que les indices relatifs aux deux Républiques grossissent la réalité dans une proportion analogue à ceux qui concernent l'Union soviétique entière, on peut les réduire à l'aide du même coefficient. Nous aurons ainsi une estimation approximative, selon laquelle la production industrielle en Ukraine et en Biélorussie fut en 1950 de quelque 12 % inférieure à son niveau d'avant guerre. Autant dire qu'elle était sur le point de rejoindre ce dernier (suivant les données officielles, elle s'accrut dans les deux Républiques de 17 % en 1951 et de 14 et 16 % respectivement en 1952). Cela permet de tirer des tableaux ci-dessus tous les enseignements utiles. Biblioteca Gino Bianco 33 Longtemps après le rétablissement de son niveau d'avant guerre, l'industrie soviétique bénéfic~a, grâce au mécanisme de la remontée, d'une croissance accélérée dans les territoires précédemment occupés. Même dans les limites de ceux-ci, la croissance se prolongea considérablement au-delà de la restauration du volume de 1940. Tout en diminuant graduellement, l'excédent d'accroissement n'est entièrement résorbé que dans la seconde moitié des années 50 en Ukraine; en Biélorussie, il demeure notable en 1960 (13 % d'accroissement contre 6 % en Ukraine et 8 % dans l'ensemble de !'U.R.S.S.). Il s'ensuit que, même après la restauration du niveau d'avant guerre dans les territoires dévastés, l'industrie soviétique continua de bénéficier de l'accélération causée par la remontée. Cela est confirmé par la diminution graduelle du taux d'accroissement que l'on peut ~bserver dans ~a première ~olo~e des deux derniers ,tabl~aux ~1: dessus. S1 d'enormes ressources n avaient ete gaspillées pendant les d~rnières année~ du rè~e de Staline en des entreprises de pure megaloman1e (« transformation stalinienne de la nature », etc.), l'économie aurait pu tirer de ce mécanisme un profit encore plus grand. CES CONCLUSIONriSsquent de surprendre. On affirme d'habitude, en se fondant sur la notion étroite de remontée, que l'économie soviétique s'est rétablie avec une extrême rapidité après la deuxième guerre mondiale. Notre argument tend à démontrer le contraire. Nous citerons cependant à l'appui les estimations de Iasny lui-même au sujet du produit ou revenu national net, exprimé en milliards de roubles, pouvoir d'achat de 192627 (p. 444) : 1928 1937 1940 1948 1950 1952 1955 29,8 51,r 56,4 54,7 72,8 90,7 II I,5 La croissance fut beaucoup plus rapide après 1948 (104 % en 7 ans) qu'avant 1940 (89 % en 1z ans). Mais si l'on conçoit l'évolution d'après guerre comme une remontée tendant à « raccrocher» l'économie nationale à sa courbe d'évolution normale, il faut rapprocher de l'accroissement d'avant guerre celui qui fut enregistré non pas depuis 1948, mais bien depuis 1940 : la chute et le relèvement forment un tout. On comparera alors, aux 89 % en 12 ans, un accroissement de 98 % en 15 ans, compte tenu d'un agrandissement considérable du territoire. En outre, les chiffres qui portent sur les années 1948 à 1955 indiquent très nettement la réduction graduelle de l'accélération, caractéristique de la progression de la

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