Le Contrat Social - anno V - n. 2 - marzo-aprile 1961

66 présidentiel offre de meilleures c~ances d' e~- cacité gouvernementa_le,d. e plus soh~es garanties démocratiques. A vrai dire on ne le demontre pas. Mais on l'affirme. Voyons donc ce. que valent les griefs des novateurs et leurs solutions. Transposition du système britannique SANS RETRACER toute la structure de nos institutions nous en rappellerons ici les traits fon~amentai:x. On a dit et répété que la Constituti?n de 1958 est confuse. Elle est parfaiteme~t clai~e si on la considère comme un texte qui .tenait compte de certaines réalités et se proposait certains objectifs. ~ Diverses, les réalités dont on devait tenir compte consistaient, si l'on ne r~tient q~e l'essentiel dans l'existence de partis multiples et le mode de scrutin. On dira que le Gouvernement provisoire a précisément, et malgr~ ses ~ngagements changé le mode de scrutm. Mais ce change~ent demeurait sans influence sur les données constitutionnelles puisqu'on revenait à un mode de scrutin déjà utilisé sous la IIIe République, et que tous les modes de scrutin que nous avons connus ont favorisé la multiplicité des partis. Passer de l'un à l'autre c'est, selon les circonstances, accroître les chances de tel .°? tel parti : il s'agit donc d'une manœuvre politique, et non d'une mesure de portée constitutionnelle qui modifierait la structure et le nombre des partis. Or, si le régime parlementaire anglais et le régime parlementaire français sont p_roofndément différents l'un de l'autre, la seule raison de cette différence c'est le nombre des partis et le mode de scrutin. Outre-Manche existent d'une part deux grands partis, d'autre part un m~de de scrutin qui gêne considérablement la croissance d'un troisième parti et, lorsque le pays abandonne le bipartisme, le contraint d'y revenir. Nous sommes au contraire riches en partis et inventifs en matière de modes de scrutin, le trait commun de ces derniers étant de ne pas faire obstacle à la multiplicité des partis. Il était sans doute paradoxal de s'inspirer du modèle anglais (selon la tradition des meilleurs esprits de la IIIe République) tout en étant contraint de respecter ce qui nous en sépare. La difficulté a été tournée avec habileté. En Grande-Bretagne le vote du pays définit une majorité dont les dirigeants ·gouvernent, contrôlés par la Chambre des Communes. Donc, par l'intermédiaire des élections législatives, il y a action directe de la nation sur la formation du gouvernement. Et comme les gouvernants sont, en tant que chefs de parti, les .dirigeants de la majorité parlementaire, ils sont les maîtres du programme législatif. En 1958, les circonstances ne permettaient guère, en France, de bouleverser les forces politiques qui forment la substructure nécessaire Biblioteca Gino Bianc-G--- LE CONTRAT SOCIAL de tout édifice démocratique. Il s'agissait donc, en partant de la multiplicité des partis, de faire obstacle à la souveraineté du Parlement en donnant, au premier gouvernement quf se fo~~er~~, d'~e part la durée, d'autre part _1 efflcacite,.legisl~ttv.e. Aussi a-t-on prévu que, acquis le vote d mvesttture, le gouvernement_n'aurai~_plu~besoin. d'avoi~ ~e majorité pour lui, et qu 11 lui suffirait de n avoir point de majorité contre lui. D'un autre _côté, la Constitution retire à l'Assemblée le droit de légiférer à sa guise, réduit sa c<?mpé~ence_aux données essentielles, et la contraint d exammer en priorité le programme gouvernemental. Bref, la Constitution prévoit que, comme en GrandeBretagne, le gouvernement gouvernera, et l' Assemblée contrôlera. Que ce système ~hoque c~rtains démocr~~es, c'est ce qui se conçoit sans p~ine, car la traditton veut qu'en r~gime p3:rle~entaire,' le gouv~meme~t ait pour lui la maJorite de 1 Assemblee. Mais sans doute ces démocrates ont-ils tort. Lorsque notre Constitution restreint la liberté de l'Assemblée en matière législative, elle ne fait que réaliser en France ce qui existe dans le régime parlementaire britannique et dans la république présidentielle des États-Unis. Dans l'un et l'autre cas en effet, la besogne essentielle des représentants de la nation est de discuter le programme du gouvernement. En fait, sinon en droit, c'est à celui-ci qu'appartient l'initiati';e ~n matière législative. Et lorsque notre Constitution p~otège la vie du gouvernement contre la versatilité de l'Assemblée, sans doute nous accorde-t-elle, contrairement aux apparences, un régime plus démocratique que ceux que nous avons conn~ antérieurement. En fait, précédemment, on pouvait penser que la première majorité d'une lé~slature était celle qui reflétait le mieux !es.i1;1tent1?ndsu corps électoral, et que _les. maJorites swv~tes étaient le fruit de combinaisons parlementaires. Aujourd'hui, cette première majorité crée, ~ gouvernement qui peut durer au~ant que la legi~- lature. Si c'est une atteinte certaine à la souveraineté du Parlement, c'est-à-dire à l'influence des intrigues et des gr~upes de pres~ion, ~l n'est pas évident que le systeme actuel soit m~ms ,que !es précédents respectueux de la souveramete nationale. Le contraire est même tout à fait soutenable. Nos CONSTITUANTS, on le voit, ont do~c transporté chez nous le systè~e angl~s sans toucher à l'infrastructure, c est-à-dire au régime des partis et des électio~s, mais . en aménageant les rapports des pouvoirs publics. Ce système ne pouvait évidemment prése~ter chez nous une physionomie aussi démocrattque qu'en Grande-Bretagne. D'un autre côté, pour des esprits accoutumés à voir dans le vote _populaire non l'expression d'une volonté natto~e, mais la source de la souveraineté parlemenwre,

RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==