180 Puisqu'il a fallu choisir entre tant de documents pleins d'intérêt, il aurait convenu, nous semble-t-il, que le choix s'orientât plus systématiquement suivant la préséance des organismes dont ils portent la signature. Le caractère un peu flou que présentent à cet égard les limites de la documentation ne saurait, certes, passer pour un véritable défaut ; il sera simplement moins facile d'utiliser cet instrument de travail. Il a fallu aussi éliminer les textes d'importance secondaire. Les appréciations sous-jacentes ne peuvent évidemment s'appuyer sur aucun critérium tout à fait objectif, aussi la compétence de l'auteur se révèle-t-elle surtout à travers cette seconde sélection. Dès lors qu'on a affaire à des documents choisis, il y a nécessairement des lacunes ; le tout est de savoir si l'auteur a réussi à en réduire le nombre au strict minimum. Le travail accompli par Mme Degras dépasse en ce sens toute expectative. C'est moins surprenant pour le premier tome puisqu'il couvre une période moins longue, et qui plus est, une période pendant laquelle les organes de l'Internationale ne débitaient pas encore ces énormes quantités de manifestes, directives et résolutions-fleuves qui assomment l'historien lorsqu'il aborde les textes des années ultérieures. On trouve dans ce premier volume presque toutes les résolutions · relatives à l'organisation générale du Comintern, à ses objectifs et méthodes, aux attitudes par lui adoptées sur la question nationale et coloniale, les syndicats, les paysans, la politique parlementaire, etc., ainsi que pratiquement tout ce qui a trait à l'organisation interne de l'Internationale. Le volume comprend en outre une partie importante des déclarations sur la situation internationale, une fraction de celles qui concernent le mouvement ouvrier et un certain nombre de directives, décisions et lettres ayant trait aux partis affiliés ou sympathisants. Le choix est en général fait sans formalisme excessif. L'auteur n'hésite pas à retenir certains textes se rapportant à des épisodes, mais dont la portée de principe dépasse celle des événements qui les ont suscités. C'est le cas, par exemple, de la résolution adoptée par le Comité exécutif en mars 1921 au sujet de la démission de cinq membres du Comité central du Parti allemand, dont Paul Levi et Klara Zetkin (t. I, pp. 211-212). La reproduction de ce document ne peut se justifier par l'événement lui-même, d'autant moins qu'il est question de celui-ci dans d'autres textes inclus dans le recueil. Mais c'est là que fut énoncé le principe selon lequel les dirigeants communistes - n'ont pas le droit de se démettre : « Dans un t'arti communiste les chefs( ...) n'ont pas plus le droit de quitter leur poste sans permission du Parti qu'un soldat de l'Armée rouge n'a le droit de quitter la guérite où il est en faction... Ce n'est que dans des partis bourgeois et opportunistes qu'un chef se croit en droit d'agir d'une façon indépendante ... » Dans le tome II, l'auteur a même dû se fier à son intelligence de l'expérience communiste et s'écarter de son schéma plus que dans le premier. Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL Les documents du Comintern devinrent beaucoup plus nombreux pendant la. pério5"1·~traitée, de même que ses champs d'actton, penode marquée· par le « front unique», avec ses métamorphoses allant du rapprochement avec les syndicats réfor~ mistes jusqu'aux attaques contre les socialistes de gauche; par l'activité communiste dans des pays arriérés, particulièrement en Chine, depuis la subordination du Parti au Kuomintang jusqu'à l'énorme provocation de Canton ; par la victoire du fascisme en Italie, la grève générale en GrandeBretagne et nombre d'autres événements de première importance. Et les textes du Comintem devinrent d'autant plus sinueux que ses activités furent plus perfides. Car ce fut également l'époque de la « bolchévisation » des partis communistes, de leur brassage conditionné par la lutte des clans ~ dans le Parti russe, de la transformation de l'Internationale communiste en instrument aveugle - et très secondaire - de la politique étrangère de Staline. Mme Degras a réussi à choisir ses documents de manière que son recueil reflète fidèlement les innombrables aspects de ces six années troubles. Cependant un phénomène n'a pas retenu son attention autant qu'il le mérite: l'évolution interne de la IIIe Internationale pendant la période en question se distingue aussi par les aménagements de la structure organique des partis communistes qui, peu à peu, débarrassèrent ceux-ci de toute attache gênante avec la classe ouvrière et en firent des machines fort perfectionnées à noyauter, à encadrer et à détourner de leur objectif propre les mouvements sociaux de toutes sortes. Un développement également important fut la transformation des partis en instruments de la politique soviétique, autrement redoutable que de vulgaires officines d'espionnage ou des « cinquièmes colonnes ». L'I.C. devint du même coup un foyer de totalitarisme. A cet égard, le recueil souffre de quelques lacunes regrettables. Ainsi a été omise la résolution du sixième Exécutif élargi expliquant en détail comment monter et manipuler des comités et organisations crypto-communistes (Erwei.terte ExekutiveFebruar-Marz1926, Thesenund Resolutionen, Hambourg 1926, pp. 189-194). Les textes ne sont pas tous reproduits intégralement. Dans de nombreux cas, ils ont été abrégés, beaucoup plus radicalement d'ailleurs dans le second volume que dans le premier. Cela dispense d'en réduire le nombre, mais le procédé n'en présente pas moins des inconvénients certains. Discerner entre texte délesté et texte tronqué ne saurait être que subjectif. Dès lors, les cas seront inévitablement assez nombreux où l'on déplorera cette intervention. Par exemple, dans la résolution du deuxième Exécutif élargi sur le Parti français, l'auteur n'a gardé du chapitre relatif à la Fédération de la Seine que l'alinéa condamnant en termes généraux le fédéralisme (t. I, p. 355). Or les passages supprimés précisent, entre autres, qu'une fédération doit être dirigée par un comité restreint dont les membres ne sont pas responsables devant les .-échelonsinférieurs et, règle encore plus révé-
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