UNE TRANCHE DE VIE SOVIÉTIQ!IE par Paul Barton AY~T OCCUPÉ Smol~nsk en Juillet 1941, l'armee allemande mit la mam sur les archives du parti communiste pour la période allant de 1917 à 1938 (les documents des années 1939-41 furent probablement détruits ou emportés par les fonctionnaires en fuite) ; elles ont trait à la région de Smolensk de 1917 à 1929 à l' oblast occidentale de 1929 à 1937 et à l' oblas; de Smolensk à partir de 1937. Plus de cinquante dossiers, comptant quelque 200.000 pages de documents, furent envoyés pour examen en Allemagne où ils devaient tomber, à la fin de la • guerre, aux mains de l'armée américaine. M. Merle Fainsod, du Russian Research Center de l'Université Harvard, qui n'est pas un inconnu pour les lecteu_rsde langue française 1 , a entrepris le grand travail de classement et d'interprétation de cette documentation unique en son genre. Il en a publié les résultats dans un volume où sans se borner à reproduire et commenter les pièces les plus significatives, il tient à laisser parler avant tout les docûments, abondamment cités 2 • Comme ces archives jettent une lumière nouvelle sur maints aspects du régime soviétique, les matières traitées sont. divisées, f~rt à propos, en deux grandes p~es : le fon~onnement de l'appareil du pouvoir et son empnse sur la communauté. Dan~ la première sont analysées l'organisation du Parti et les autorités administratives de l' oblast du rayon et du village, l'activité policière et judi~ ciaire (rôle des tribunaux et des procureurs). La seconde ~o~e _sur la ~~alité, les épurations, la collecttvisatton de 1 agnculture, la vie des kolkhozes, les stations de tracteurs et machines les sovkhozes, les ouvriers de l'industrie, le~ forces armées, l'enseignement supérieur, la cen1. Cf. Merle Fainsod : Comment l'URSS est gouvernée, Paris 1957. 2. Smolen_sku~er Soviet Rule, Cambridge (Mass.) 1958, Harvard Umvers1ty Press, m + 484 pp. Biblioteca Gino Bianco .... sure, le droit de pétition, les komsomols, la relig~on. Aut~t dire que l'ouvrage englobe la vie d une province sous toutes ses formes. On peut regretter qu'un chapitre n'ait pas été réservé, dans la première partie, aux syndicats dans l'appareil du pouvoir. Il est vrai que Smolensk est au centre d'une région agraire, ne posséd~nt qu'une ind~strie faiblemen~ développé~. Il n en reste pas moms que les archives contiennent apparemment certaines pièces importantes pour l'ét1:1~ede l'intégration des syndicats dans le dispositif gouvernemental. Celles que l'auteur cite, malheureusement peu nombreuses et dispersées dans divers chapitres, sont déjà révélatrices. Par exemple, parmi les sections de l' obkom ( comité d' obla;t) on n' e7:1trouve pas q}1Ïsoit spécialement chargee de guider les syndicats. Ceux-ci sont dir~g~s,par la section qui_s'occupe également des acttv:it~s~atronal~s ; aussi bi~n, le président d'un comite ,d entreprise et le directeur sont choisis par le même fonctionnaire du Parti (pp. 64-66). Autre exemple : toute une série de problèmes relevant de ·la routine syndicale - tels l'état d'esp_rit du pe_rso~el d'une entreprise, les instruct~ons . prodiguees ,aux SYJ?,dicatspar le Parti, les violations de la democratte dans les syndicats ou des prérogatives de ceux-ci, etc. - ont été classés dans !a catégorie des secrets, ce qui signifie que le coumer les ~oncern~t devait être échangé en!r~ ~rganes syn~caux uruquement par l'interme~~ire de la police secr_ètee! ne pouvait être marne que par des fonctionna1res syndicaux et des ~!énodactylos figurant sur les rôles de: cette dern1.e!e (\JP· 163-165). Autre exemple encore : une directtve secrète adressée le 26 Janvier 1927 · par le président du Comité fédéral des ouvriers du bois aux comités inférieurs précise que la grève est « catégoriquement interdite » à moins d'une autorisation dudit Comité ; et, bien entendu, on ne trouve pas trace, dans les archives ne fût-ce que d'un seul cas de pareille autoris~tion (p. 318). .
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