236 de ~~gues qui jusqu'alors ne pouvaient s'écrire ; mais _il a usé de son po?voir, malgré l'opposition unamme de la population locale, pour imposer l'abandon de l'écriture arabe sanctionnée par la religion et utilisée par des millions de musulmans. Il l'a d'ailleurs fait en deux temps, introduisant d'abord l'alphabet latin, puis lui substituant en 1939 les caractères cyrilliques.· Les tsars euxmêmes n'avaient jamais rêvé pareille victoire de la culture russe sur leurs sujets musulmans. La littérature et l'art populaires ont eu à subir aussi l'ingérence du régime chaque fois que Moscou croyait discerner une manifestation de «nationalisme bourgeois». Le régime s'en est souvent pris aux écrits populaires anciens ou nouveaux, drames, opéras, etc., les condamnant pour déviation ~e la ligne officielle, ~nt~rdisant les représentations et usant de represailles à l'égard des auteurs. L'historiographie et la présentation de l'histoire nationale ont particulièrement souffert : la conquête tsariste doit être traitée comme «historiquement progressiste». L'un des exemples les plus flagrants de cette ingérence est la liquidation de l'appareil culturel des Juifs soviétiques, de leur théâtre, de leurs journaux, de leur maisons d'édition et de leur association d'écrivains - pendant la vague d'antisémitisme officiellement inspiré après la guerre ; bien que le régime prétende qu'aucune discrimination n'est pratiquée, rien n'a jamais été fait pour remédier à cette situation. Toutes les religions minoritaires ont été l'objet de mesures répressives. Le fait que, d'un point de vue doctrinal, ces mesures aient fait partie de la campagne communiste contre la foi religieuse en soi et n'aient pas épargné la religion orthodoxe russe n'a pas été une consolation pour les peuples dont la religion et la nationalité se confondent étroitement. Pour eux, les persécutions religieuses n'ont été qu'une preuve supplémentaire de l'effort fait par un régime étranger pour empiéter sur leurs traditions culturelles et entraver leur développement national. En bref, l'attitude soviétique envers les« formes nationales » dans le domaine culturel a été de tolérance quand cela ne nuisait pas aux besoins idéologiques ou pratiques du régime. La manière forte EN DEHORSdes domaines spécifiques. de l'expression culturelle, on n'a laissé survivre que peu d'usages traditionnels. Dans les domaines politique, économique et social, les institutions uniformes de la société soviétique prévalent sous la forme du Parti omnipotent, de la bureaucratie administrative, de l'économie plani- · fiée et contrôlée _ducentre, de l'agriculture collectivisée et de l'appareil tentaculaire d'endoctrinement et de contrôle idéologiques. La politique soviétique des nationalités ne reconnaît pas .le Biblioteca G·ino Bianco L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE fait que les formes économiques, politiques et sociales de l'organisation peuvent être les éléments distinctifs et même déterminants d'une culture nationale. L'introduction du système soviétique entraîna une révolution sociale et culturelle sur tout le territoire. Mais le processus de soviétisation toucha plus durement les peuples des régions sousdéveloppées d'Asie centrale que les populations européennes sédentaires déjà quelque peu adaptées aux normes de là société industrielle. Tel est le cas des Kazakhs. Avant la collecti- · visation, ils nomadisaient dans la steppe, ou, sédentaires de fraîche date, ils pratiquaient l'élevage des bœufs et des moutons. Leur mode de vie était régi tout entier par la structure tribale. ~ La tentative d'imposer aveuglément la collectivisation forcée du début des années 30 rencontra chez eux une résistance acharnée qui aboutit à -1~ lutte ou:7erte contre le régime. Les pertes en vies humaines furent effrayantes. Si certains ~az3k!1s pur~nt. gagner avec leurs troupeaux le Si,n7~ang chinois, le reste de la population fut decime dans les combats et par la famine. Les chiffres des recensements de 1926 et 1939 mon- ~re~t que, dans l'intervalle, la population kazakhe eta1t tombée de 3,967 à 3,098 millions (déclin absolu de 8~8.ooo, soit 22 °/4). En outre, la plus grande partie du cheptel, base de l'économie locale, disparut, victime de l'abattage auquel les indigènes désespérés se livraient en représailles .et du m~que de soins : par rapport à 192~, 11ne restait e~ 1934 que 25 à 50 % des bovms, 13 % des ovms et 12 % des chevaux. · Voilà un des chapitres de l'histoire soviétique trop souvent passé sous silence. En 1923, Staline avait adressé au Parti une directive prescrivant que le ~Turkestan - qui englobait le Kazakhstan - fût transformé en une république modèle, étant donné son importance révolutionnaire pour la politique orientale de la Russie soviétique. On y lisait : « Nous devons remplir cette tâche à tout prix, sans épargner aucun effort ni reculer devant aucun sacrifice... » On ne peut certes accuser Staline d'avoir reculé devant les sacrifices au Kazakhstan ... Chances égales pour tous ~~OI~IÈME~U~TI0N : jusqu~à q~~l point la politique sov1etique des nationalites · est-elle non ·discrirnin~toi~e,. jusqu'à quel point offret-elle aux mmor1ta1res des chances ·égales à celles qu'elle offre aux Grands-Russes? Les possibilités d'instruction, de travail, d'avancement social sont-elles les mêmes pour tous? Dans l'ensemble, le dossier de l'Union soviétique est bon. Les ressortissants de toutes nationalités bénéficient, en gros, d'un traitement égal quant aux possibilités économiques et sociales,
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