LES NATIONALITÉS EN U.R.S.S. par Alex lnkeles DANS L'ATMOSPHÈRacEtuelle d' ((émulation pacifique entre les systèmes», l'accent est mis sur le facteur économique des niveaux de production et de consommation quand on compare les réalisations soviétiques aux occidentales. C'est pourquoi certains observateurs ont pratiquement perdu de vue les caractéristiques fondamentales, politiques, sociales et culturelles, qui continuent de différencier les deux systèmes. Dans cet ordre d'idées, _il existe un problème important : le statut des minorités nationales et raciales en Union soviétique. Alors que les démocraties occidentales ont entrepris d'accorder l'indépendance nationale complète aux peuples d'Afrique et d'Asie, il paraît tout indiqué d'examiner la situation des minorités soviétiques. Le sujet a reçu jusqu'ici moins d'attention qu'il n'en mérite, peut-être parce que beaucoup prennent pour argent comptant l'affirmation de Moscou selon laquelle tous les problèmes de nationalité et de race ont été depuis longtemps résolus avec succès. S'il en était ainsi, la politique soviétique n'en mériterait pas moins d'être examinée • de près. Or, en dépit de certaines réalisations appréciables, le régime est loin d'avoir résolu le problème à la satisfaction des groupes euxmêmes ou à l'honneur du système. Afin de juger sainement la politique soviétique des nationalités, il faut connaître certains faits historiques et démographiques particuliers à ces -minorités. Structure démographique Sr LESGRANDs-RussEsreprésentent en Union soviétique le groupe le plus dense, ils ne pos~ sèdent qu'une marge précaire de supériorité numérique sur l'ensemble des populations minoritaires. Par suite de l'expansion de l'empire tsariste, les .Russes étaient autrefois en minoBiblioteca G·ino Bianco rité, représentant 4 5 % seulement de la population au recensement de 1897. La perte de certains territoires pendant la révolution et la guerre civile modifia la situation et en 1926 les Grands-Russes représentaient 52,9 ·01o du total. Dans le dessein manifeste d'augmenter cette légère marge, la base de la classification fut transformée lors du recensement de 1939 : on ne demandait plus aux gens ce qu'ils considéraient comme leur « origine ethnique » ( narodnost), mais plutôt ce qu'ils croyaient être leur « nationalité », le sens du terme russe ( natsionalnost) étant plus proche de culture ou de citoyenneté que de race. De cette façon le régime fut en mesure d'annoncer en 1939 une majorité russe de 58 %- Le recensement de 1959, dont les résultats préliminaires viennent d'être publiés, révèle une nouvelle baisse, due sans nul doute à l'incorporation depuis 1939 des États baltes, d'une partie de la Pologne et de la Bessarabie (Moldavie). Aujourd'hui, un peu de moins de 55 % des Soviétiques se considèrent comme russes de nationalité et un pourcentage encore plus faible désignent le russe comme leur langue maternelle. Les minorités vivent généralement en groupes homogènes et compacts _en lisière de la masse territoriale centrale, qui est le territoire des Grands-Russes. Cette structure démographique fondamentale persiste malgré la dispersion constamment accrue de la population - surtout des Russes .- dans d'autres régions nationales au cours de la deuxième guerre mondiale et depuis lors. Les quinze républiques fédérées qui · s'étendent le long des frontières extérieures de l'Union soviétique constituent le gros, 80 % au ·moins, des minorités nationales. Au nord-est, les trois Républiques baltes comptent près de 5 millions de Lettons, de Lituaniens et d'Estoniens. - Sur la frontière occidentale, il y a quelque 8 million~ de Biélorusses et 37 millions d'Ukrainiens qui, avec les Russes, donnent à l'Union
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