280 sont sujettes à un ralentissement à long terme ; c'est ce qu'a éprouvé l'industrie automobile. Poussée démographique Que réserve l'avenir ? Les Américains, ayant façonné cette civilisation suburbaine, mobile, vont-ils s'arrêter pour y mettre un peu d'ordre et jouir de l'abondance en travaillant quatre jours par semaine ? On peut en douter à considérer leur décision extraordinaire et inattendue de procréer davantage. L'élévation du taux de natalité pendant la guerre, qui passa de 18 à environ 22 pour 1 .ooo, résulta dans une large mesure de la reprise du plein emploi et des mariages de jeunes. Mais dans les années d'après guerre, le taux s'éleva encore, pour se stabiliser aux environs de 25 pour 1.000, ce qui donne un accroissement de population de 1,5 °/4 par an; les changements qui en résultent dans la structure d'âge de la population et le taux de formation des familles sont d'une importance économique primordiale. Se combinant avec d'autres facteurs - notamment le déficit cumulatif du capital social et la course aux armements, - l'accroissement des personnes à charge par rapport aux producteurs fera sans doute de la prochaine décennie une époque de vigoureuse expansion de la production, assortie d'une certaine austérité de la consommation privée. Dans son propre choix, la société américaine est en 1959 moins riche qu'elle n'en a l'air. Nouveau départ de l'Angleterre Pourquoi, après 1851, l'Angleterre n'est-elle pas passé plus rapidement de la maturité technique à l'âge de la haute consommation ? Premièrement, la maturité est affaire de virtuosité et de diffusion de la technique du côté de l'offre. Au x1xe siècle, le revenu réel per capita augmenta certes, mais sous forme d'une amélioration de l'alimentation et de l'habillement, du logement, des services publics et des transports. L'âge des biens de consommation durables prit un modeste départ dans les années I 890 avec la grande vogue des bicyclettes ; il ne s'implanta solidement qu'à la fin des années 30, pour être interrompu par la guerre~ La progression de la consommation de masse ne reprit vraiment que da~s les années 50 ; elle est aujourd'hui en bonne voie. Deuxièmement, l'Angleterre du x1xe siècle était une région industrielle de première importance dans l' éc~nomie mondiale, de même que la Nouvelle-Angleterre dans l'économie continentale américaine. Le capital et 1~ main-d'œuvre, alors mobiles, étaient attirés vers les points où l'on escomptait une rentàbilité privée et des salaires réels plus élevés. L'Angleterre,. en exportant des capitaux pour mettre en valeur des territoires agricoles ou construire des chemins de fer, Biblioteca Gino Bianco .. LE CONTRAT SOCIAL bénéficiait certes à brève échéance d'importations invisibles et à longue échéance de produits alimentaires et de matières premières à meilleur marché. Mais elle faisait plus : l'émigration anglaise et les exportations de capitaux anglais bénéficiaient au commerce dù monde entier. L'élévation relativement lente du revenu réel - et de la population - dans des régions avancées comme l'Angleterre et .la Nouvelle-Angleterre s'explique en partie par une politique qui permettait aux hommes et aux capitaux de rechercher les points où les salaires réels et la rentabilité privée étaient les plus élevés. Troisièmement, la répartition dans le temps des phases de croissance fut affectée, en Angleterre comme ailleurs, par des entractes pendant lesquels les ressources étaient consacrées à la guerre, gaspillées dans les. mines d'or ou dissipées - comme pendant l'entre-deux-guerres - parce que la politique générale n'avait pas su créer rapidement les conditions d'un progrès régulier. Rien dans l'analyse des phases de croissance ne garantit que le revenu réel par tête d'habitant progressera partout au même rythme. Rien ne rend les phases indépendantes du .gaspillage de capital dans la guerre ou dans des entreprises séduisantes mais improductives, pas plus qu'elles ne peuvent échapper à la politique générale. Les choix de l'Europe L'Europe occidentale fit dans l'ensemble une autre série de choix que J' Amérique entre les solutions d'après la maturité. Avant 1914, les sociétés européennes évoluaient plus nettement que l'Amérique vers l'État bien-être. La cause fondamentale est probablement qu'elles étaient moins agraires dans leur équilibre politique ; mais d'autres éléments entraient en ligne de compte, notamment le poids plus grand des doctrine~ et des idéaux .socialistes parmi la maind' œuvre industrielle et les dirigeants intellectuels. Dans les années 20; l'Europe occidentale eut à faire face à des problèmes de reconstruction et de rajustement plus graves que les États-Unis et elle ne rentra pas .immédiatement dans l'âge des biens de consommation durables. En général, il n'y eut, pour la plus grande partie de l'Europe, qu'environ quatre années de prospérité normale, de 1925 à 1929, qui rétablirent à peu près ou améliorèreht légèrement les niveaux de production de 1913~ L'Europe occidentale accusait un retard relatif sur l'Amérique. Ce retard dans l'expansion correspond, si l'on analyse les stades de croissance, à une incapacité de s'élever vers la phase .normale de la croissance au-delà de la maturité. Dans les années 30, la politique des gouvernements européens commença à créer une ambiance de prospérité plus grande : les élasticités de revenu de la demande se traduisirent par une augmentation disproportionnée de la demande de biens de consommation durables et de services.
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