QUELQUES Le viol de Clio Histoire du parti co'!lmuniste de l'Union sovié- _ tique. Moscou 1960, Editions en langues étrangères, 880 pp. LEONARDSCHAPIRO: The Communist Party of the Soviet Union. Londres 1960, Eyre and Spottiswoode, 631 pp. L'ÉTATSOVIÉTIQUE, c'est-à-dire le parti communiste de l'URSS, a pris soin d'éditer à Moscou une version française de la nouvelle Histoire du Parti publiée en russe l'année précédente, œuvre d'une «brigade» de onze docteurs et sous-docteurs ès sciences historiques aux ordres du secrétariat de ce même parti. Cette nouvelle Histoire annule et remplace la dizaine d'Histoire du Parti qui, successivement, au cours d'une trentaine d'années, ont eu force de loi dans le monde communiste avant d'être vouées au pilori et mises au rebut. La brigade des onze historiographes officiels, assistée d'une armée d'auxiliaires bien retranchée dans plusieurs Instituts, a fait largement usage de l' Histoire précédente, le «Précis » rédigé sous la férule de Staline, qu'elle avait pour mission de corriger afin d'en éliminer le « culte de la personnalité» ou, à proprement parler, l'apologi_edélirante du tyran paranoïaque. Elle a rempli sa tâche conformément"'à la version établie, pesée et soupesée par lesJorganes qualifiés du Parti et déjà répandue par les deux Encyclopédies soviétiques post-staliniennes. * ,,,_ ,,,_ ·Cette malheureuse Histoire a une histoire malheureuse, ayant mal commencé avec Les Origines du parti communiste-bolchévik russe, opuscule indigent de G. Zinoviev (en français, Pétrograd 1920) et dont l'auteur produisit prématurément, en 1924, la première Histoire du parti communiste russe (en français, Paris 1926) d'une orthodoxie alors insoupçonnable, mais bientôt mise à l'index. On sait comment Zinoviev, le seul bolchévik avec qui Lénine ait conjointement signé de ses écrits parmi les plus importants, devait misérablement finir, pitoyable loque humaine torturée, avilie par Staline avant le coup de grâce d'une balle dans la nuque. Biblioteca Gino Bianco . LIVRES Presque en même temps que lui, V. Nevski, marxiste sérieux et historien consciencieux, publiait à Léningrad le tome I d' Esquissesd'histoire du Parti (1924), suivi d'une Histoire du Parti (1926), ouvrages tendancieux au sens où l'auteur ne saurait s'abstraire de sa tendance idéologique, mais indubitablement honnêtes, ce qui les condamnait à disparaître, ainsi que le vieux Nevski lui-même, sous Staline. Un sort identique attendait les quatre gros volumes de l' Histoire (19261930) composée, sous la direction d'E. Iaroslavski, par une équipe comprenant G. Kramolnikov, N. Elbov, O. Rimski, I. Mints, N. Nikitine, A. Roos, D. Baïevski, A. Sidorov, Maïorski, Vaks, tous plus ou moins liquidés peu après sans laisser de traces, sauf Mints et Iaroslavski. Ce dernier écrivit encore, sous sa seule signature, de Courtes esquisses d'histoire du Parti (1929) dont il existe une version française : Hùtoire du parti communiste de l'URSS (Paris, 1931); la servilité de leur auteur envers Staline n'a pas épargné à ces livres le pilon, ni à Iaroslavski la disgrâce. Pour abréger, on a passé outre aux ouvrages de M. Liadov, de K. Chelavine, de R. Kerjentsev, de Volossévitch, antérieurs aux précédents que va supplanter celui d' A. Boubnov ( 1930), paru d'abord dans le tome XI de la Grande Encyclopédie Soviétique (176 colonnes compactes, soit environ 350 pages de livre). Boubnov, lui aussi, bien que conformiste, périra par ordre de Staline et son V.K.P., titre de son Histoire ( ce sont les initiales russes du nom du Parti), se volatilisera comme par enchantement après un tirage énorme. Alors viennent les deux volumes de N. Popov : Esquisse d'histoire du Parti (1932) dont il a paru une traduction en anglais : Outline History of the Communist Party (Moscow-Leningrad, 1934), qui subiront le même sort, ainsi que leur auteur, après une faveur aussi passagère qu'arbitraire. A mesure que Staline s'érigeait en génie universel et se persuadait de son U}lÏcitécréatrice du Parti, de la Révolution, de· l'Etat soviétique, l'importance même de Lénine se réduisant à proportion, et tandis que tous les idéologues du Parti étaient envoyés au supplice, le besoin d'une Histoire -spécifiquement stalinienne et définitive se faisait impérieusement sentir. Staline en passa commande à une équipe de cinq « professeurs rouges» dirigée par B. Ponomarev, sous la surveillance de V. Knorine, stalinistes à toute
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