Débats et recherches DES VALEURS ESSENTIELLES EN p·oLITIQQE par Daya LE TRAITFONDAMENTdAeLtout système politique est qu'il est un parmi les autres. Ses rapports avec les citoyens, ou avec certaines collectivités qui le constituent, sont radicalement différents de ceux qu'il entretient avec des régimes autres que lui-même. A l'égard de ses propres citoyens et collectivités, il jouit d'une souveraineté reconnue, qui fait défaut dans ses relations avec d'autres gouvernements. Là, il n'est qu'un parmi tant d'autres, et il ne bénéficie de ce fait d'aucune position privilégiée. Un gouvernement est donc attiré en même temps dans deux directions. Cette double orientation fait naître des exigencescontradictoires, par suite d'une soumission simultanée à des valeurs opposées. Faute de saisir cette dualité, il est impossible de comprendre les phénomènes étudiés par la science politique. Les gouvernements avec lesquels on entre en relation sont toujours soit des ennemis soit des alliés potentiels, face à d'autres qui sont à leur tour des ennemis réels ou potentiels. Les relations entre gouvernements impliquent toujours la possibilité d'un conflit : il ne saurait en être autrement. Les rapports entre États ne peuvent être régis par des considérations ayant en vue le bien-être d'autrui, sauf quand il apparaîtra nécessaire de fortifier un allié contre un ennemi potentiel ou réel. Mais comme l'allié lui-même est à son tour un ennemi virtuel, la recherche de son bien-être n'est jamais pleinement sincère ; souvent même, en raison de la situation changeante, elle est vouée à l'hypocrisie. La duplicité que l'on prête à la diplomatie est intrinsèque à sa nature; elle n'est pas due · à quelque perversité des gouvernants. Les rapports qu'un gouvernement entretient avec ses propres citoyens n~ peuvent au contraire jamais être définis dans le sens d'une situation où ils seraient considérés en tant qu' ennemis, possibles ou réels. Il s'agit pour celui-là d'intégrer Biblloteca G·ino Bianco les diverses activités de ceux-ci, de veiller au fonctionnement régulier de la société en assurant l'exécution des tâches de chacun, de constituer le recours suprême en cas de litige,· enfin de faire en sorte que les occupations matérielles et culturelles des individus soient poursuivies avec un succès toujours plus grand. Ainsi les citoyens sont-ils considérés avant tout comme des ayants droit p·ar rapport aux biens et aux services, ce qui ne saurait être vrai en aucun cas des autres gouvernements. LA DOUBLEORIENTATIOdN'un gouvernement peut être désignée par les termes de « pouvoir » et de «bien-être», termes en eux-mêmes ambigus et qui sont à l'origine de multiples malentendus. Dall! ce qui suit, il faudra toujours garder présent à 4'esprit qu'un gouvernement ne saurait s'intéresser âu bien-être d'autres gouvernements. Même si, par un exceptionnel souci des valeurs morales, il cède à un élan de générosité, cet acte sera rarement considéré comme justifié, tant par ses propres citoyens que par les historiens à venir. L'altruisme n'est une vertu que chez les individus. Parmi les nations, il a toujours été considéré d'une autre façon. Au contraire, il n'y a jamais eu de justification possible pour un gouvernement 1 qui ne se préoccupait pas du bien-être de son peuple. Ufi tyran peut bien régner, un dictateur prospérer - pour leur justification, ils leur faut invoquer le bien-être du peuple. La relation entre . « pouvoir » et « bien-être » est complexe ; à moins de l'élucider en détail .on ne pourra comprendre les multiples contra1. Not1:susons du terme «gouvernement» à la fois sous l'acception de gouvernement et de société, en espérant que le contexte rendra parfaitement clair le sens dans lequel nous l'entendons. •
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